Clinic n° 04 du 01/04/2015

 

SPÉCIAL IDS 2015

Marc APAP  

Exercice libéral

L’IDS, c’est comme les élections présidentielles, sauf que ça arrive tous les 2 ans : un événement majeur du monde de l’odontologie qui oblige les fabricants à innover toujours plus pour séduire le chaland. Si la précédente édition m’avait un peu déçu, celle-ci s’est révélée plutôt réjouissante. Preuve que l’industrie dentaire ne se porte pas si mal et que la dentisterie a encore de beaux jours devant elle. Dan Fischer, fondateur de la société Ultradent, le proclame d’ailleurs sur une grande affiche placardée sur son stand : « This is really the best time ever to be a dentist ». Vous avez tout de suite compris qu’il n’est pas français.

Curiosités remarquables

On trouve à l’IDS une multitude de petites sociétés dont certaines exposent des pépites, d’autres des gadgets improbables. Un fabricant japonais, YDM Corporation, propose des embouts protecteurs de canules d’aspiration en silicone vert très intéressants. Le caoutchouc semble robuste et la lumière est traversée d’une croix qui évite d’aspirer les gros débris. Bien pratique pour écarter la lèvre sans traumatiser la muqueuse avec le biseau des canules en plastique rigide. Le fabricant brésilien TDV commercialise une bande de Téflon bleu pâle plus large que celles de plomberie. Elle m’a semblé plus épaisse mais tout aussi extensible, plus visible et plus facile à manipuler. Le Téflon est devenu incontournable chez les mordus de dentisterie esthétique, qui l’utilisent pour protéger les dents adjacentes lors du collage d’onlays ou de facettes. L’Isotape (fig. 1) sera commercialisé en France par Septodont dans les mois à venir. Chez le fabricant allemand de meubles de prestige Med + Org, je découvre un tableau monochrome vert flashy. Il s’agit en fait d’une plante qui ressemble de près à du lichen ou à de la mousse des bois. Elle est disponible en une variété de teintes naturelles, du vert au rouge, et s’entretient à raison de 2 ou 3 pulvérisations d’eau par mois. Je suis attiré par une publicité taïwanaise vantant un générateur de radiologie portatif (Energy Resources International). Les rayons X ne sont pas produits à partir d’une électrode en tungstène mais de nanotubes de carbone, avec une réduction de 75 % pour le même rendement. La société turque Gulsa présente l’i-Cover qui permet d’enfiler une fine gaine de protection de caoutchouc bleu, vert ou rouge sur n’importe quel instrument ou seringue de produit pour éviter la contamination croisée. L’opération s’effectue en une poignée de secondes grâce à une petite pompe à vide. L’Américain Garrison, spécialisé dans les accessoires de restauration, suit la tendance : il propose une matrice de faible hauteur très évasée qui s’installe sur un porte-matrice Tofflemire pour réaliser les remontées de marches proximales en composite avant la préparation d’inlay ou d’onlay. Nos amis français de chez WAM exposent un coffret contenant des guides de positionnement de forets (fig. 2), rendant plus fiable la pose d’implants, et une paire de gants noirs en caoutchouc épais imprégné d’une substance opaque aux rayons X. Les praticiens qui tiennent eux-mêmes les capteurs radiologiques en bouche, notamment chez les enfants, n’auront plus à craindre pour leurs doigts. Chez le revendeur allemand Cumdente, je découvre un étrange système d’ancrage radiculaire en titane, constitué de lamelles métalliques souples formant un court cylindre que l’on colle dans le canal. Le Danois CMS Dental vend des probiotiques pour améliorer la santé buccale des patients souffrant de parodontite, d’halitose ou de caries récurrentes.

La société anglaise B & D Dental Technologies propose des couronnes en zircone avec, sous les points de contact proximaux, des logettes dans lesquelles on place un ciment de verre ionomère qui relargue du fluor pour protéger de la carie les dents adjacentes.

La société française Toutenkamion conçoit des camions équipés en matériel médical, chirurgical ou dentaire pour une pratique itinérante ou dans des endroits sous-dotés en professionnels de la santé. Elle ne vend qu’à l’étranger, c’est pourquoi peu de gens la connaissent chez nous. La société allemande Replicate propose de réaliser un implant en titane ou en zircone ayant exactement la même forme que la racine de la dent à extraire. Celui-ci est élaboré d’après un scanner radiologique adressé à la compagnie qui, après concertation avec le praticien, lui renvoie l’implant fait sur-mesure, légèrement surdimensionné au niveau cervical pour assurer sa stabilité primaire. L’Italien Mycerium, enfin, expose une brosse à dents avec un gros manche de plastique argenté contenant un produit de blanchiment. Selon la publicité, un brossage de 2 minutes par jour à l’Ena White 2.0 équivaut au port d’une gouttière durant plusieurs heures !

