Reportage scientifique
10 ans ! Cela fait déjà 10 ans que, tous les deux ans, des praticiens du monde entier se réunissent à Bruxelles pour ce qui est dorénavant devenu un rendez-vous incontournable de l'odontologie esthétique : la Conférence internationale de dentisterie adhésive et esthétique (CIDAE).
Pour fêter cet anniversaire dignement, les organisateurs de la CIDAE avaient prévu les choses en grand : plus de 1 000 participants venus d'une quinzaine de pays, 2 jours de...
10 ans ! Cela fait déjà 10 ans que, tous les deux ans, des praticiens du monde entier se réunissent à Bruxelles pour ce qui est dorénavant devenu un rendez-vous incontournable de l'odontologie esthétique : la Conférence internationale de dentisterie adhésive et esthétique (CIDAE).
Pour fêter cet anniversaire dignement, les organisateurs de la CIDAE avaient prévu les choses en grand : plus de 1 000 participants venus d'une quinzaine de pays, 2 jours de congrès, une master class en présence de Francesca Vailati consacrée au diagnostic fonctionnel, et bien sûr un gala exceptionnel pour clôturer ces trois belles journées de décembre 2019. Au programme de cette nouvelle édition, des conférences passionnantes, des rencontres et des partages de bonnes pratiques, et bien évidemment des échanges sur les recherches et innovations en cours. Petit tour d'horizon de ce qu'il fallait en retenir.
Elsa Dreyfus-Schmidt, Sixtine BordeauxDiplômé en 2005 de l'université de Timisoara en Roumanie, Mirela Feraru rejoint l'équipe de la clinique Bichacho à Tel Aviv en 2009, où elle se spécialise dans le domaine de la dentisterie esthétique, aussi bien dans son aspect parodontal que prothétique. Cette conférencière de renommée mondiale publie sur les restaurations adhésives et sur les traitements paro-prothétiques pluridisciplinaires. Le Dr Feraru maîtrise également la documentation photographique dentaire de haute qualité et co-signe avec le Dr Bichacho le livre Dental Visualization récemment publié chez Quintessence.
Pour obtenir un résultat esthétique harmonieux des restaurations indirectes en antérieur, le praticien doit choisir avec soin le matériau de la restauration, mais il se doit également d'analyser la nature et la teinte du pilier et l'intégration de la restauration aux tissus environnants, qu'il s'agisse d'une dent naturelle (vivante ou non) ou d'un implant (fig. 3).
Dans les cas où la nature du substrat des dents à restaurer est différente (implantaire et dentaire), le challenge est encore plus grand et nécessite une planification minutieuse des étapes du traitement parodontal (gestion des tissus mous et osseux) et restaurateur.
Il reste pourtant des paramètres non maîtrisés par le praticien (mucosite, péri-implantite...). Le patient doit en être informé, accepter de faire des compromis, et de réfléchir aux alternatives comme le bridge collé. Cette thérapeutique permet de contrôler l'enveloppe et l'interface tissulaire avec de meilleurs résultats que les implants.
Le Dr Miraru présente le concept du contouring cervical pour améliorer le complexe dento-gingival (fig. 4 et 6) et de la couronne hybride (fig. 5).
Daniel Edelhoff est directeur et président du département de prothèse de l'université de Munich. Il est, depuis 2014, un membre actif de l'Académie européenne de dentisterie esthétique (EAED).
Convaincu de l'utilité du digital dans la pratique de la dentisterie, il évoque les polymères monolithiques CAD/CAM et leur utilité dans la phase provisoire des réhabilitations complexes.
Avec l'augmentation de l'incidence des atteintes morphologiques liées à l'érosion, les praticiens seront de plus en plus confrontés à des cas de réhabilitation globale et complexe. D'où l'importance d'une analyse préopératoire de qualité et d'une phase de temporisation et de validation du projet adéquate. Il faudra faire attention cependant à ne pas surtraiter ces atteintes physiologiques. Nous rappellerons que certaines atteintes sont physiologiques : c'est le cas de l'usure liée au vieillissement par exemple. En revanche, les usures pathologiques (liées à une parafonction, de l'usure mécanique ou de l'usure chimique) peuvent nécessiter un traitement.
