Clinic n° 04 du 01/04/2015

 

PASSIONS

CATHERINE BIGOT  

Installé depuis 1982 à Saint-Donat-sur-l’Herbasse, dans la Drôme, Daniel Brulebois prend soin de ses abeilles autant que de ses patients. Entre ruches et collines, ce passionné a su construire son coin de paradis.

Comment l’amour des abeilles vous est-il venu ?

Au contact d’amis et de parents qui avaient des ruches dans la région. J’ai découvert grâce à eux qu’on pouvait être « paysan » sans avoir de terre. C’est d’abord cela qui m’a plu. La vie des abeilles a quelque chose de fascinant. Il suffit d’offrir un abri à la colonie, sous la forme d’une simple boîte en bois, et elle travaille sans vous.

De quand date votre première ruche ?

Peu de temps après mon arrivée dans la Drôme, j’ai construit moi-même une ruche et l’ai installée au fond de mon champ. À l’époque, je louais une fermette un peu isolée, en pleine nature. Le lieu était idéal. Je n’avais pas du tout la prétention de devenir apiculteur. Et puis, en 1985, j’ai décidé de suivre une formation de 1 an à Valence, à raison de 1 samedi par mois, auprès du Syndicat sanitaire apicole. J’avais besoin de mieux comprendre les abeilles et d’échanger avec d’autres apiculteurs amateurs.

Et ensuite, qu’avez-vous entrepris ?

Pendant quelque temps, je n’ai eu que 4 ou 5 ruches. J’exerçais alors mon métier de chirurgien-dentiste à plein temps. C’est après avoir suivi un stage d’élevage de reines que je me suis réellement pris au jeu. J’ai eu 10 ruches, puis 20, puis 30… Et même 80 à une époque.

Où en est votre activité apicole aujourd’hui ?

J’ai une cinquantaine de ruches, regroupées près d’un bois. Les bonnes années, je récolte de 25 à 30 kg de miel par ruche. Soit jusqu’à 1,5 tonne par an, que je vends très facilement, sans avoir à faire de publicité. Quand le miel est bon, ça se sait ! Je ne cherche pas à faire du rendement et je laisse mes abeilles se nourrir de ce qu’elles veulent. Il y a dans les environs de mon rucher une grande diversité de fleurs et d’arbres.

Comment vous organisez-vous entre dentisterie et apiculture ?

Je me suis associé avec 3 autres chirurgiens-dentistes et travaille de 30 à 32 heures par semaine au cabinet. J’ai donc quelques demi-journées libres pour l’apiculture. En dehors de cela, je bloque généralement 3 semaines de « congés » au printemps pour faire les miellées.

Sur une année, quel rythme vous impose l’apiculture ?

La saison commence en général en mars car les abeilles ne sortent pas de leur ruche tant qu’il fait moins de 10 °C. Entre avril et juin, je me rends en moyenne 2 jours pleins par semaine auprès de mes ruches.

Je fais une première grosse miellée de printemps au mois de mai, principalement avec les acacias. Puis une autre en juin, avec les châtaigniers. Fin juin, j’emmène mes ruches dans le sud du département, pour que les abeilles butinent la lavande. Et je fais en principe ma dernière récolte au mois d’août.

Vous faites tout ça seul ?

Oui, la plupart du temps. Depuis la fabrication des ruches avec une machine à bois jusqu’à l’extraction du miel. Mais quand une ruche est pleine, elle pèse au moins 50 kg ! Je demande donc de l’aide quand il faut les déplacer.

J’imagine que vous vous faites piquer de temps en temps…

Bien sûr, mais je me protège correctement. Les gants de chirurgien que j’utilise au cabinet sont parfaits car le dard des abeilles ne reste pas accroché. Il arrive quand même que mes patients me voient avec le visage gonflé…

Les qualités d’un apiculteur sont-elles semblables à celles que doit posséder un chirurgien-dentiste ?

Il y a de réelles similitudes. Il faut être calme et précis. Et avoir une bonne vue !

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans l’apiculture ?

J’aime être dehors en toute saison. La période que je préfère est le printemps, quand la ruche bouillonne de vie et que les abeilles travaillent jour et nuit.

La production de miel représente une sorte de cerise sur le gâteau mais c’est bien l’élevage des abeilles qui me passionne, avec la sélection des reines et la constitution de nouveaux essaims.

Les abeilles ont du mal à survivre en ce moment…

En effet ! Dans la Drôme, la situation est critique depuis 3 ans. Pour les apiculteurs professionnels, l’avenir est incertain. Je mesure vraiment ma chance d’avoir, grâce au cabinet, une activité professionnelle pérenne.

Vos patients consomment-ils votre miel ?

Oui, de nombreux patients m’en achètent. Les assistantes du cabinet sont habituées et jouent souvent les intermédiaires. Il n’y a aucune contre-indication entre la consommation de miel et la santé bucco-dentaire ! Du moment que le miel est naturel, non traité après récolte et qu’on n’en abuse pas, c’est bon pour la santé !

Des projets ou d’autres envies ?

Je n’ai pas l’intention d’étendre mon élevage actuel. Cinquante ruches suffisent à mon bonheur ! Par contre j’ai d’autres passions. Notamment la musique, à laquelle je consacre aussi du temps et de l’énergie. Je viens d’ouvrir une salle de concert - Le grenier à jazz - et de créer une association - JazzezFunk - qui propose des stages et des ateliers au cœur de cette Drôme des collines qui est mon paradis. Quand je vous dis que je suis un passionné !