Aides optiques et ergonomie

Pour la prise de portraits ou de gros plans extra-oraux ou intra-oraux, le Japonais Sho-Fu a mis au point un appareil photo numérique entièrement automatique, l’EyeSpecial C-II. Il possède plusieurs flashes intégrés et se pilote très facilement grâce à un écran tactile situé au dos. La société américaine Photo Med vend un intéressant dispositif de filtres polarisants croisés que l’on installe sur le flash annulaire de son objectif macro. Les photos obtenues sont exemptes de reflets parasites, permettant, entre autres, de transmettre au prothésiste des informations beaucoup plus fiables qu’avant. L’Allemand Hahnenkratt propose de très jolis miroirs de haute luminosité dont le manche et la tête sont moulés d’une seule pièce en plastique autoclavable de couleurs pastel.

Je suis l’évolution de la société Ekler, basé à Chatou (78), depuis des années. Leur scialytique Elio à LED (fig. 3), est équipé d’une caméra autofocus désormais HD, qui projette sur l’écran placé au-dessus de nous des images agrandies d’une finesse remarquable. Une seule poignée, située au milieu de l’ensemble, remplace les deux de chaque côté proposées auparavant. Zoom et gel de l’image sont aujourd’hui possibles via une télécommande manuelle enrobée de silicone blanc pouvant être entièrement désinfectée. Fait unique sur le marché, l’Elio produit une lumière blanche sans aucun effet sur la polymérisation des composites. Je rencontre sur un petit stand les représentants d’une sympathique société japonaise, Telesystems, qui présente une caméra servant à filmer en temps réel le travail du praticien. Celui-ci regarde ce qu’il fait sur un petit écran situé devant lui. La caméra dispose d’un panneau de contrôle tactile pour régler avec deux doigts la mise au point et le grossissement. J’ai expliqué aux responsables, qui ont accueilli mes remarques avec politesse et intérêt, qu’il serait préférable de placer l’écran de visualisation des images plus bas et non pas au-dessus de la caméra, ce qui oblige à lever la tête, entraînant des contraintes au moins aussi nocives que de se pencher sur la bouche du patient. J’ai découvert la Moravision (fig. 4) il y a quelques mois, au hasard de mes pérégrinations sur Internet. Là, je rencontre le Dr Assad Mora en personne (vous savez, celui qui a collaboré avec Zeiss pour la mise au point d’un système optique permettant d’incliner latéralement le microscope tout en conservant le regard à l’horizontale). Nous discutons un petit moment, tandis qu’il m’explique le fonctionnement de son appareil : une caméra munie de deux objectifs qui filme ce qui se passe en bouche et projette sur un écran spécial une image 3D agrandie avec un réalisme étonnant. Pour cela, il faut porter des lunettes à verres polarisants. C’est le seul système au monde qui fonctionne de la sorte, d’une manière aussi opérationnelle. Zoom et grossissement se règlent à l’aide d’une pédale du côté gauche pour le maximum d’efficacité, de rapidité et de précision. L’écran un peu haut semble être le seul point faible du système comme l’a gentiment accepté mon interlocuteur lorsque je lui en ai fait la remarque. Outre ses fauteuils dont les commandes et la programmation s’effectuent via une tablette numérique connectée, la société finnoise Planmeca présente de nouveaux tabourets opérateurs garnis d’une mousse très souple ou au contraire un peu plus dure, avec des caractéristiques ergonomiques très intéressantes. Même s’ils ne semblent pas bien différents de tout ce qui se fait ailleurs, leur assise est réglable en inclinaison, avec un dossier assez court qui peut être placé juste au-dessus de crêtes iliaques pour un soutien lombaire idéal.