Rappelons la phrase de Dawson : « 90 % des échecs cliniques ont lieu avant le début du traitement ! » Les échecs sont davantage liés à une mauvaise gestion du cas qu'à des erreurs techniques.
Lorsqu'un patient se présente avec de l'usure, nous devons évaluer les facteurs de risque, mettre en place un programme de prévention adapté au patient, et mettre en place un calendrier de suivi.
On envisagera de « traiter » les dents uniquement si le patient se plaint d'un problème fonctionnel et esthétique. Dans certains cas, et notamment chez les patients asymptomatiques, la meilleure option thérapeutique est l'abstention.
L'occlusion physiologique permet un fonctionnement optimal de l'appareil manducateur : les dents postérieures protègent les dents antérieures lors de l'occlusion statique, et les dents antérieures protègent les dents postérieures dans les mouvements dynamiques.
Une usure marquée des dents postérieures entraîne une perte de calage postérieur. Cette perte de calage est à l'origine d'une surcharge dans le secteur antérieur, elle-même responsable d'une usure précoce du bloc incisivo-canin. Il en résulte une tendance à la classe III d'Angle et au bout à bout incisif. Cela a un impact fonctionnel et esthétique sur l'esthétique du visage et du sourire.
Avant de se lancer dans une réhabilitation globale, on se doit de valider le projet esthétique et fonctionnel en bouche. À l'aide de wax-up réalisés au laboratoire, le praticien réalise un mock-up qui sera transféré dans la bouche du patient.
Ce mock-up peut être réalisé en polymères monolithiques usinés par CAD/CAM. L'avantage de ces polymères est leur résistance mécanique. Ils permettent d'avoir des provisoires très résistantes sur le long terme. Le praticien et le patient peuvent donc valider sur plusieurs semaines le projet prothétique et y apporter des modifications si nécessaire.
La phase de temporisation est nécessaire à l'acceptation du traitement par le patient et évite les échecs ultérieurs. Une fois les provisoires validées, la phase de préparation peut débuter. On privilégiera la réalisation des soins par quadrant, selon le « munich splint concept ». Cela a l'avantage de simplifier les séances pour le praticien.
1 Loomans B, Opdam N, Attin T, Bartlett D, Edelhoff D, Frankenberger R, et al. Severe tooth wear: European consensus statement on management guidelines. J Adhes Dent 2017;19:111-119.
Originaire des Pays-Bas, Marco Gresnigt est brillamment diplômé de l'université de Groningen en 2005. En 2012, il obtient son PhD sur l'évaluation des facettes in vitro et in vivo. Actuellement président du groupe de bio-émulation international, il a publié de nombreux articles sur la dentisterie adhésive et minimalement invasive.
Avec l'avènement du collage, le praticien dispose de tout un panel d'options thérapeutiques pour répondre à la nécessité de restaurer une dent. Quelle que soit la thérapeutique choisie, les objectifs de traitement sont toujours les mêmes : maintenir la santé des tissus, prévenir la survenue de pathologie, éviter les actes iatrogènes et maximiser la préservation tissulaire.
Pour répondre à ces objectifs, les couronnes périphériques dans le secteur antérieur ont peu à peu fait place aux facettes en céramique, plus conservatrices en tissu mais aussi plus esthétiques.
Son exposé s'articule autour de deux problématiques : peut-on coller des restaurations céramiques par-dessus une ancienne restauration en composite ? Quels sont les échecs possibles et comment les éviter ?
Le traitement débute par une consultation. Elle permet d'évaluer la situation clinique et de poser (ou non) l'indication de la réalisation de facettes. On réalisera deux empreintes ainsi qu'un ensemble de photos endo-buccales et exo-buccales, permettant au prothésiste de réaliser un wax-up par technique de cire – ajoutée ou numérique.
