Clinic n° 11 du 01/11/2017

 

Congrès ADF 2017 Notre sélection de conférences

AVANT-PREMIÈRE

Ludovic Pommel  

L’implantologie apporte certes une solution fiable et durable au traitement de l’édentement et occupe désormais une place importante dans la réhabilitation orale. Mais les données acquises en sciences odontologiques et bucco-dentaires ainsi que la demande de plus en plus fréquente des patients pour la conservation de leurs dents bousculent et rééquilibrent à juste titre ces acquis.

Depuis fort longtemps, l’endodontie œuvre dans ce sens en mettant au point des techniques...


L’implantologie apporte certes une solution fiable et durable au traitement de l’édentement et occupe désormais une place importante dans la réhabilitation orale. Mais les données acquises en sciences odontologiques et bucco-dentaires ainsi que la demande de plus en plus fréquente des patients pour la conservation de leurs dents bousculent et rééquilibrent à juste titre ces acquis.

Depuis fort longtemps, l’endodontie œuvre dans ce sens en mettant au point des techniques modernes et en proposant aux praticiens des formations associatives et universitaires performantes fondées sur une technologie de pointe.

C’est l’objectif principal de cette séance de démonstration télévisée en direct sur patient.

Pourquoi la réintervention ?

Le traitement endodontique initial présente un taux de succès qui dépasse les 80 %, toutes pratiques confondues [1] mais c’est un des actes les plus fréquents en pratique clinique et son pronostic [2] dépend en grande partie de la stabilité de la restauration qui le protégera [3]. Ainsi, nous sommes fréquemment confrontés à des situations de pathologies périradiculaires d’origine endodontique pour lesquelles une réintervention est parfaitement indiquée afin de contrôler l’infection et permettre la cicatrisation tissulaire. Cette réintervention peut être envisagée sous deux aspects : la voie coronaire, souvent qualifiée de voie orthograde, et la voie apicale, chirurgicale, qualifiée de voie a retro. En réalité, ces deux voies sont complémentaires [3-5] (fig. 1 à 4).

Dans quelles conditions réintervenir ?

Outre des contre-indications d’ordre général et identifiées, comme le risque majeur d’endocardite infectieuse [6], peu de situations interdisent la voie coronaire et elle est souvent la seule option pour des patients sous traitement par bisphosphonate, en particulier par voie parentérale, ou traités par dénosumab (jusqu’à 6 mois après l’arrêt). En effet, la voie chirurgicale s’expose à un plus grand nombre de contre-indications que la voie coronaire, tout comme les techniques implantaires qui, en plus des bisphosphonates, sont contre-indiquées chez les patients immunodéprimés au même titre que des actes de chirurgie conservatrice.

Il existe des contre-indications relatives qui vont intéresser le plateau technique et l’aptitude du praticien. En effet, la plupart des actes conservateurs en endodontie recommandent l’usage d’aides visuelles (loupes avec éclairage ou microscope opératoire) et d’une micro-instrumentation adaptée. Cette recommandation fait partie des standards d’accréditation des programmes de spécialité d’endodontie aux États-Unis [7].

Par conséquent, la situation clinique doit être évaluée avec précision afin de définir si le praticien a la capacité de la résoudre favorablement sans résultat délétère ou s’il doit référer afin d’optimiser cet objectif. Concernant la voie coronaire en général et en ordre croissant de difficulté technique, les complications rencontrées sont d’identifier et de perméabiliser les canaux non traités, de déposer les suprastructures coronaires et corono-radiculaires, de franchir et de négocier une butée, de traiter les communications endo-parodontales, de déposer un obstacle canalaire. Bien entendu, ces complications peuvent être associées, rendre le pronostic délicat, voire contre-indiquer la réintervention.

Concernant la voie chirurgicale, elle se limite hélas souvent à une résection et à un curetage de l’os qui supporte l’inflammation. Cette approche est insuffisante et aboutit le plus souvent à une récidive et à une perte osseuse complémentaire qui discrédite l’acte d’endodontie chirurgicale. Résection et curetage ne représentent qu’un aspect de l’acte et le succès de ce dernier repose sur le contrôle de l’infection endodontique en préparant le canal par une cavité a retro (mise en forme), en désinfectant celle-ci (rinçage à la chlorhexidine par exemple) et, enfin, en soignant la qualité de l’obturation apicale, à l’aide d’un biomatériau adéquat, qui est garante de la pérennité du résultat [4] (fig. 5). L’importance des différents temps opératoires et le respect des principes de micro-chirurgie endodontique concernant l’angle de résection, l’usage d’inserts à ultra son spécifiques pour préparer la cavité apicale et des ciments minéraux récents optimisent les résultats cliniques [8, 9]. L’accès convenable à l’apex concerné pour la réalisation de ces trois étapes de l’endodontie moderne est primordial et son défaut peut contre-indiquer l’acte. Cela est évalué le plus souvent sur un cone beam préopératoire. Contrairement à la chirurgie implantaire, cette approche demande une analgésie profonde, durable, dont l’objectif, en dehors du confort du patient, est l’obtention d’un saignement le plus faible possible (hémostase primaire) pour placer l’obturation dans des conditions de siccité optimales (fig. 6). L’usage d’adrénaline dans les solutions anesthésiques (1/100 000) est fortement recommandé et peut aussi représenter une contre-indication relative dans certaines pathologies cardio-vasculaires. Enfin, si la réintervention par voie chirurgicale, réalisée en première intention, permet d’obtenir une cicatrisation rapide, le taux de récidive à moyen terme est plus élevé que son homologue coronaire [5]. Ce constant impose la réintervention chirurgicale comme un acte complémentaire en cas d’échec du retraitement coronaire et justifie la chronologie de cette séance de démonstration télévisée.

