Enquête
Pour ce congrès ADF 2019 placé sous le thème de l'innovation et du rassemblement, le président du conseil scientifique, Marwan Daas, s'est attaché à monter à travers 110 séances un programme transversal et pluridisciplinaire « qui réponde aux demandes quotidiennes des confrères ».
Clinic lève le voile sur 5 séances.
Adrien RenaudAbsorbés par la...
Pour ce congrès ADF 2019 placé sous le thème de l'innovation et du rassemblement, le président du conseil scientifique, Marwan Daas, s'est attaché à monter à travers 110 séances un programme transversal et pluridisciplinaire « qui réponde aux demandes quotidiennes des confrères ».
Clinic lève le voile sur 5 séances.
Adrien RenaudAbsorbés par la masse des contraintes qui s'imposent à eux, les chirurgiens-dentistes ont de moins en moins de temps à accorder à la relation praticien-patient. Or, cette dernière est à la fois la clé d'une prise en charge réussie et d'une vie professionnelle épanouie.
Un sur trois. C'est, d'après une enquête du Conseil national de l'Ordre des chirurgiens-dentistes publiée l'année dernière, la proportion des praticiens qui se déclarent en burnout. Il existe pourtant des outils pour que « cabinet dentaire » ne rime pas avec « enfer sur terre », et le premier d'entre eux passe par une relation de qualité avec les patients. Le problème, c'est que l'alliance thérapeutique tombe rarement du ciel, elle se travaille. Le Groupement des sociétés scientifiques odonto-stomatologiques (GSSOS) présentera certaines techniques permettant de la favoriser lors de sa séance du prochain congrès de l'ADF.
« La pratique de la chirurgie dentaire est de plus en plus stressante », explique le Dr Michel Pompignoli, ancien président de l'Académie nationale de chirurgie dentaire et secrétaire général du GSSOS, qui coordonnera cette session. « Des contraintes réglementaires, politiques ou encore techniques mettent le praticien dans une situation affaiblissante pour soigner en bonne tranquillité. » À cela s'ajoute une « image négative de la profession transmise par les médias généralistes », qui complique la relation avec le patient. D'où la nécessité, selon ses mots, de proposer aux professionnels des outils leur permettant de « se préparer au mieux pour être dans de bonnes conditions ».
Et les chirurgiens-dentistes peuvent à ce propos trouver une aide précieuse en dehors de leur propre discipline. On peut notamment citer la psychologie. « L'échange avec le patient permet d'apporter des soins plus efficaces », avance Michel Pompignoli. Certaines techniques peuvent notamment améliorer la motivation du patient pour certains soins difficiles ; elles peuvent également être utiles pour améliorer l'hygiène. De manière plus originale, le praticien peut également puiser dans des techniques liées à l'hypnose. « Il ne s'agit pas forcément de pratiquer une séance d'hypnose avant les soins, même si cela peut être utile », explique Michel Pompignoli, « mais la connaissance de l'hypnose peut globalement aider le couple patient-praticien. »
Il s'agit donc bien d'acquérir de nouvelles compétences, ce qui suppose d'avoir le temps matériel de se former. Dans un contexte où la plupart des praticiens se plaignent d'être débordés, cela peut révéler de la gageure. Mais, assure Michel Pompignoli, « c'est une question de priorités : ceux qui veulent vraiment se former trouveront le temps de le faire ». Et l'ancien président de l'Académie nationale de chirurgie dentaire de préciser qu'on estime que seulement 36 % des praticiens sont inscrits à des formations dans le cadre du Développement professionnel continu (DPC), pourtant théoriquement obligatoire. Mais il estime que le DPC pourrait justement être un outil pour introduire les formations permettant d'améliorer la relation praticien-patient. « Il s'agit de concevoir un traitement plus axé sur la relation humaine et moins sur la technique », résume-t-il. « Car, quand on parle du bien-être du praticien, c'est au final le patient qui en bénéficie. »
Séance B23
Bien-être du patient, sérénité du praticien. Le 27/11/2019 de 9 h à 10 h 30.
La plupart des erreurs médicales trouvent leurs causes non dans un défaut technique mais dans une erreur humaine. Cette réalité a depuis longtemps été intégrée dans l'aéronautique, qui a modifié ses pratiques en conséquence. De son côté, le secteur dentaire peine encore à s'adapter.
Qu'y a-t-il de commun entre un cabinet dentaire et un cockpit d'avion ? La haute technologie ? Le haut niveau de formation de leurs occupants ? Non. Ce qui unit ces deux lieux en apparence si différents, c'est que les professionnels qui y travaillent sont... des humains. Et qui dit « humain » dit « erreur ». Or, si le secteur aéronautique a depuis longtemps intégré la notion de facteur humain et le risque qui en découle dans ses pratiques, ce n'est pas le cas du secteur dentaire. Le Dr Franck Renouard coordonnera justement une session sur les progrès que peuvent effectuer les chirurgiens-dentistes en la matière.