La deuxième étape du traitement correspond à la validation clinique du wax-up. Il est transféré en bouche à l'aide de clés en silicone. On obtient alors un mock-up. Ce dernier permet de valider un ensemble de critères fonctionnels et esthétiques avec le patient, avant même d'avoir touché aux dents. À ce stade, le traitement est totalement réversible.
Une fois le plan de traitement validé avec le patient, la préparation des dents peut commencer.
Un mock-up est de nouveau transféré en bouche. Les préparations sont réalisées à travers le mock-up à l'aide de fraises calibrées. Cela permet de rester au maximum dans l'émail et de ne pas préparer plus que nécessaire.
La préparation terminée, on peut réaliser l'IDS (cf. ci-dessous) puis l'empreinte. Le prothésiste pourra réaliser la ou les facette(s). Elles seront essayées, validées, puis collées en bouche.
Étude randomisée sur la performance des restaurations indirectes en composite versus céramique (à 6 ans).
L'étude conclut que les composites présentent une moindre performance que les céramiques sur les points suivants :
– maintien de la teinte initiale ;
– état de surface/rugosité de surface ;
– fracture de la restauration ;
– usure de la restauration.
En outre, il existe une différence significative entre les restaurations en céramique et les restaurations en composite dans le taux de survie à 10 ans en faveur de la céramique.
En ce qui concerne les céramiques, les échecs les plus fréquents sont le chipping et le décollage.
Les échecs par décollement sont plus fréquents lorsqu'il y a d'importantes plages dentinaires exposées dans la préparation.
Il faut prendre garde lorsqu'il existe une restauration préexistante sur la dent : on aura un risque accru des défauts marginaux et colorations marginales.
Pour ce qui est de la prévalence des échecs, les études ont des conclusions variées.
L'existence d'une restauration sous-jacente ne semble pas augmenter la prévalence des complications (fractures) ou des échecs.
La présence d'une restauration préexistante diminue l'adaptation marginale et augmente le risque de fracture. Plus la restauration est importante, plus le risque d'échec est accru.
Le protocole est le suivant :
– faire la préparation pour la facette, indépendamment de la localisation de la restauration ;
– mise en place du champ opératoire (digue) ;
– mordançage à l'acide orthophosphorique 37 % de l'émail (30 secondes) et de la dentine (15 secondes) ;
– appliquer du silane sur le composite : il réagit avec la couche de silice et forme un pont siloxane ;
– application de l'adhésif sur l'émail, la dentine mais aussi la restauration (se lie à la partie libre organique du silane), puis séchage et photopolymérisation ;
– la dent est recouverte de glycérine et toutes les faces sont photopolymérisées afin d'inhiber la couche d'inhibition présente au contact de l'air libre (afin d'éliminer le maximum de monomères libres) ;
– une fraise bague rouge est passée au niveau des bords d'émail pour éliminer toute pollution de la surface amélaire ;
– élimination des excès et réalisation de la restauration provisoire.
On colle mieux sur l'émail que sur la dentine. Les échecs de décollement sont donc plus fréquents sur les dents dont les tissus exposés sont majoritairement dentinaires.
Que se passe-t-il quand, après la préparation, le tissu qui reste est exclusivement dentinaire ? Ou lors d'une ré-intervention ?
La solution est le scellement dentinaire immédiat (ou Immediate Dentine Sealing (IDS) en anglais).
L'IDS correspond à la création d'une couche hybride sur la dentine préparée.
Appliquer de l'acide orthophosphorique sur la surface dentaire pendant 5 secondes. Rincer et sécher. Le mordançage aide à distinguer l'émail de la dentine.
– Mise en place du champ opératoire (digue) ;
– mordançage à l'acide orthophosphorique 37 % de l'émail (30 secondes) et de la dentine (15 secondes) ;
– rinçage et séchage de la digue et de la dent ;
– réhydratation de la dentine (avec de la chlorexidine ou de l'éthanol sur un micro-brush) ;
– application du primer et séchage ;
– application de l'adhésif, séchage et photopolymérisation ;
– le tout est recouvert de glycérine et de nouveau photopolymérisé afin d'éliminer la couche d'inhibition présente au contact de l'air libre afin d'éliminer le maximum de monomères libres ;
– fraise bague rouge passée au niveau de l'émail pour éliminer toute pollution amélaire éventuelle avant le collage final ;
– élimination des excès.
