DE BOUCHE À OREILLE
Comme je le craignais, nos syndicats, coincés entre les demandes souvent irréalistes des confrères et les conséquences fantasmées d’un arbitrage, ont signé une convention qui ampute encore un peu plus notre liberté de prescription, réduisant encore l’acception de libérale accolée à notre profession. Désormais, la CPAM et les assureurs complémentaires disposent de tous les outils pour nous contrôler et orienter nos soins à leur convenance.
Quant à cette convention,...
Comme je le craignais, nos syndicats, coincés entre les demandes souvent irréalistes des confrères et les conséquences fantasmées d’un arbitrage, ont signé une convention qui ampute encore un peu plus notre liberté de prescription, réduisant encore l’acception de libérale accolée à notre profession. Désormais, la CPAM et les assureurs complémentaires disposent de tous les outils pour nous contrôler et orienter nos soins à leur convenance.
Quant à cette convention, qui devait mettre l’accent sur la prévention, force est de constater qu’il s’agit surtout d’une complexification de la précédente. On fait dans le détail, on décortique chaque acte, on aura droit désormais à un code par type de couronne (et bientôt un modificateur par type de ciment ?) mais au fond rien n’évolue et ceux d’entre nous qui vivront le mieux resteront ceux qui réparent le plus les dents.
Les patients ne seront pas mieux soignés car rien n’est fait pour encourager une médecine dentaire préventive. Pire, rien n’est fait pour augmenter la prise en charge, et donc la prise de conscience par le grand public, des soins de parodontologie.
La prévention, cheval de bataille de la ministre de la Santé, est oubliée, mais il est vrai qu’elle est indissociable de la création d’un corps d’hygiéniste, option refusée par la CNSD. Elle reste cependant indissociable de l’avenir de la médecine dentaire, d’autant plus que notre spécialité est la seule pour laquelle la prévention fonctionne à 100 %.
Néanmoins, si tout le monde sait reconnaître une douleur dentaire, peu de gens ont conscience de l’importance des problèmes parodontaux, alors que toutes les dernières recherches prouvent que l’impact sur la santé générale de ces problèmes est infiniment pire que celui des problèmes dentaires (hors destruction massive et infectée). À tel point que l’on vit en bien meilleure santé sans dents qu’avec une parodontite active et généralisée.
Et dans une population éduquée et informée qui prend soin de ses dents, les problèmes parodontaux deviennent la cause majeure de perte des dents.
Or, les soins de parodontologie peuvent se découper en deux grandes orientations : les soins des maladies parodontales et la chirurgie mucogingivale. Si cette dernière est difficile, demande des connaissances approfondies, une formation complémentaire importante et peut être considérée comme de la chirurgie esthétique, il est très facile de soigner les maladies parodontales avec peu de moyens et quelques connaissances basiques. Mais cela demande du temps et la rémunération de notre temps de fauteuil est justement la base de notre revenu. Ce surcoût a sans doute effrayé les rédacteurs du texte… À moins qu’ils n’aient tout simplement omis cet aspect du problème par ignorance. Plus rien ne m’étonne !
Cette convention, qui devait être révolutionnaire et recadrer la dentisterie en France, est passée complètement à côté de son objectif, qui devait être de mieux soigner les Français. Nous continuerons donc à insister auprès de nos patients sur l’importance qu’il y a à soigner ses gencives (et à payer pour cela), même s’il faut soutenir les regards des patients persuadés que l’on cherche à leur vendre du vent.