L’augmentation prévisible de la demande de prothèses profitera-t-elle à la filière française ? Les fabricants français craignent que la nouvelle convention accentue le flux d’importation de prothèses à bas coûts. L’UNPPD et la FPAD s’accordent sur ce point, mais pas sur les solutions à apporter.
La convention va « générer une course à la rentabilité des cabinets dentaires. Le premier poste impacté sera celui de la qualité de la prothèse », prévient Lionel Marsien, président de la FPAD (Fédération des prothésistes artisans du dentaire). Et la progression de la prothèse d’importation à bas prix va s’accentuer. « La profession est déjà en crise », rappelle, chiffres en main, ce responsable syndical. Depuis 10 ans, la moitié des 7 000 laboratoires a fermé. Car les importations de prothèses ont pris progressivement plus de 20 % du marché français.
La convention « évite le pire », c’est-à-dire le règlement arbitral. Mais le président de la FPAD craint que le panier libre ne souffre aussi de ce mouvement vers une prothèse à bas coût de main d’œuvre : « Le praticien pourra faire une céramo-céramique à Madagascar et la vendre dans le panier libre en la faisant passer pour un produit de luxe. » Le fait que les deux tiers des praticiens pratiquent des honoraires inférieurs aux plafonds de la convention ne le rassure pas non plus : « Il y a une panique psychologique dans la profession. Les praticiens méconnaissent totalement le texte conventionnel », explique-t-il.
Les prothésistes estiment ne pas avoir les moyens de défendre la qualité de la prothèse française à cause de « nombreux manquements dans l’information » du patient. « La déclaration de conformité n’est pas respectée », constate Laurent Munerot, président de l’UNPPD (Union nationale patronale des prothésistes dentaires). À la FPAD, on observe aussi le flou de la liste des fournisseurs de dispositifs médicaux déposée légalement à l’ANSM. Cette liste ne distingue pas les fabricants français, des mandataires et des importateurs. « On ne sait pas qui fait quoi. Et même une prothèse importée peut être française », regrette Lionel Marsien.
Si l’UNPPD et le la FPAD s’accordent sur les risques pour la qualité des prothèses, leur point de vue diffèrent sur la façon de promouvoir la prothèse française. À l’UNPPD, on défend la dissociation de l’acte, « seule solution équitable et transparente pour que le patient puisse avoir accès à une prothèse de qualité au juste prix. »
La FPAD refuse ce parti pris et veut explorer avec les chirurgiens-dentistes d’autres pistes. Ce syndicat créé il y a 18 mois se bat pour faire reconnaître une production artisanale française : « J’aimerais que l’on remette le patient au cœur du choix de la qualité », explique Lionel Marsien. « On peut, par notre recul, valoriser l’ensemble de la filière. Contrairement aux praticiens, nous avons le droit de faire de la publicité, de promouvoir nos produits et de mettre en avant leurs qualités. Nous pouvons aussi parler de joints de couronnes pas adaptés ou de couronnes qui vont être iatrogènes… Nous pourrions être en support publicitaire dans les cabinets et apporter une valorisation du travail des praticiens. »