Il présente des avantages biologiques. Il permet le scellement des tubuli dentinaires exposés après la préparation, et donc une diminution des douleurs post-opératoires.
Il présente aussi des avantages biomécaniques en permettant une meilleure adhésion à la dentine.
Oui ! Ne pas faire l'IDS compromet la pérennité de la restauration. Sans IDS, les valeurs biomécaniques de la facette chutent, et on a un risque de fracture accru au niveau de la jonction émail/dentine.
Le facteur de réussite ? Le praticien ! C'est lui qui choisit le matériau, le matériel et le temps passé sur le traitement.
C'est aussi lui qui décide ou non d'apprendre de ses erreurs. Sans apprendre de ses erreurs, on ne peut pas progresser. Or il faut soigner ses patients comme on aimerait être soi-même traité. Il est possible d'atteindre des taux de survie très élevés.
2 Gresnigt MM, Kalk W, Ozcan M. Randomized clinical trial of indirect resin composite and ceramic veneers: up to 3-year follow-up. J Adhes Dent. 2013 Apr;15(2):181-90.
3 Gresnigt MMM, Cune MS, Jansen K, van der Made SAM, Özcan M. Randomized clinical trial on indirect resin composite and ceramic laminate veneers: Up to 10-year findings. J Dent 2019;86:102-109.
4 Ibid.
5 Gresnigt MM, Ozcan M, Kalk W, Galhano G. Effect of static and cyclic loading on ceramic laminate veneers adhered to teeth with and without aged composite restorations. J Adhes Dent 2011;13:569-577.
6 Le sablage est un sablage réactif (Cojet) : il permet le dépôt de particules de silice au niveau de la surface sablée, et améliore donc la rétention chimique et mécanique au niveau de cette
7 Pascal Magne. Comparaison entre DDS (2-12 MPa) et IDS (55-58 MPa).
Thiago Ottoboni exerce dans une clinique privée à Blumenau, dans le nord de l'État de Santa Catarina. Il dispose d'un Master en dentisterie restaurative de l'université de Géorgie du Nord et du titre de « spécialiste en dentisterie restauratrice » dispensé par l'UNOPAR. Il est également l'auteur de nombreux articles et de chapitres de livres tournés vers la dentisterie restauratrice.
La dentisterie moderne dispose d'un éventail d'options thérapeutiques. Les résines composites en composent une grande part et jouent un rôle majeur dans le quotidien du chirurgien-dentiste.
Cependant, malgré une dentisterie de plus en plus biomimétique et « minimalement invasive », de nombreux traitements dépassent toujours les limites biologiques : préparations agressives, mauvaise application des protocoles de collage ou de scellement, etc.
Face à ces pratiques, nous sommes de plus en plus fréquemment amenés à réintervenir sur des soins existants.
Le traitement est d'autant plus complexe lorsqu'on réintervient. C'est pourquoi, avant d'intervenir en première intention, il faut se demander comment pourrait être géré un éventuel échec futur.
Avant tout traitement, et avant même de penser à toucher aux dents, il faut penser à :
– la prophylaxie ;
– proposer un éclaircissement ;
– la gestion des tissus parodontaux.
La vision globale du cas est toujours la « meilleure approche ».
En première intention, on cherchera à privilégier le composite (si la situation clinique le permet), principalement car c'est le matériau le plus facilement réparable.
Cependant, il faut garder en tête les inconvénients des résines composites. Elles sont à la fois organiques et inorganiques. Les polymères qui les constituent n'étant pas inertes, ils sont sollicités au quotidien : compression, corrosion, abrasion, changements de température... Ce qui peut entraîner une usure rapide du matériau.
Après la réalisation d'un composite, il est nécessaire d'établir un calendrier de suivi (tous les 6 mois environ) et de mettre en place une prophylaxie adaptée aux besoins du patient.
