Clinic n° 05 du 01/05/2018

 

JURIDIQUE

Le législateur a entièrement refondu le droit applicable aux centres de santé en vue d’éviter tout nouvel écueil « Dentexia ». Cependant, les centres dentaires n’étant pas soumis au Code de déontologie, il est à craindre que certaines pratiques, jugées déloyales par les chirurgiens-dentistes, se poursuivent. Tel est notamment le cas de la publicité comparative. Dans quel cadre doit-elle s’inscrire ? Un arrêt du 22 mars 2016 de la Cour d’appel de Montpellier nous en dit plus.

Les faits

Le conseil départemental de l’Ordre reprochait à une association de centres de soins dentaires, Dentalvie, de recourir à des procédés de publicité prohibés : diffusion sur son site internet d’un article de presse locale et d’un reportage télévisé national, diffusion sur le site internet des Pages Jaunes de la mention « Le centre dentaire Dentalvie a pour vocation de mettre la santé bucco-dentaire à la portée de tous en pratiquant des prix deux fois inférieurs à ceux couramment pratiqués ». Sur ce dernier point, elle communiquait également sur son site internet, prétendant de manière mensongère pratiquer des tarifs deux fois inférieurs à ceux couramment constatés (publicité comparative par les tarifs concurrents fausse et déloyale). L’Ordre a donc demandé la condamnation de Dentalvie, d’une part, à retirer toutes les mentions susvisées pour atteinte au Code de déontologie et, d’autre part, à lui verser des dommages et intérêts pour concurrence déloyale.

La qualification juridique des faits

Le juge distingue deux types d’actes. Concernant la diffusion sur le site internet d’un article de presse locale et d’un reportage télévisé, il ne condamne pas l’association. Il estime qu’il s’agit de publicité informative non prohibée, en ce qu’elle informe les patients sur les modalités de prise en charge et les soins pratiqués. Il va même plus loin en considérant que ces reportages sont justifiés compte tenu du contexte de « mobilisation de la profession contre les centres de soins dentaires à bas prix, il ne saurait être reproché utilement au centre Dentalvie de fournir à des journalistes des informations sur le concept de soins mis en œuvre dans son établissement et sur les pratiques justifiant les tarifs appliqués ».

En revanche, les juges sanctionnent l’association pour les actes de publicité comparative. Ils rappellent que la publicité comparative n’est autorisée qu’en ce qu’elle est objective. En d’autres termes, on ne peut comparer que le même type de soins, répondant aux mêmes exigences de qualité (par exemple, origine de la prothèse, matériel utilisé…). Ainsi, « en prétendant que les prix moyens pratiqués dans le département des Pyrénées-Orientales au titre d’un implant et d’une couronne s’élèvent respectivement à 2 500 € et 650 € et en les comparant à ceux du centre de soins », l’association n’apporte pas d’éléments objectifs permettant de confirmer cette comparaison. En outre, l’Ordre a démontré le coût moyen pratiqué par les chirurgiens-dentistes de la région, justifiant le caractère erroné de la publicité. Dès lors, une publicité comparative ne sera admise que si elle repose sur des critères objectifs vérifiables et pertinents. À défaut, il s’agit « d’informations à visée publicitaire basées sur des comparaisons de prix non fiables, de nature à attirer la patientèle vers le centre de soins au détriment des chirurgiens-dentistes n’exerçant pas dans ce type de structure », ce qui constitue un acte de concurrence déloyale. La responsabilité de l’association a ainsi été retenue.

À RETENIR

Faute d’une réglementation propre en matière de publicité applicable aux centres dentaires, une différence de traitement persistera avec l’exercice libéral. Seule limite : le droit commun qui interdit la comparaison non objective de deux pratiques. Un bon moyen pour les libéraux pour mettre l’accent sur la qualité des soins et de leur suivi ou, encore, sur l’origine des matériels utilisés et ainsi se démarquer de centres qui jouent la carte de l’accessibilité tarifaire.