« C'est un sujet dont on parle très peu, alors qu'il est la base du succès des pratiques », assure cet ancien président de l'Association européenne d'implantologie (EAO). Ce dernier tire sa conviction de son parcours personnel. Après avoir été « très impliqué dans la technique » pendant une grande partie de sa carrière, il dit avoir « changé de focus après une expérience personnelle en aviation ».
Car Franck Renouard est aussi pilote. Il y a une dizaine d'années, aux commandes d'un hélicoptère de fabrication russe qu'il venait d'acheter avec des amis, il a eu un accident qui aurait pu être mortel pour lui et d'autres personnes alentour. « Il y a eu une enquête, et la première réaction a été de dire que c'était le matériel qui était en cause », se souvient-t-il. « En fait, c'est moi qui avais fait l'erreur, sous le coup du stress. »
Et le chirurgien-dentiste volant l'assure : des erreurs commises sous le coup du stress, il en arrive tous les jours dans les cabinets dentaires. Mais, contrairement à ce qui se passe dans l'aviation, « les gens mettent cela sur le compte de la fatalité ». Il y a cependant, d'après Franck Renouard, « une dizaine d'actions qui peuvent être facilement mises en œuvre » afin de diminuer significativement la probabilité qu'une erreur survienne.
« L'une des choses les plus simples à mettre en place est l'utilisation de check-lists », avance le praticien qui assure que 80 à 90 % des praticiens qui posent un implant n'ont pas fait de check-list qui leur permettrait de vérifier chaque étape. Autre exemple : ce qu'on appelle en aviation le cockpit stérile. « Durant les phases critiques, personne ne parle, il ne doit pas y avoir d'interruption de tâche », détaille Franck Renouard. « L'idée est de créer une culture de la sécurité dans les cabinets dentaires, afin que cela devienne un point de management. »
Compte tenu de l'importance du facteur humain dans la pratique dentaire, Franck Renouard regrette qu'il n'occupe pas une place plus importante dans la formation des praticiens. Et ce d'autant plus qu'il s'agit, d'après lui, d'un sujet qui intéresse les futurs praticiens. « Quand je fais un cours sur le sujet à la faculté, ils sont passionnés », assure le pilote. « Le problème, c'est que quand ils sortent, ils sont seuls : pas de réels protocoles, pas de procédures institutionnalisées... ». Tout un édifice à bâtir !
Séance B42
Amélioration de la pratique par les facteurs humains : des cockpits d'avions aux cabinets dentaires. Le 27/11/2019 de 16 h à 17 h.
Avec l'ADN et les empreintes digitales, les dents sont l'un des moyens les plus efficaces pour identifier un corps. D'où l'importance de l'odontologie médico-légale. Mais, contrairement à ce que l'on pourrait penser, les dentistes légistes ne sont pas les seuls à pouvoir aider les enquêteurs.
« Redonner une identité à un corps. » Voilà ce qui motive le Dr Gwenola Drogou dans son activité d'odontologie médico-légale. Installée à Ploemeur, dans le Morbihan, cette praticienne est aussi secrétaire générale de l'Association française d'identification odontologique (AFIO) et elle coordonnera une séance sur l'implication du monde dentaire dans les avis de recherche lancés par les autorités judiciaires.
Il faut dire que les chiffres sont marquants. « 40 000 personnes sont portées disparues en France chaque année, et 10 000 restent non identifiées », rappelle Gwenola Drogou qui ajoute que 1 000 personnes sont enterrées sous X tous les ans. « Ce qu'il faut savoir, c'est que les chirurgiens-dentistes peuvent participer aux recherches », affirme la Bretonne.
L'implication du dentiste en la matière intervient d'ailleurs bien avant la disparition de la personne recherchée : son rôle est notamment crucial dans le cadre de « la collecte des données ante-mortem », pour utiliser le jargon des légistes. En clair, lorsqu'on veut identifier un corps, on a des données prélevées sur le cadavre que l'on cherche à comparer à d'autres données existantes. Tout l'enjeu consiste à obtenir les « autres données » en question. Et s'ils sont bien tenus, les systèmes informatiques des cabinets dentaires regorgent en la matière de trésors pour les enquêteurs.
« D'où l'importance de garder ses fichiers », explique Gwenola Drogou. « Souvent, les dentistes disent qu'ils ont bien une panoramique, mais qu'elle est ancienne. Or, même une radio vieille de 20 ans peut être utile ! » Autre conseil : remplir correctement l'odontogramme. « Ce n'est pas rémunéré, donc c'est rarement fait, mais cela peut être très utile », explique la praticienne qui ajoute que le remplissage de l'odontogramme pourrait être au menu des prochains changements du code de déontologie.
D'après Gwenola Drogou, les chirurgiens-dentistes ne méconnaissent pas forcément l'importance de la collecte des données ante-mortem, mais « ils n'ont pas le temps ». Elle constate d'ailleurs que, « quand on les contacte pour avoir des données, ils sont généralement ravis de participer à l'identification ».