Lors de chaque rendez-vous de suivi, il faudra vérifier l'occlusion, polir la restauration, refaire un point sur l'hygiène si nécessaire, et adapter la fréquence de suivi (tous les 3, 6 ou 12 mois).
– Repolir (à faire à chaque rendez-vous de maintenance) ;
– réparer la restauration (partiellement) ;
– remplacer (en dernière option car cela reste assez délabrant du point de vue des tissus dentaires).
Ces trois « R » permettent d'optimiser au mieux la longévité des restaurations.
– « Stain removal » ;
– polissage à l'aide de fraises diamantées (5-7 rpms) + irrigation ;
– polissage à l'aide de fraises diamantées (10-20 rpms) + irrigation ;
– utilisation de « roues spirales en caoutchouc » avec de la pâte à polir puis sans pâte à polir.
NB : l'utilisation de « roues spirales en caoutchouc » donne de meilleurs résultats (diminution de la rugosité de surface et moindre variation de la teinte) quand elles sont utilisées sous irrigation.
– « Stain removal » ;
– biseauter la surface à réparer avec des fraises de petit calibre. Cela augmentera la rétention mécanique ;
– sablage réaction à l'oxyde d'alumine pendant 5 secondes ;
– mordançage à l'acide orthophosphorique pendant 15 secondes ;
– application de silane sur le composite (3 minutes de condensation) ;
– application du primer puis de l'adhésif, sans photopolymériser ;
– mise en place du composite.
Il existe plusieurs possibilités :
– À main levée ;
– avec une matrice de type « BRB » ;
– avec une clé en silicone ;
– avec un wax-up et une clé en silicone ;
– avec un wax-up réalisé à main levée ;
– à l'aide d'un outil de planification virtuel et des guides en résine.
– Empreinte de l'arcade avec la dent fracturée ;
– élimination au bistouri du volet vestibulaire ;
– conservation du pan palatin ;
– travail sur le silicone pour recréer une face palatine symétrique à la collatérale.
La clé peut ensuite être replacée en bouche. La clé permet de reconstruire aisément le pan palatin.
Il existe une autre possibilité : l'impression en 3D de deux clés (une palatine et une vestibulaire) issues d'un fichier STL, qui permettent d'appliquer le composite en vestibulaire puis en palatin.
Cette technique est reproductible car indépendante du praticien.
– Choix de la teinte :
Le rendu esthétique d'une stratification dépend du choix des différentes teintes. En effet, la teinte n'est pas la même en cervical qu'au niveau du bord libre. Il faut identifier :
• la teinte en cervical ;
• la teinte de l'émail du corps de la dent ;
• la teinte du bord libre.
Pour s'assurer que les teintes choisies correspondent à la dent naturelle, il faut :
• étaler des plots de composite en regard des zones concernées (épaisseur de 0,5 mm) ;
• photopolymériser ;
• prendre une photo du secteur antérieur maxillaire avec et sans filtre polarisant.
– pose du champ opératoire
– restauration en composite :
La clé de la réussite passe par la stratification du composite, c'est-à-dire l'application de plusieurs couches successives.
La couleur se travaille dès la première couche :
• couche 1 : contour et position de la face palatine, jusqu'au bord libre ;
• couche 2 : contacts proximaux (restaurés à l'aide d'une matrice transparente) et couche dentinaire (teinte plus saturée en cervical et plus translucide au niveau du bord libre) ;
• couche 3 : couche monochromatique teinte émail.
Attention : la forme et l'état de surface sont plus importants pour le résultat esthétique final que la teinte en elle-même. Idéalement, on travaille la macro et la micro-anatomie avec des instruments (avant photopolymérisation) et non avec une fraise.
La meilleure approche n'est pas de savoir avec quel matériau on reconstitue les dents, mais de chercher à les préserver.
8 Le polissage au bicarbonate de sodium est abrasif pour le composite (il altère son état de surface en augmentant sa rugosité). Il faut privilégier la glycine.