Contre-angles, turbines et autres instruments

Je n’ai pas été époustouflé par les nouveaux instruments dynamiques présentés au salon. Je dirais même que j’ai été un peu peiné de la disparition prochaine du 25 LT de chez KaVo au profit d’un nouveau modèle de l’ergonomie duquel je n’ai pas pu me faire une idée suffisamment précise étant donné les circonstances. J’affectionne tout particulièrement ce contre-angle multiplicateur par 5 pour sa douceur de fonctionnement mais, surtout, pour sa forme que je considère quasi idéale. L’angle d’une centaine de degrés entre la tête et le manche est conservé sur le KaVo MASTERmatic M25L (fig. 5) même si cela ne saute pas aux yeux. Mais je ne suis pas sûr que son diamètre soit aussi étroit que celui de son prédécesseur. Cette tendance à évoluer vers l’emphase et le mastoc, maladie génétique de nos cousins « germains », ne tient pas compte des spécificités de notre profession : il y a de plus en plus de femmes parmi les chirurgiens-dentistes et tout le monde n’a pas un physique d’Européen du Nord. Les MASTERmatic sont naturellement d’excellente facture mais, sous les sunlights de l’exposition, ils paraissent beaucoup plus clinquants que le discret revêtement façon peau de requin des instruments KaVo précédents. L’Autrichien W & H étonne une nouvelle fois avec la couronne de 5 LED (fig. 6) autour de sa dernière turbine. Des difficultés techniques interdisent pour l’instant le transfert de cette technologie sur les contre-angles, en raison de leur raccordement non spécifique aux moteurs électriques. Le Suisse Bien-Air présente la série de contre-angles EVO.15 dont le pousse-bouton blanc chauffe très peu lors de l’utilisation, supprimant tout risque de blessure de la muqueuse à son contact. Tous les fabricants proposent désormais des revêtements sans aspérités ou avec des reliefs en creux très adoucis pour une meilleure hygiène et d’une matière satinée qui résiste aux rayures. Bien que cela concerne surtout les utilisateurs d’unit à cordons pendants - quand même les plus nombreux sur la planète -, le standard évolue vers une réduction de la taille des moteurs électriques et de la longueur du manche des contre-angles. Du côté des autres équipements de table, la chirurgie piézoélectrique se développe de plus en plus. Pour l’omnipraticien, NSK présente un bel unit de traitement, le Varios Combi Pro, qui allie pièce à main ultrasonore et aéropolisseur pilotés via un élégant panneau de contrôle à diodes bleues sur fond noir. L’incontournable marque suisse EMS, enfin, nous offre sur l’un de ses plus prestigieux modèles une lumière à LED au bout de sa pièce à main qui illumine d’une manière incroyablement puissante l’insert de détartrage et son environnement immédiat.

Dentisterie restauratrice

3M ESPE lance l’Elipar DeepCure, une lampe à polymériser plus puissante que la précédente mais avec le même design, en inox ou en plastique meilleur marché, ainsi qu’un ciment de verre ionomère de restauration en capsules, le Ketac Universal Aplicap, plus costaud et moins collant avant la prise que ses concurrents. La société australienne SDI présente un coffret de composite universel Aura contenant 3 teintes émail, 8 teintes dentine référencées d’une manière différente de celles du teintier Vita et un bulk fill pour l’obturation en masse des cavités. L’Allemand VOCO propose avec fierté une série de nouveaux produits très aboutis : des composites de type Ormocer® nanohybride, ne contenant pas de monomères toxiques et donc biologiquement mieux tolérés. Il s’agit de l’Admira Fusion, dont la consistance m’a semblé idéale sous la spatule : ni trop ferme, ni collante pour un modelage facile et agréable. C’est la même chimie dont bénéficie l’Admira Fusion XTra, un composite translucide à utiliser en masse dans les cavités volumineuses et capable de photopolymériser sous forte épaisseur. Pour la première fois à ma connaissance, la firme de Cuxhaven commercialise une lampe à polymériser. La Celalux 3, au long corps d’acier satiné, dispose d’une batterie de rechange amovible qui constitue la moitié du manche. Last but not least, un matériau de restauration photopolymérisable semi-fluide, le Clip flow en seringue (fig. 7), permet d’obturer temporairement les cavités d’inlay ou d’onlay. Le produit coule juste ce qu’il faut et s’applique très aisément grâce à la seringue antigoutte brevetée du fabricant.

Ivoclar Vivadent a surtout déployé son énergie à développer ses matériaux prothétiques. Néanmoins, la société du Liechtenstein nous présente quelques améliorations ou compléments intéressants pour les restaurations directes et indirectes : un nouveau composite fluide de type bulk fill en complément du Tetric Evoceram Bulkfill de viscosité élevé. Côté collage, je constate une simplification des protocoles avec notamment le Monobond Etch & Prime, un primer d’adhésion qui mordance la céramique et la silanise en même temps. Pour le collage des éléments de faible épaisseur comme les facettes, nous disposons d’un composite souple photopolymérisable en seringue et, pour les autres types de prothèses, d’un composite à prise duale en seringue d’automélange, le Variolink Esthetic (fig. 8).

