RESTAURATION
Jean-Christophe PARIS* Olivier ÉTIENNE** Stéphanie ORTET*** Grégory CAMALEONTE**** Jean RICHELME***** Laurent ELBEZE****** André FAUCHER*******
*Cofondateur de l’Académie du sourire
Post-Graduate Esthetic Dentistry
New York University
**MCU-PH
Strasbourg
***Ex-AHU
MarseillePost-Graduate Esthetic Dentistry
New York University
****Chargé de cours à la faculté
d’odontologie
Marseille
*****Chargé de cours
DU d’occlusodontie et d’esthétique
******Ex-AHU
Toulouse
*******Cofondateur de l’Académie du sourire
MCU-PH
Marseille
Percer le secret de la beauté s’apparente à la recherche de la pierre philosophale, ou comment transformer le plomb en or. La multitude des études ayant trait au sourire et à son secret illustre la difficulté à y parvenir et la tentation d’une codification universelle avec des règles strictes facilitant son déchiffrage. Le but de cet article est d’apporter au praticien une aide en s’appuyant sur des critères reconnus pour faciliter et rationaliser l’étude esthétique des patients désireux de restaurer leur sourire.
Une étude esthétique permet au praticien de réaliser une analyse personnalisée du patient à partir des critères de beauté s’appliquant au sourire ; la restauration esthétique d’un sourire ne peut pas être abordée d’un point de vue purement intuitif au prétexte que seuls les opérateurs ayant des prédispositions artistiques peuvent réussir dans cette mission.
Cette tâche ne peut pas non plus être abandonnée au technicien de laboratoire qui n’a, en général, que très peu de contacts avec le patient et qui, au mieux, n’en voit que des photos.
Le praticien est le maître d’œuvre de ce sourire, mais il doit aussi en être l’architecte : il doit à la fois faire « beau, fonctionnel et durable ». Comme l’architecte, il doit collecter des informations avant tout traitement. Aux habituels examens cliniques (radiographies, sondages, moulages d’étude) s’ajoutent les photographies, indispensables à cette étude.
De nombreux auteurs se sont penchés sur le sujet [1-5], certains ayant proposé une check-list (Paris NYU 1993, Paris 2003…)
Les études esthétiques ont d’abord existé sous forme papier avant d’être remplacées par des supports numériques :
• classiques, sur ordinateur ;
• sur iPad/tablettes qui augmentent l’interactivité avec le patient. Certaines applications proposent une prévisualisation, telles que Gett App, Smile Designer Pro, DSD app et, dernièrement, EASY (Esthetic Analysis by Smile academY).
Nous avons choisi de décrire l’application EASY qui est à ce jour la plus aboutie sur le plan de l’analyse et qui, dans sa version V2, permettra une prévisualisation à partir de masques.
L’application EASY permet une analyse en quatre temps du sourire du patient.
Le praticien précise les nom, prénom et âge du patient ainsi que son ou ses motifs de consultation.
Il essaie, à ce stade, de créer un lien de confiance avec le patient en l’interrogeant sur ses souhaits, ce qui lui convient ou non dans son sourire actuel… ce qui lui permet également d’apprécier un peu mieux le profil et la personnalité de ce patient.
Cinq photos sont nécessaires à cette étude : vue du visage de face et profil, sourire de face et de profil, vue intrabuccale avec écarteur. Elles sont insérées dans la base de données du logiciel et calibrées pour une analyse fiable des paramètres.
L’analyse esthétique se fait au travers de différents écrans, en débutant par le visage, puis en continuant par le sourire avec une check-list sur l’occlusion, la composition dentaire et la composition gingivale. Il est à noter que l’étude se fait dans le sens de la perception des individus entre eux : en effet, lors d’une nouvelle rencontre, c’est le visage qui est apprécié en premier, la qualité des gencives, certes importante, n’arrive qu’en dernier [6, 7].
Dans un visage, le poids visuel du regard et du sourire doit être identique si l’on veut que le visage soit regardé comme « un tout ». C’est un critère difficile à mesurer car il dépend de nombreux facteurs. Aussi, au sein de cette étude, il a été retenu un système d’isolement des traits faciaux moins importants pour en faciliter la lecture. Le simple fait d’éclaircir les dents change le rapport d’équilibre dans ce visage : il est important de comprendre comment le patient va appréhender son futur sourire (fig. 1 à 3).
Les lignes horizontales que sont la ligne bipupillaire, la ligne bicommissurale et le plan frontal esthétique stabilisent le visage (fig. 4). La ligne bipupillaire est horizontale dans 80 % des cas et elle servira de référence à la reconstruction du sourire. Dans les 20 % restants, la ligne d’horizon sert de référence [1].