Qui sont les intervenants ?

La partie coronaire de la réintervention sera abordée et démontrée par le docteur Wilhem Joseph Pertot et la partie chirurgicale par le docteur François Bronnec. Ces deux experts ont à maintes reprises démontré leur connaissance scientifique, leur aptitude et leur sens clinique. Ils nous guideront et insisteront sur les détails qui réduisent les difficultés et le temps opératoire en conduisant au succès. Ainsi, la dépose, la désobturation, le champ opératoire et les écueils mis en évidence seront abordés et contrôlés avec l’instrumentation adéquate. L’abord chirurgical de l’apex, l’hémostase secondaire (in situ) et le traitement a retro seront décrits et l’instrumentation adéquate sera conseillée, jusqu’aux soins postopératoires.

Frédéric Bukiet et Ludovic Pommel assureront l’animation en commentant les deux interventions et en regroupant les questions sur support numérique afin d’y répondre au mieux en cours et en fin de séance.

Intérêts de la séance ?

L’équipe qui compose la séance souhaite fournir un abord exhaustif de cette étape fondamentale de l’odontologie conservatrice : connaissances, matériel et matériaux, technologie.

En dehors des « tours de main » qui seront nombreux, l’objectif est de fournir aux participants les moyens :

• d’affiner leurs décisions de traitement ;

• d’optimiser leurs actes cliniques à quatre mains ;

• de découvrir des instruments et matériaux nouveaux (silicates de calcium, biocéramiques) ainsi que la meilleure façon de les utiliser.

Bibliographie

  • [1] Touboul V, Germa A, Lasfargues JJ, Bonte E. Outcome of endodontic treatments made by postgraduate students in the dental clinic of Bretonneau hospital. Int J Dent 2014;2014:684979.
  • [2] Fristad I, Molven O, Halse A. Nonsurgically retreated root filled teeth. Radiographic findings after 20-27 years. Int Endod J 2004;37:12-18.
  • [3] Martin D, Machtou P. Retraitement orthograde des échecs endodontiques. In : Simon S, Machtou P, Pertot WJ (eds). Endodontie. Rueil-Malmaison : CdP, 2012.
  • [4] Cochet JY, Khayat B. Endodontie chirurgicale. In : Simon S, Machtou P, Pertot WJ (eds). Endodontie. Rueil-Malmaison : CdP, 2012.
  • [5] Naito T. Surgical or nonsurgical treatment for teeth with existing root filings ? Evid Based Dent. 2010;11 (2):54-5.
  • [6] Association Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé, Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé. Recommandations. Saint-Denis-la-Plaine : AFSSAPS, 2011.
  • [7] Commission on Dental Accreditation. Accreditation standards for advanced specialty education programs in endodontics. Chicago: Commission on Dental Accreditation, 2017. http://www.ada.org/–/media/CODA/Files/endo.pdf?la=en.
  • [8] Setzer FC, Shah SB, Kohli MR, Karabucak B, Kim S. Outcome of endodontic surgery: a meta-analysis of the literature. Part 1: Comparison of traditional root-end surgery and endodontic microsurgery. J Endod 2010;36:1757-1765.
  • [9] Tortorici S, Difalco P, Caradonna L, Tetè S. Traditional endodontic surgery versus modern technique: a 5-year controlled clinical trial. J Craniofac Surg 2014;25:804-807. La réintervention endodontique : voie coronaire et apicale sont souvent complémentaires. Le contrôle de l’hémostase est garant d’une bonne obturation apicale. Oxyde de zinc-eugénol renforcé, silicate de calcium et biocéramiques sont des matériaux de choix pour l’obturation a retro.

Retraitement orthograde et endodontie chirurgicale : deux thérapeutiques complémentaires

Jeudi 30 novembre 2017, 9 h-12 h

Démonstration télévisée en direct sur patient C44

Responsable scientifique : Ludovic Pommel

Objectifs

• Connaître les indications et contre-indications des deux techniques qui sont complémentaires

• Savoir identifier et déjouer les difficultés inhérentes à ces situations et fréquemment rencontrées

• Pouvoir décrire l’instrumentation spécifique qu’elles requièrent et son mode d’utilisation

• Maîtriser les éléments clés du pronostic et connaître le potentiel conservateur des deux voies

Animateurs : Frédéric Bukiet, Ludovic Pommel

Intervenants :

La voie coronaire

Wilhem Joseph Pertot

La voie chirurgicale

François Bronnec