Il est interdit aux professionnels de santé de recevoir des avantages en nature ou en espèces d’entreprises de fournitures de matériel médical. On constate pourtant que de nombreuses entreprises proposent des cadeaux en remerciement de commandes. Face à la difficulté d’interpréter la législation en vigueur, la cour d’appel de Paris a, dans un arrêt du 29 mars 2017, rappelé les conditions d’application du dispositif anti-cadeaux.
Afin de fidéliser au mieux sa clientèle, trois sociétés de fournitures de matériel dentaire ont mis en place des systèmes de fidélisation permettant, en échange de points gagnés à chaque commande, de bénéficier d’un catalogue de cadeaux très variés (montre, écran LED, tablette, piscine, etc.) ainsi que d’opérations coup de poing permettant à leurs clients de recevoir de nombreux cadeaux en échange de commandes de lots de produits (voyages, cadeaux de faible montant, hi-fi, sacs à main, bouteilles de vin ou de champagne, etc.).
La loi anti-cadeaux interdit aux entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de Sécurité sociale, de « proposer ou procurer à un chirurgien-dentiste des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte (1) ». D’un autre côté, elle interdit aux professions médicales et aux étudiants de recevoir des avantages directs ou indirects de ces entreprises. Selon la cour d’appel de Paris, tomberont sous le coup de la loi anti-cadeaux les avantages répondant à trois conditions cumulatives : l’avantage ou le bien ne revêt pas une valeur négligeable (> 10 €), la pratique excède le cadre des relations normales de travail, les entreprises incriminées doivent être « considérées comme assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par des régimes obligatoires de Sécurité sociale ».
En l’espèce, la cour d’appel de Paris condamne les pratiques des fournisseurs en ce qu’elles répondent aux trois critères susvisés. En effet, les cadeaux proposés sont particulièrement onéreux (voyage, télévision, iPhone, sac à main de grande marque, etc.). Ensuite, elle constate que ces cadeaux ne sont pas en lien avec l’exercice de la profession en ce qu’ils sont très souvent éloignés de la sphère professionnelle (voyage, piscine, vin, champagne, etc.) et qu’ils sont destinés aux professionnels, à leurs assistants et à leur conjoint. Concernant le dernier critère, la cour d’appel opère une lecture extensive et admet que des produits vendus non remboursés par la Sécurité sociale mais qui participent à un soin qui, lui, est remboursé, entrent dans le champ de la loi. Constatant l’illégalité des dispositifs mis en place par les trois sociétés jugées, la cour d’appel a prononcé des amendes allant de 20 000 à 75 000 euros, ce qui est peu par rapport aux gains obtenus par les entreprises via ces dispositifs.
1. Article L. 4113-6 du Code de la santé publique.
La sanction concernera plus particulièrement les entreprises proposant de tels avantages. Elles sont passibles de 2 ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende, amende dont le montant peut être augmenté de 50 % des dépenses engagées pour la pratique constituant le délit. Toutefois, les professionnels de santé peuvent être sanctionnés disciplinairement par leur Ordre pour avoir accepté de tels cadeaux.