Elle remarque notamment que la mise en place du dispositif « d'alerte identification » (un avis transmis par mail aux praticiens par le Conseil de l'Ordre pour retrouver le praticien traitant des personnes disparues) est un succès. « C'est une procédure qui a été mise en place en 2016 », rappelle Gwenola Drogou, « elle a été utilisée cinq ou six fois et, à chaque fois, on a retrouvé le praticien. »
Reste que les chirurgiens-dentistes ne sont pas les seuls à devoir faire des efforts pour faire progresser l'efficacité de l'identification des corps. En effet, malgré la loi Loppsi 2 de 2011 qui impose, dans chaque Institut médico-légal, un relevé dentaire avant une inhumation sous X ou une incinération, « on constate un manque d'uniformisation », regrette Gwenola Drogou. Chacun doit donc faire des efforts : l'odontologie médico-légale est un sport d'équipe !
Séance B39
Comment agir ensemble pour rendre les avis de recherche plus efficients ? Le 27/11/2019 de 14 h à 15 h 30.
Les troubles du sommeil touchent environ un tiers de la population : il s'agit d'un problème de santé publique auquel les chirurgiens-dentistes peuvent d'autant moins rester indifférents que certaines pathologies dentaires y sont liées.
« Je dors peu mais j'ai toujours peu dormi, donc ça me coûte très peu », confiait Emmanuel Macron sur France 2 en décembre 2017. Une phrase qui a beaucoup été reprochée au président de la République, accusé de propager une culture qui considère le temps passé à dormir comme du temps perdu. Les chirurgiens-dentistes participent-ils aussi de ce coupable préjugé ? De moins en moins, veut croire le Dr Maria Clotilde Carra qui coordonnera une session sur la médecine dentaire du sommeil.
Le Dr Carra note tout d'abord une forme de prise de conscience dans la population générale. « Il y a eu des campagnes de sensibilisation, et les troubles du sommeil sont de plus en plus connus, y compris par les patients », constate-t-elle, notant toutefois qu'ils restent sous-diagnostiqués.
Elle remarque par ailleurs que les troubles du sommeil font indirectement partie de la pratique quotidienne de bien des chirurgiens-dentistes. « Les dentistes connaissent bien le bruxisme du sommeil, qui peut se traduire par une importante usure dentaire », avance-t-elle. Ils sont également impliqués dans le traitement de l'apnée du sommeil, notamment avec la pose d'orthèses d'avancée mandibulaire.
Mais, au vu des enjeux de santé publique, les liens complexes entre troubles du sommeil et pathologies dentaires mériteraient tout de même, selon Maria Clotilde Carra, d'être mieux connus. On constate en effet que la sphère bucco-dentaire entretient avec le royaume de Morphée une relation à double sens.
Si certaines douleurs orofaciales peuvent perturber le sommeil, on note également que les patients qui souffrent de troubles du sommeil sont plus à risque d'avoir des problèmes au niveau parodontal. « Certaines conditions anatomiques, comme les micrognathies ou les macroglossies, peuvent également prédisposer l'individu aux troubles du sommeil », constate par surcroît Maria Clotilde Carra.
C'est pourquoi elle en appelle à une structuration des connaissances sur le sujet. « Pour l'instant, les formations en médecine dentaire du sommeil sont principalement faites dans le cadre de la formation continue », constate-t-elle. « Le temps qui y est consacré dans le cadre des cours de deuxième cycle est trop faible, et il est variable en fonction des différentes facultés. »
Or, selon Maria Clotilde Carra, il est essentiel que les médecins qui posent le diagnostic de trouble du sommeil trouvent un dentiste compétent et formé sur le sujet à qui adresser leur patient. Elle estime que, si les techniques qu'implique la médecine dentaire du sommeil ne sont pas très complexes, la connaissance de la médecine générale du sommeil est en revanche primordiale. « Il s'agit souvent de pathologies qui nécessitent un suivi à long terme, et les dentistes doivent donc être capables de conseiller le patient et de dialoguer avec son médecin », juge-t-elle. L'appel pour davantage de formation est lancé.
Séance A12
Médecine dentaire du sommeil : une autre compétence du chirurgien-dentiste. Le 26/11/2019 de 16 h à 17 h.
Quand le conflit éclate entre deux confrères, les solutions apparaissent rarement. Et pourtant, même si la voie de conciliation ordinale obligatoire ne fonctionne pas, « d'autres chemins sont toujours possibles », assure Marc Sabek, chirurgien-dentiste et docteur en droit. Il existe des modes alternatifs de règlement des conflits (MARC) comme la conciliation, l'arbitrage ou encore la voie conventionnelle. « Nous voulons montrer aux confrères qu'à partir du moment où ils ont accepté de composer, il existe toujours des modes alternatifs moins chers, plus rapides et moins destructeurs que de porter l'affaire en justice. » ACD
Séance C58, Confrères en conflit... trouver la sortie. Le 28/11/2019 de 11 h à 12 h.