Clinic n° 11 du 01/11/2018

 

DE BOUCHE À OREILLE

Frédéric BESSE  

frbesse@hotmail.fr

Depuis quelques années, nous pouvons constater un engouement particulier pour l’approche globale en médecine dentaire. Cette méthode, qui peut paraître complexe, est particulièrement recommandée par les gourous de la profession (les confrères sérieux voudront bien me pardonner ces propos s’ils leur paraissent excessifs) et adoptée par les chirurgiens-dentistes qui ne mesurent leur valeur qu’à la hauteur de leur chiffre d’affaires. Elle est le graal de certains jeunes...


Depuis quelques années, nous pouvons constater un engouement particulier pour l’approche globale en médecine dentaire. Cette méthode, qui peut paraître complexe, est particulièrement recommandée par les gourous de la profession (les confrères sérieux voudront bien me pardonner ces propos s’ils leur paraissent excessifs) et adoptée par les chirurgiens-dentistes qui ne mesurent leur valeur qu’à la hauteur de leur chiffre d’affaires. Elle est le graal de certains jeunes confrères et le leitmotiv des centres low cost, lesquels ne voient dans les patients que de potentiels payeurs.

Tous ceux qui veulent faire de l’argent, les bonimenteurs du ratelier, les fourgueurs d’implants, les découpeurs de gencive, les facetteurs de dents saines, l’ont intégrée dans leur pratique.

La technique est simple : proposer des devis élevés avec les inévitables implants dans tous les coins, et ne soigner que la fraction des patients qui accepte de se faire refaire la totalité de la bouche. Le bénéfice peut être considérable, mais il faut systématiquement surtraiter…

Or, l’approche globale, ce n’est pas du tout cela.

L’approche globale, c’est examiner la totalité de la bouche et des zones adjacentes et évaluer la valeur des quatre piliers de la dentisterie :

- Le patient souffre-t-il de problèmes graves, infectieux ou tumoraux ?

- Le patient souffre-t-il de problèmes parodontaux ?

- Le patient est-il porteur de traitements endodontiques insuffisants et si oui, cela entraîne-t-il des problèmes plus graves ?

- Le patient souffre-t-il de problèmes d’occlusion ?

Il convient ensuite d’évaluer la gravité de chaque problème, en essayant de ne pas oublier les banales caries, ainsi que les solutions à y apporter en gardant à l’esprit le principe de base de toute thérapeutique : primum, non nocere, puis de choisir le type d’intervention… ou d’abstention. Une approche globale peut très bien se terminer par un simple détartrage car tous les éléments présents dans la bouche du patient, après réflexion, sont fonctionnels et inoffensifs bien qu’imparfaits.

Une fois cela fait, il sera possible de parler d’esthétique avec le patient.

Et l’on peut faire du travail formidable, rendre la santé, le sourire et le moral à des patients modestes à l’aide de couronnes acier et de stellites bien conçus. Et bien gagner sa vie. Une dentisterie orientée uniquement sur le profit (même si c’est agréable d’en faire) conduirait (conduit) notre profession dans une impasse. Sans compter qu’une telle attitude serait inévitablement sanctionnée par les pouvoirs publics. L’obsession pour la chirurgie, les implants et l’esthétique haut de gamme pourrait bien, aujourd’hui, nous conduire à délaisser une partie importante de nos concitoyens et entraîner un nouveau rejet de notre profession.