Tout le monde connaît les excellents adhésifs et ciments résineux Clearfil de la société japonaise Kuraray Noritake. Elle nous propose, pour le salon, le Panavia V5 qui couvre tous les besoins et indications de collage des matériaux les plus variés, avec seulement 3 produits : un primer en flacon à appliquer dans l’intrados de la restauration, qu’elle soit en céramique ou en métal, un autre produit à appliquer sur la dent et la colle résineuse proprement dite, délivrée en seringue d’automélange.

Kettenbach étend sa gamme depuis quelques années. Il nous présente aujourd’hui un composite de restauration corono-radiculaire en seringue automix. Le Visalys Core est compatible avec tous les adhésifs du marché photopolymérisables ou avec activateur de prise duale. Heraeus Kulzer a lui aussi transféré une bonne partie de ses activités vers la prothèse numérique. Il nous offre néanmoins un nouvel adhésif en monodoses et en flacon noir à bouchon jaune. Contenant le même solvant à l’acétone que ses aînés, l’i-Bond Universal s’utilise avec ou sans mordançage, comme ses concurrents. Kerr annonce une nouvelle mouture de son composite bulk fill, le SonicFill pouvant être délivré via la pièce à main dérivée du détartreur SonicFlex KaVo. Le SonicFill 2 présenterait de meilleures performances et des propriétés de manipulation améliorées, dont une plus faible sensibilité à la lumière ambiante que le précédent. GC lance un nouveau composite esthétique, l’Essentia (fig. 9), en seringues à bouchon rabattable bien pratique. Le matériau est disponible en 7 teintes avec un guide de stratification simplifié permettant de réussir le plus simplement du monde toutes ses restaurations. Fidèle à sa tradition de leader sur le marché des ciments de verre ionomère, le grand fabricant japonais présente une évolution du fameux Equia. L’Equia Forte est tout aussi esthétique mais encore plus solide que le précédent. Coltène expose également, c’est de bonne guerre, un nouvel adhésif universel (avec ou sans etching), le One Coat 7 Universal, dans un flacon original à section triangulaire, mais, surtout, un nouveau composite qui succède au Synergy : le Brillant Ever Glow (fig. 10) est un hybride à particules submicroniques. Il reprend la même nomenclature de teintes, qui réduit par 2 leur nombre par rapport au teintier Vita. Je n’ai pas pu évaluer sa viscosité ni son rendu, mais j’ai été agréablement surpris par l’aspect des jolies seringues à vis enveloppées dans un cache de plastique transparent. Cela leur donne un air luxueux mais masque également leur faible capacité : 3 g seulement.