9 Ottoboni TDO, Falacho RI. The importance of diagnostic wax-up to make predictable composite resin. www.smilecloud.com.
10 Manauta J, Salat A, Putignano A, Devoto W, Paolone G, Hardan LS. Stratification in anterior teeth using one dentine shade and a predefined thickness of enamel: a new concept in composite layering–Part II. Odontostomatol Trop 2014;37:5-13.
Romain Cheron obtient son diplôme de chirurgien-dentiste à Paris en 2003, sa thèse de doctorat en 2004, puis un Master 2 de recherche en biomatériaux en 2005. Ancien assistant de biomatériaux et de prothèses à l'université de Paris V, il est actuellement omnipraticien à Genève, et plus spécifiquement en charge des traitements conservateurs et esthétiques.
Il commence sa présentation avec l'image de mosaïque de la gitane de Zeugma (–300 av. J.-C.) et celle d'un carrelage de salle de bain. Depuis bien longtemps, on sait coller de la céramique, mais les joints, eux, ne résistent pas... Par cette métaphore, on comprend que le vrai défi de nos restaurations réside non pas dans l'adhésion, mais en réalité surtout dans la pérennité de la marge.
La marge : c'est par elle que démarrent les colorations, les infiltrations bactériennes ou les décollements. C'est également là que s'initie l'émergence d'un profil anatomique, esthétique et physiologique. Au travers de divers cas cliniques, le Dr Cheron revient sur le matériel, les matériaux, mais également les protocoles qui aident à optimiser la qualité de nos soins conservateurs.
Il ne s'agit ni de l'étape la plus valorisante, ni de la plus technique, mais elle est incontournable pour rendre compatible l'utilisation d'un matériau très hydrophobe (résine composite) dans un environnement hydrophile (le milieu buccal).
Au-delà de la contamination hydrique, la contamination protéique a un impact fort sur l'adhésion et exige de s'isoler de la salive, du sang et de la plaque. Il faut donc isoler pour avoir une bonne visibilité, un confort et une ergonomie opératoire, en utilisant (fig. 11) :
– une digue de qualité sur la dent à soigner et les dents adjacentes ;
– des ligatures, faites avec du fil dentaire ;
– le passage de l'aéropolisseur et éventuellement l'application de dakin (par son action déprotéinisante) pour une décontamination du site opératoire.
Pour distinguer le tissu carié, les enseignements passés nous indiquaient de se fier à la couleur des tissus, au cri dentinaire, et à la sensation d'accroche de nos sondes..., autant d'éléments manquant d'objectivité. Ce temps est révolu. L'utilisation, avec aides optiques, d'un détecteur de carie (Carie Detector®, Kuraray), appliqué dans la cavité puis rincé, révèle de façon objective l'atteinte tissulaire (le collagène dénaturé de la dentine), et permet un protocole systématique de nettoyage d'un bandeau périphérique sain, en laissant éventuellement de la dentine affectée dans les zones les plus profondes (fig. 12).
La fluorescence est également évoquée. Elle s'appuie sur la transformation des rayons UV en rayonnements visibles, par les porphyrines issues du métabolisme bactérien. Mais son utilisation est plus difficile à mettre en œuvre. Elle peut s'utiliser avec une lampe UV (D-light Pro®, GC) ou sur certains microscopes avec une fonction spéciale (microscope Extaro®, Zeiss).
Un bord amélaire fiable est non contaminé (salive, sang, carie...), soutenu et sans becquet. Cet objectif est obtenu par :
– la finition des bords à l'aide d'une fraise bague rouge ;
– l'utilisation éventuelle d'inserts soniques ou ultrasoniques, avec une seule face travaillante pour ne pas endommager la face de la dent adjacente pour les cavités proximales ;
– un sablage (Alumine 27 μm).
Un échec dans la réalisation de l'anatomie proximale peut par exemple correspondre à un relief concave, responsable de tassements alimentaires, de la perte de santé parodontale et d'un risque accru de fracture de la crête marginale. Il faut choisir avec soin le type de coin et d'anneau pour séparer les dents et adapter au mieux la matrice (fig. 14 et 15).