Déterminer si la ligne bipupillaire servira de repère horizontal est un des points fondamentaux dans l’analyse d’un sourire.
L’alignement vertical des points de symétrie sur le plan sagittal médian permet d’évaluer le degré de symétrie de ce visage. Les points de repère sont traditionnellement la glabelle, le point sous-nasal, le philtrum, le milieu interincisif et le point sous-mentonnier.
L’application permet de détecter les asymétries et les signale précisément avec une marge d’erreur de 1 mm. C’est à ce stade que les décalages de milieu interincisif sont détectés.
L’égalité de hauteur des trois étages de la face demeure un critère immuable d’équilibre du visage depuis Léonard de Vinci.
Le visage se divise en trois parties identiques en hauteur :
• tiers supérieur, de la racine des cheveux à la glabelle ;
• tiers moyen, de la glabelle au point sous-nasal ;
• tiers inférieur, du point sous-nasal au point sous-mentonnier.
L’étage supérieur est le plus variable, notamment chez les hommes, et ne sera pas pris en compte dans l’analyse.
L’étage inférieur est très important car il est le témoin des rapports interarcades et, donc, de la dimension verticale d’occlusion sur laquelle le praticien peut agir (fig. 5).
Le soutien de lèvre, en grande partie dépendant des dents, est une des composantes essentielles de rajeunissement du visage (fig. 6). Ce critère s’apprécie en mesurant l’angle que forment la partie horizontale du nez et la partie verticale de la lèvre. Il varie avec le sexe : de 100 à 120° pour les femmes, il est plus aigu chez les hommes (de 90 à 100°).
L’épaisseur et la tonicité des lèvres doivent aussi être évaluées et en discuter avec le patient pendant l’analyse permettra peut-être de le guider vers une augmentation par chirurgie ou par injection afin de compléter et de mettre en valeur les restaurations.
C’est un des plans les plus intéressants pour évaluer le positionnement des lèvres par rapport au nez et au menton. Le plan est tracé entre la pointe du nez et la pointe du menton.
La détermination d’un profil concave doit mettre en alerte sur le caractère vieilli de ce type de sourire. D’un point de vue morphopsychologique, ce type de profil associé au profil caricatural des édentés totaux est mal vécu par les patients. Un meilleur soutien de lèvre par des dents plus en avant et des lèvres épaissies peut améliorer la situation mais, souvent, la chirurgie maxillo-faciale sera la seule méthode pour compenser les situations les plus sévères.
À travers l’application EASY®, l’analyse du sourire se réalise sur huit critères [8-10].
La ligne du sourire correspond à la position des dents par rapport aux lèvres. Elle dépend du positionnement du plan frontal esthétique, de l’âge et du sexe du patient ainsi que de la longueur de la lèvre supérieure.
Classiquement, il existe trois niveaux :
• une ligne du sourire moyenne, où toute la surface dentaire est visible ainsi que les embrasures gingivales ;
• une ligne du sourire haute, ou sourire gingival. On peut distinguer deux types de sourires dans ce cas : moins de 3 mm de gencive apparente et le sourire peut être qualifié d’harmonieux, plus de 3 mm de gencive apparente et il est dysharmonieux ;
• une ligne du sourire basse, pour laquelle la gencive n’est pas visible. Ce type de sourire vieillit le visage.
La détermination du type de sourire se fait grâce à l’appréciation du praticien (fig. 7).
Dans les niveaux « haut » et « bas », l’appréciation est négative (rouge) ou positive (vert). Par exemple, une ligne du sourire haute de plus de 3 mm est cochée « rouge ».
Le plan frontal esthétique est constitué par l’ensemble des bords libres des incisives, des pointes canines et des pointes cuspidiennes des prémolaires et molaires. C’est la ligne de caricature des bandes dessinées, le trait blanc sous les lèvres. C’est aussi la ligne majeure de la composition dentaire, qui ne peut s’apprécier que dans une vue du visage de face et se détailler dans une vue du sourire.
Outre la solution de normalité, le praticien peut être confronté à un plan frontal esthétique (fig. 8) :
• trop bas, d’origine osseuse ou alvéolaire ou d’origine prothétique ;
• trop haut, associé à l’usure, au vieillissement ou à une lèvre supérieure longue ;
• oblique à droite ou à gauche, à différencier d’un problème d’asymétrie labiale ;
• inversé, très disgracieux, ce qui témoigne d’une interposition linguale ou d’une égression des secteurs postérieurs non compensée.
