Clinic n° 01 du 01/01/2015

 

Pas à pas

Jeanne-Marie CHEYLAN*   Isabelle FOUILLOUX**   Marcel BEGIN***  

La prothèse amovible complète est une thérapeutique qui permet de répondre favorablement à une demande esthétique lorsque la résorption des maxillaires entraîne une perte de soutien disgracieuse des lèvres et des joues. Dans un cas de forte résorption, la réalisation d’une barre usinée de conjonction implantoportée permet d’améliorer la stabilité prothétique de manière significative tout en améliorant le confort de patient, tant du point de vue fonctionnel que psychologique.

Le traitement de l’édenté complet par la prothèse amovible conventionnelle procure de très bons résultats sur le plan esthétique grâce à la grande liberté de choix dans la dimension, la forme et la disposition des dents artificielles montées sur la résine. De plus, dans les cas de forte résorption, la perte du volume alvéolaire entraîne l’effondrement du soutien labial et jugal qui est avantageusement rétabli par la présence d’une fausse gencive vestibulaire. Toutefois, l’amovibilité reste un paramètre redouté par le patient, d’autant plus qu’elle est parfois associée à une sensation d’encombrement par la présence d’un faux palais. Les systèmes de barre munie de rétentions améliorent sensiblement la stabilité et la rétention prothétique ainsi que le confort du patient tant d’un point de vue fonctionnel que psychologique. Voici un cas clinique qui illustre l’apport d’une barre usinée implantoportée dans le traitement d’un cas d’édentement complet maxillaire.

Cas clinique

Madame V., âgée de 77 ans, édentée complète au maxillaire depuis de nombreuses années et complètement dentée à la mandibule, se présente en consultation avec une demande essentiellement fonctionnelle. Elle souhaite une amélioration de la stabilité de sa prothèse complète maxillaire. On note d’emblée, une fois la prothèse déposée, l’importante perte de soutien labial consécutive à la résorption osseuse maxillaire (fig. 1). Un projet implantaire est proposé après une étude des volumes osseux disponibles à l’aide d’imagerie 3D. Compte tenu de l’importance de la résorption antérieure, 6 implants (Biomet 3i®) sont posés dans les secteurs latéraux, moins résorbés (chirurgie : J.L. Sauvan). À l’issue de la période d’ostéo-intégration, des piliers de cicatrisation sont posés (fig. 2). L’empreinte secondaire anatomo-fonctionnelle réalisée sur les implants conduit, après coffrage, à un modèle de travail. Sa validité est contrôlée par une clé en plâtre transvissée (Snow White®) (fig. 3 et 4). Un montage des dents sur cire est réalisé. Il répond aux critères de stabilité et d’esthétique qui ont été validés par l’essai de la maquette en bouche et par un rapport intermaxillaire en relation centrée (fig. 5). Une barre usinée en titane est élaborée, guidée dans sa forme et son orientation par une clé du prémontage (fig. 6 et 7). Cette barre, transvissée directement sur les implants, est surmontée de 3 parties femelles d’attachement Locator® disposées en triangle de manière à répartir favorablement la rétention de la contre-partie amovible (fig. 8 et 9).

L’attachement Locator® (Zest Anchor) (fig. 10), de type bouton-pression, comporte une partie femelle et une partie mâle. La partie femelle est un pilier en alliage de titane, ici vissé sur la barre. La partie mâle est un boîtier en alliage de titane qui reçoit une capsule de rétention en Nylon. Ces capsules existent en différentes couleurs, en fonction du degré de rétention souhaité : bleue (rétention légère), rose (rétention moyenne) ou transparente (forte rétention). Pour les travaux de laboratoire, une capsule de couleur noire est disposée dans le boîtier. Un anneau blanc disposé entre la partie femelle et la partie mâle évite toute fusée de résine autour de la partie femelle lors de la polymérisation. Une contre-barre coulée en titane vient coiffer la barre usinée. Elle est ajourée en regard des attachements et recouverte d’un opacifiant qui préviendra tout risque d’effet visuel disgracieux causé par la présence de métal (fig. 11 et 12). Les dents prothétiques sont remontées sur la contre-barre grâce aux clés de positionnement. Après validation en bouche, la prothèse est polymérisée (fig. 13 et 14). La barre est vissée sur les implants à un couple de serrage de 20 Ncm. Noter la présence d’espacements nécessaires au passage des brossettes pour assurer l’hygiène (fig. 15). La prothèse amovible est ensuite insérée et équilibrée (fig. 16). Le résultat esthétique obtenu est conforme aux attentes de la patiente (fig. 17 et 18).

Réalisation prothétique : laboratoire Sophie Nithart, laboratoire Jésus Guerrero, laboratoire Connexion (Laurent Arnould).

LECTURES CONSEILLÉES

Daas M, Dada K, Postaire M. Prothèses et implants pour l’édenté complet mandibulaire. Paris : Quintessence International, 2006.

Martinez H, Renault P. Les implants : chirurgie et prothèse. Choix thérapeutique stratégique. Rueil-Malmaison : CdP, 2008.

Murphy AS, Desteucq L, Houri C, Gaultier F. Édentement bimaxillaire, réhabilitation implanto-portée et biproalvéolie. Inf Dent 2014;96:76-82.

Nguyen JF, Le Khac O. Quels matériaux pour l’indexation des transferts ? Cah Prothèse 2013;162:23-28.

Perrin J, Boixel E, Plard H, Lance G, Cardona J, Savoure D et al. Empreinte pour prothèse complète transvissée. Cah Prothèse 2014;167:45-59.

Schittly J, Russe P, Hafian H. Prothèses amovibles stabilisées sur implant. Indications et modes d’utilisation de l’attachement Locator®. Cah Prothèse 2008;142:33-46.