Il en existe deux types :
– pleins, denses (coins bois Kerr® par exemple) : il écarte les dents, avec un risque d'altérer la face proximale s'il est trop enfoncé... ;
– creux, mous (coins plastiques Palodent® Plus...) : sans capacité d'écartement, mais intéressants pour l'adaptation cervicale dans certaines situations, grâce à leur forme galbée.
Ce choix est très important, car mal choisi ou mal positionné, l'anneau peut déplacer le coin et être responsable d'un défaut d'adaptation de la restauration. En outre, son placement influe sur le pouvoir d'écartement de la dent collatérale. Il n'y a pas de choix universel, il faut s'adapter à la situation clinique et au coin choisi :
– simple : indiqué quand le galbe proximal est facile à gérer, il s'applique entre la matrice et le coin, ou parfois derrière le coin ;
– bifide : il écarte les dents, sans toucher le coin.
Le teflon peut être appliqué pour optimiser le plaquage de la matrice contre de la dent, aussi bien en cervical qu'en coronaire. Une bonne adaptation de la matrice, c'est autant de temps gagné sur les étapes de polissage.
On peut se simplifier la tâche en séparant les étapes. On choisit de monter un mur proximal de composite, transformant ainsi précocement notre cavité occluso-proximale en cavité occlusale, qui ne nécessite plus d'anneau, de coin... On se débarrasse de l'encombrement instrumental mis en place (fig. 16 à 18).
La stratification permet en outre de gérer le stress du composite qui se rétracte, et donc de diminuer la tension au niveau du joint. Le Dr Cheron applique une première couche très fine de composite flow (moins d'1 mm) avant le montage, au composite de restauration, du mur proximal. L'utilisation d'instruments fins, tels qu'un porte Dycal® et une microbrush fine, permet une plus grande précision d'application.
Pour les masses dentinaires, le premier apport est oblique en lingual par exemple, le deuxième en vestibulaire. La dernière couche occlusale est une couche email qui est sculptée mimétiquement avec une sonde fine (CompoSculp® de Hu-Friedy, ou LM-Arte® de Style italiano).
On applique éventuellement un colorant dans les sillons. Une sculpture bien réalisée et en adéquation avec l'anatomie adjacente facilite les étapes de polissage et de réglages de l'occlusion.
Le conférencier nous présente sa technique DirOc' pour un réglage de l'occlusion sous digue en 3 minutes. Il réalise un mordu avec un silicone d'occlusion sur la dent restaurée, donnant l'empreinte de la dent antagoniste en situation d'intercuspidie maximale. Il applique alors une résine Bis Acryl (Protemp®, Luxatemp®...) sur le silicone et sur les dents collatérales. La clé obtenue peut être placée en bouche sous digue et guide ainsi le modelage de la face occlusale. Cette technique peut être particulièrement utile dans les cas d'érosion (fig. 19).
• En lingual ou palatin et en vestibulaire, les excès vestibulaires de petites quantités (grâce à l'application consciencieuse de la matrice, du coin et de l'anneau) sont faciles à polir à l'aide de disques abrasifs (Sof-Lex/Pop-On®, 3M ESPE).
• Au niveau de la limite cervicale : passage sous le point de contact avec un strip plastique fin (3M ESPE).
Un strip métallique (GC), plus abrasif, peut être utile si un surcontour plus important doit être géré.
• Polissage final :
– point silicone (Brownie Mini-points® Shofu rouge, puis vert) sans eau sur contre-angle bague rouge à vitesse lente suivi d'aéropolissage ;
– dépose du champ opératoire, réglage de l'occlusion sans digue et polissage final (Occlubrush®, de Kerr Dental, ou Brushine®, de Coltene), sans eau et à faible vitesse (4 à 5000 tours/min).
Le Dr Cheron montre ainsi la systématique de son protocole et les similitudes retrouvées en antérieur ou en postérieur, en direct ou en indirect. Il est proposé en vidéo par le site French Tooth.