JURIDIQUE
Avocat au barreau
de Paris
Si les chirurgiens-dentistes comprennent que leur exercice peut parfois conduire à voir leur responsabilité civile ou disciplinaire engagée, il en est différemment de la responsabilité pénale. Une question légitime se pose donc : quelles sont les situations dans lesquelles je cours un risque pénal ? La plupart des actes de soins expose le praticien à une responsabilité pénale, dans la mesure où il intervient sur l’être humain dans son intégrité physique ou encore dans sa dignité. Mais rassurons-nous, la responsabilité sera engagée à la réunion de 3 éléments : une faute pénale, un dommage et un lien de causalité entre les deux.
En droit pénal, la responsabilité ne peut être engagée qu’en cas de faute. Il en existe de 3 sortes : les fautes par commission (acte positif : par exemple, arracher une dent saine), les fautes par omission (abstention, négligence, inattention : par exemple, non-réalisation d’un test allergène avant la pose d’un implant), les fautes par manquement ou violation d’une obligation de prudence ou de sécurité définie par la loi (par exemple, non-respect des règles de stérilisation). La responsabilité pénale du praticien pourra être engagée soit lorsqu’il est directement auteur du dommage, soit lorsqu’il a créé la situation dans laquelle le dommage s’est réalisé, en méconnaissant volontairement des règles de prudence. Dans le premier cas (la faute est directement la cause du dommage), le juge recherchera une faute simple. Dans le second cas (la faute est indirectement la cause du dommage), la faute doit être particulièrement grave. Il appartient au juge d’apprécier s’il y a faute, au regard aux données acquises de la science, et quel est le degré de gravité de la faute.
Le dommage pénal ne peut procéder que d’un préjudice corporel, certain et actuel. Ainsi, il faut qu’il y ait décès ou dommage corporel. Dès lors, si le juge pénal identifie une faute mais que le préjudice n’est qu’une perte de chance de survie par exemple ou la perte de chance de se soustraire au dommage corporel subi, la responsabilité pénale ne peut pas être engagée.
Il s’agit de la dernière démonstration à établir, à savoir la relation de cause à effet entre le comportement fautif et le dommage. Le lien de causalité doit être certain. C’est sur ce terrain que de nombreuses relaxes sont prononcées. Alors même que l’acte médical est qualifié de fautif et qu’une atteinte corporelle ou un décès sont bien identifiés, il très difficile d’affirmer avec certitude que, sans le comportement fautif, le dommage invoqué aurait été évité. Attention de ne pas confondre le caractère certain du dommage et le caractère direct qui, lui, influe sur l’appréciation du degré de faute.
Des développements précédents, on pourrait comprendre que l’absence d’intention (« je ne l’ai pas fait volontairement ») fait obstacle à l’engagement de la responsabilité pénale… Dans ce cas, la faute est appréciée au regard de la maladresse, de l’imprudence, de l’inattention ou encore de la négligence. Cela peut être le cas si, averti de la dégradation de l’état de santé d’un patient, vous faites une prescription par téléphone ou si vous ne prenez pas avec sérieux les doléances du patient. Bien sûr, il faudra démontrer que votre négligence est la cause certaine du dommage.
Tout acte médical est susceptible d’entraîner la responsabilité pénale du praticien. Cependant, en pratique, le juge devra s’assurer d’abord qu’il y a faute pénale (savoir si vous avez agi dans les règles de l’art) et, si faute il y a, qu’elle est à l’origine certaine du dommage, que ce soit directement ou indirectement. Ainsi, l’engagement de la responsabilité pénale est particulièrement délicat car strictement encadré.