Clinic n° 04 du 01/04/2018

 

DE BOUCHE À OREILLE

Frédéric BESSE  

frbesse@hotmail.fr

Les négociations conventionnelles en cours vont peut-être aboutir. Ou peut-être pas. Toujours est-il que je ne vois pas comment notre profession pourrait passer au travers du rouleau compresseur de réformes du gouvernement actuel. D’une manière ou d’une autre, nous aurons droit, au mieux, à des aménagements (à la baisse) de nos tarifs et, au pire, à un arbitrage tel que décidé par le gouvernement précédent. Bien sûr, afin de faire passer la pilule, quelques tarifs seront...


Les négociations conventionnelles en cours vont peut-être aboutir. Ou peut-être pas. Toujours est-il que je ne vois pas comment notre profession pourrait passer au travers du rouleau compresseur de réformes du gouvernement actuel. D’une manière ou d’une autre, nous aurons droit, au mieux, à des aménagements (à la baisse) de nos tarifs et, au pire, à un arbitrage tel que décidé par le gouvernement précédent. Bien sûr, afin de faire passer la pilule, quelques tarifs seront augmentés et un peu de souplesse sera introduite. Mais il ne faut pas s’attendre à la moindre pitié. Rappelons au passage que l’arbitrage tel que défini dans sa mouture hollandaise était une loi. Ce qui veut dire que, même hors convention, les chirurgiens-dentistes seront tenus d’appliquer les tarifs décidés par l’arbitre !

Examinons les raisons pour lesquelles nous sommes une profession… mésestimée :

– la douleur qui engendre de la peur (« mais ce n’est pas vous que je n’aime pas docteur, c’est votre métier », comme nous l’entendons dix fois par jour) ;

– le coût de nos prestations en général, et le fait que certains de nos soins sont inabordables. Passons sur le fait que cette affirmation est souvent une excuse à la peur, c’est vrai en ce qui concerne les prothèses sophistiquées et les chirurgies parodontales et implantaires. Avec toujours, sous-entendu, ce reproche que nous faisons de l’argent sur le malheur des autres.

Bien sûr, chacun d’entre nous connait les contraintes inhérentes à la gestion d’un cabinet dentaire moderne et conforme aux normes actuelles : coût du plateau technique, prix des prothésistes et des produits, salaires chargés des employés, ce qui nous laisse en moyenne entre 20 et 25 % de ce que nous encaissons. Mais l’immense majorité de nos patients n’entend pas ce discours et la baisse autoritaire de nos tarifs va beaucoup les amuser. Nous allons donc devoir scruter chaque poste et introduire une approche industrielle dans notre méthode de travail. Et revoir à la baisse notre niveau d’exigence technique et clinique, en s’éloignant, sans les renier, des critères universitaires. Il existe heureusement des marges considérables de gains de productivité : grouper les actes et travailler le plus vite possible grâce à une mécanisation poussée et du personnel formé. Déléguer les tâches peu rémunérées à des jeunes collaborateurs. Négocier tous les prix de nos fournisseurs. Oublier cette vieille mentalité coûteuse qui consiste à « faire des frais pour payer moins d’impôts ». En bref, gérer nos entreprises médicales au plus serré.

Seuls ceux qui auront intégré cette manière de faire pourront tirer parti de l’arbitrage à venir. Comme nous ne ferons plus que de la dentisterie aux tarifs imposés, les complémentaires rembourseront mieux, nos patients auront moins de reste à charge et nous pourrons proposer nos plans de traitement sans ce sentiment gênant de vendre des soins. Nous devrions alors retrouver la place honorable qui nous revient dans la société. Jusqu’à ce que, au fil des années, le débat sur la dentisterie se déplace vers un autre sujet… comme, par exemple, la qualité des soins !