La hauteur de la lèvre supérieure se mesure entre le point sous-nasal et le stomion et, pour la lèvre inférieure, entre le menton et le rebord supérieur de celle-ci. Le rapport est de 1/2, avec une disparité hommes/femmes, la lèvre supérieure étant statistiquement plus courte chez les femmes que chez les hommes.
C’est un critère à l’appréciation du dentiste.
Il s’agit de la ligne verticale qui sépare les deux incisives centrales (fig. 9). Elle doit être verticale car toute obliquité cause un stress visuel à l’observateur ou au patient. Elle stabilise verticalement le visage et le sourire. Sa position par rapport au plan sagittal médian qui traverse le visage est moins importante que son centrage sur le philtrum pour des raisons de priorité en perception visuelle.
L’application, qui recherche automatiquement l’inclinaison et la position, tolère moins de 0,5° d’inclinaison et moins de 1 mm de déplacement, au-delà desquels la situation peut être considérée comme aberrante.
Le soutien des lèvres est grandement influencé par la position des dents antérieures.
Les différentes situations dysharmonieuses que sont la protrusion, la rétrusion, la proalvéolie et la rétroalvéolie ont, dans les cas sévères, une répercussion sur le tiers inférieur du visage (fig. 10).
La correction de ces anomalies se fera souvent grâce à des techniques multidisciplinaires associant orthodontie, techniques prothétiques collées, voire chirurgie maxillo-faciale.
L’appréciation de la position du bord libre des incisives centrales se fera aussi par la prononciation du phonème F.
Classiquement, les lèvres peuvent se ranger dans trois catégories : moyennes, fines et épaisses. C’est un critère à l’appréciation du praticien, avec une notion d’harmonie avec le reste du visage. En effet, certaines situations de lèvres fines se trouvent en harmonie au sein d’un visage aux traits aquilins dans lequel un gonflement exagéré de ces dernières risquerait de rompre l’équilibre.
De l’épaisseur des lèvres dépend la dominance des dents centrales : des lèvres épaisses s’accompagneront volontiers d’incisives centrales dominantes.
Plusieurs classifications ont tenté de ranger la forme de la courbure de la lèvre supérieure (fig. 11). Celle de Husley a le mérite d’être simple et efficace.
Trois types de courbures sont décrits :
• dans le type 1, la courbure est dite positive. Le stomion (point le plus bas de la lèvre supérieure) est en dessous d’une ligne tracée entre les commissures. C’est le type le plus favorable, où la courbure du plan frontal et esthétique suivra celle de la lèvre inférieure ;
• dans le type 2, la courbure est neutre, stomion et commissures sont alignés. La courbure du plan frontal et esthétique sera moins marquée ;
• dans le type 3, la courbure est dite négative, le stomion est au-dessus des commissures. Il s’accompagne le plus souvent d’un sourire gingival. En cas de restauration, la courbure sera linéaire pour éviter la sensation de dents trop longues.
Cet écran de l’application permet d’apprécier le placement des commissures dans le sens vertical par rapport au plan sagittal médian et de déterminer la symétrie ou non du sourire.
Il faut faire, à ce stade, un diagnostic différentiel avec une dissymétrie du plan frontal esthétique.
Cet écran de l’application est plus une check-list qu’une analyse de l’occlusion et orientera le patient vers une thérapie occlusale combinée si nécessaire. Il permet de ne pas oublier de noter les parafonctions, les bruits articulaires, les zones douloureuses, les déviations, les béances et les surplombs.
Il orientera la thérapie en choisissant la position thérapeutique (occlusion d’intercuspidie maximale, relation centrée, NM), en proposant une éventuelle augmentation de dimension verticale d’occlusion et un type de fonction qu’il faudra valider, ainsi que les guides en latéralité et incisifs.
L’analyse de la composition dentaire se fait en étudiant huit critères.
Le rapport de proportion largeur/hauteur des incisives centrales demeure un des critères essentiels du sourire (fig. 12).
Il est classique de parler d’incisives centrales harmonieuses quand ce rapport varie entre 75 et 85 % [4]. Quand il est inférieur à 75 %, elles apparaissent trop étroites et, quand il dépasse 85 %, trop larges, ce qui est le cas des dents usées.
Statistiquement, les incisives centrales mesurent 8,5 mm de large et 10,4 mm de haut [12].
Dans le cas de dents courtes, le rallongement peut être envisagé par le bord libre mais aussi par le bord gingival. Il convient de se référer aux résultats de l’étude du plan frontal et esthétique pour prendre la bonne décision.
Il n’existe que très peu d’études sur les proportions harmonieuses que devraient avoir les dents avec le sourire. Néanmoins, de nombreux sourires présentent des incisives centrales sous-dimensionnées et, plus rarement, surdimensionnées.
Pour déterminer une proportion intéressante, il semble que 31 % soit une bonne valeur [13]. Cette mesure se fait sur une photo de face, et non pas directement sur le patient, le biais étant évidemment la largeur du sourire, très différente entre un sourire timide et un rire aux éclats.
Cette mesure s’effectue sur la largeur, visible de face et donc sur photo, de l’espace entre le milieu interincisif, l’incisive centrale et l’hémi-sourire du secteur correspondant.
Contrairement aux chiffres définis par le nombre d’or et qui ont fait référence pendant très longtemps, soit 61,8 %, les dernières études approcheraient plus volontiers les 70 % rendant les sourires plus généreux en surface dentaire visible !
Il s’agit de la proportion des incisives centrales par rapport aux latérales puis par rapport aux canines (fig. 13).
Pour ce critère, comme pour le précédent, les pourcentages du nombre d’or ont été abandonnés [14] au profit de proportions plus généreuses. En effet, 70 % semble être un rapport de proportion plus exact (RED, recurring esthetic dental) d’après de nombreuses études [15, 16].
En cas de problèmes de disproportion, les solutions doivent être pluridisciplinaires (orthodontie, techniques additives collées, coronoplasties…).
La présence de diastèmes signe une dysharmonie entre la taille des dents et celle de l’arcade, une microdontie isolée mais aussi un édentement partiellement complété, une orthodontie incomplète ou un frein musculaire implanté trop bas. Il est préférable d’éviter les diastèmes, de proposer au patient un projet prothétique pour fermer les espaces et de recueillir son aval.
Le traitement de choix pour gérer les diastèmes réside dans l’orthodontie plus ou moins associée à une pratique adhésive.
La couleur d’une composition dentaire est, après l’intégrité de celle-ci, un des critères les plus importants dans le souhait d’un sourire harmonieux.
La couleur globale doit être déterminée de même que les dyschromies individuelles d’origine intracanalaire et les taches qui peuvent perturber l’harmonie du sourire.
Le choix final de la couleur dépend de nombreux facteurs : personnalité et désirs du patient, équilibre regard/sourire ou souhait d’un sourire dominant, épaisseurs des lèvres, couleur des yeux.
L’état de surface (microgéographie et macrogéographie), en relation avec l’âge du patient et son évaluation au moment de l’étude, donne des renseignements précieux au laboratoire (fig. 14).
Il existe classiquement trois formes de dents – triangulaires, carrées, ovoïdes– et de nombreuses variations. L’évaluation de la forme existante se fera parmi ces trois catégories, avec une appréciation positive ou négative en fonction de l’âge, du sexe et de la personnalité du patient. En effet, une forme carrée peut être appropriée chez un homme mûr et à forte personnalité et complètement inharmonieuse chez une femme jeune et timide. Le choix d’une dent référence pour la forme est un élément important pour faciliter le travail du laboratoire.
L’inclinaison dans le plan frontal augmente des incisives centrales, pratiquement verticales, aux incisives latérales puis aux canines, qui donnent l’exemple pour les dents des secteurs latéraux.
Des axes trop marqués sont le signe d’un dysfonctionnement occlusal (classe II division 2, béances et surplombs…). Une légère animation dans ces axes peut amener de la diversité mais… attention aux tentations d’exagération !
L’étude de la composition gingivale se fait à travers six critères.
Bien évidemment, envisager une restauration du sourire dans un contexte parodontal défaillant est tout à fait inenvisageable. L’évaluation de la santé parodontale se fait suivant les quatre critères classiques : texture en peau d’orange, couleur rose plus ou moins pigmentée en fonction des ethnies, contour épousant les dents, consistance ferme.
Les défauts relevés sont notés dent par dent et un état parodontal général est proposé : santé, gingivite ou parodontopathie.
En cas de maladie parodontale, il est conseillé de compléter l’analyse esthétique par un bilan parodontal complet avec cartographie des poches.
Cette bande de gencive résistante et épaisse est fondamentale si l’on envisage des restaurations prothétiques sous-gingivales. Il conviendra donc d’évaluer la hauteur de gencive kératinisée et son épaisseur : en effet, en présence de parodonte fin, la difficulté de réalisation prothétique devient cruciale.
Toutefois, il convient de préciser qu’une faible épaisseur de tissu kératinisé est compatible avec une bonne santé, sous la condition d’une absence de plaque dentaire.
L’application EASY® demande de relever tous les défauts sur chaque dent et de qualifier l’épaisseur du biotype gingival.
D’un point de vue esthétique, la bonne santé parodontale ne suffit pas à assurer une esthétique optimale. L’harmonie de forme des collets individuellement (zénith déporté distalement pour les incisives centrales et les canines, centré pour les incisives latérales) et collectivement (ligne des collets). En principe, les incisives centrales et les canines ont leurs collets alignés, alors que les incisives latérales ont le leur positionné 0,5 mm apicalement (fig. 15).
Les incisives centrales doivent présenter une symétrie de hauteur parfaite, surtout dans le cadre d’un sourire gingival. À partir des incisives latérales, plus on se déplace vers les dents postérieures, moins les asymétries sont visibles et donc plus elles sont acceptables.
Les anomalies (collets plats, récessions, anomalie d’éruption…) sont notées individuellement en regard d’une ligne moyenne tracée entre les points les plus favorables.
L’embrasure gingivale représente l’espace triangulaire compris entre les collets et le point de contact de deux dents voisines. Il est normalement comblé par la papille gingivale qui vient compléter l’« écrin » gingival qui entoure les dents. D’un point de vue esthétique, son absence engendre une zone de stress visuel, chaque papille absente créant un « trou noir ». Cette disparition des papilles est très souvent la conséquence d’une maladie parodontale ou est liée à son traitement. Cette situation est tout à fait compatible avec la santé gingivale mais est inacceptable pour beaucoup de patients qui ne comprennent pas que la santé parodontale retrouvée s’accompagne d’une diminution de l’inflammation et/ou des poches et donc d’une gencive moins volumineuse.
Le traitement de ces déficits esthétiques est délicat, multidisciplinaire. La combinaison de prévention, de procédures parodontales adaptées, de techniques prothétiques, de collages directs et indirects et d’orthodontie peut sensiblement améliorer le résultat.
La perte des dents a pour conséquence une résorption osseuse horizontale et verticale qui a des conséquences prothétiques directes : longueur et angulation palato-vestibulaire des dents.
Les causes sont diverses : infectieuses (maladie parodontale, infections apicales…), traumatiques, iatrogènes (extractions délabrantes, prothèses amovibles inadaptées…).
Le remplacement implantaire systématique est à proscrire et de nombreuses autres solutions sont à proposer, notamment chez le patient jeune.
C’est le dernier critère étudié, mais il est fondamental dans le cas de sourire gingival et de biotype fin. En effet, même si la réalisation prothétique est parfaitement menée, la présence d’une coloration au niveau de la gencive amènera une tension visuelle disgracieuse.
Les causes sont essentiellement dues à des pratiques endodontiques iatrogènes, à la présence de reconstitutions métalliques intracanalaires et de gencive fine.
Il n’existe pas de traitement d’éclaircissement des racines efficace et seule une conjonction de techniques apportera un résultat satisfaisant. Le traitement type peut se résumer par un démontage des éléments prothétiques métalliques, un retraitement canalaire si nécessaire, une reconstitution corono-radiculaire collée, une temporisation et une réévaluation a posteriori. Si la coloration transgingivale persiste, une greffe de tissu conjonctif est la plus indiquée pour masquer ce déficit esthétique.
Les principaux critères esthétiques ayant été définis, le praticien sait désormais quelle direction doit être donnée au traitement.
À ce stade de l’analyse, le praticien ne doit surtout pas se laisser guider par la routine ou par ses préférences cliniques, il doit raisonner plus globalement. En effet, c’est le moment de déterminer si le plan esthétique frontal doit être rallongé, si les incisives centrales doivent être élargies, si les dents doivent être éclaircies, si les plans gingivaux doivent être harmonisés.
C’est finalement l’établissement du diagnostic esthétique, au travers d’une check-list des critères anatomiques, qui facilitera l’élaboration du plan de traitement et c’est en ayant connaissance de la direction du traitement que les moyens thérapeutiques seront choisis.
C’est le moment de déterminer si telle dent sera remplacée par un implant ou un bridge collé, si la longueur des dents sera harmonisée par un traitement orthodontique, des facettes ou une association des deux.
Les choix seront déterminés en ayant toujours à l’esprit le gradient thérapeutique [17], afin d’être économe en tissu, dans l’objectif d’une stabilité occlusale [18] et dans la recherche des causes qui ont provoqué cette dégradation.
Le chirurgien-dentiste doit se comporter en architecte du sourire : son traitement doit être fonctionnel, esthétique et durable.
La restauration du sourire doit répondre à des critères esthétiques et fonctionnels, identifiés dans cette étude récapitulative, pour aboutir à un résultat personnalisé répondant aux désirs du patient.
Cette restauration, sous la conduite du praticien « maître d’œuvre », se doit d’être belle bien évidemment mais aussi fonctionnelle et pérenne.