Endodontie

Enfin, ça bouge en endo. Après un salon plutôt morose il y a 2 ans dans ce domaine, les fabricants se ressaisissent et proposent d’intéressantes améliorations de leurs produits. Le fait marquant de cet IDS aura été le lancement, par Dentsply Maillefer et sa branche allemande VDW, d’un combiné contre-angle moteur d’endodontie sans fil capable de fonctionner en réciprocité. Son couplage à un localisateur d’apex est prévu pour l’année prochaine. Le X Smart IQ Maillefer (fig. 11) et le Connect Drive VDW sont programmés via une application Apple. Les commandes sont accessibles grâce une tablette digitale. Maillefer propose une nouvelle lime de réciprocité à usage unique, le WaveOne Gold, assez différente du modèle précédent. Elle est en métal doré, un alliage de nickel-titane plus malléable, mais pas autant, que celui d’autres instruments à mémoire de forme. Sa section est un parallélogramme dont l’angle le plus aigu est à peine inférieur à 90°. À l’œil, il semble très séduisant, surtout que, comme ses grands frères, sa conicité est variable avec une pointe à 7 %. Au hasard de ma promenade sportive sur les stands, j’ai constaté avec plaisir un sursaut de la part du français Thomas que bien peu de praticiens connaissent mais qui fabrique pourtant un dispositif que tout chirurgien-dentiste devrait avoir dans son cabinet : la trousse d’extraction de tenons et screw posts. La société du Cher propose les Ni-Ti Shapers, une série de 3 limes en nickel-titane pour la préparation canalaire en rotation continue. Notre compatriote Micro-Mega lance une nouvelle lime en nickel-titane pour le cathétérisme en rotation continue. La « One G » (fig. 12) a un diamètre à la pointe de 14/100 et une conicité de 3 %. Le fabricant propose une intelligente présentation sous blister stérile où sont rassemblés, dans un emballage individuel, tous les instruments, rotatifs ou manuels, pour un traitement canalaire complet. La société slovaque Medin expose deux types de limes endodontiques en nickel-titane : les Wizard Navigator conventionnelles avec une section triangulaire et un profil ressemblant à celui des limes HyFlex CM de chez Coltène, mais en métal gris super-élastique. Elle commercialise également, quelle surprise !, des limes pour la réciprocité. Ces dernières n’ont qu’une conicité régulière de 6 % mais une spirale tournée à gauche pour l’utilisation sur les moteurs créés par Maillefer et VDW. Les Unicone existent en 3 diamètres à la pointe : 20, 25 et 40, en 21 et 25 mm de long. J’ai découvert avec surprise chez Coltène le système HyFlex EDM (fig. 13), une extension des NéoNiti du Français Néolix que j’affectionne particulièrement. La séquence complète comporte la même lime de pénétration très courte et celle de 25 à la pointe pour la préparation de la totalité du canal. Elle s’enrichit d’une « Glide Path File » n° 10 et conicité 5 % et de limes de finition de plus gros diamètre : 40/4 %, 50/3 % et 60/2 %. Toutes sont fabriquées en métal à mémoire de forme qui se plie au gré des rencontres canalaires et respecte les courbures comme personne, par un procédé d’électro-érosion qui leur confère cet aspect grainé caractéristique. Le Suisse FKG, lui, en plus de sa très riche gamme d’instruments manuels et rotatifs, nous en propose un nouveau vraiment original, le XP-Endo Finisher. Son métal est légèrement bleuté, signe d’un traitement thermique qui lui confère une mémoire de forme différente toutefois de celle des modèles évoqués plus haut. Ce n’est pas la chaleur qui le redresse mais le froid. Il est très fin, de 25/100 de diamètre, avec une conicité nulle. Apparemment incassable, il ne coupe pratiquement pas et s’utilise en fin de préparation pour brosser les parois des canaux de morphologie complexe et activer la solution d’irrigation. En matière d’irrigation, nous avons également quelques nouveautés intéressantes : l’Irrigatys (fig. 14) prochainement commercialisé par Iténa ressemble à un hydropulseur portatif. Son gros corps cylindrique abrite un réservoir amovible de 30 ml. On visse sur sa tête une aiguille à bout mousse de 0,4 mm de diamètre. Les aiguilles sous blister stérile sont disponibles en 15 et 21 mm de long. Sur et sous le manche, deux touches de silicone servent à actionner la machine. L’une pour pousser le liquide, l’autre pour faire vibrer l’aiguille. On peut combiner les deux opérations pour optimiser le nettoyage du canal. VDW propose l’Eddy, un embout de plastique blanc, long et souple de 15/100 à la pointe que l’on adapte sur un détartreur sonique KaVo ou W & H. La vibration du détartreur agite la solution à une fréquence plus élevée que celle de l’Endoactivator de Maillefer. Chez l’Américain Vista, j’essaye un appareil dont je connaissais déjà l’existence, l’Endo Ultra. C’est un générateur d’ultrasons portatif qui fait vibrer un insert en acier de 15/100 de mm et d’une conicité de 2 %. Je l’ai tenu en main durant quelques instants pour agiter une solution dans une boîte de Petri. Lorsque l’insert entre en action, son amplitude de vibration est si faible qu’on ne le voit pas bouger. Selon le fabricant, ses oscillations de 40 000 Hz sont largement plus efficaces que celles des systèmes soniques. Agiter la solution, c’est bien, mais encore faut-il l’introduire d’abord dans le canal au moyen d’une seringue. Coltène nous propose un nouveau dispositif qui remplace le poste de remplissage CanalPro précédent (fig. 15). Les flacons d’hypochlorite, d’EDTA et de chlorhexidine ont une capacité de 500 ml contre 480 auparavant, mais ils sont plus compacts. Le flacon est posé sur un socle de métal équipé d’une valve de remplissage. Grâce à son embout Luer, il est possible d’y visser, d’une seule main, la seringue à remplir. Le dispositif est moins encombrant que le modèle antérieur et s’avère plus fiable.

Comme toujours, ce sont les Asiatiques qui étonnent le plus. Non pour leur créativité - ils ne font que copier les modèles existants qui ont fait leur preuve - mais pour leur capacité d’adaptation rapide aux demandes du marché. Un Chinois propose une copie des ProTaper, mais en métal mou à mémoire de forme, et un Coréen des copies de WaveOne ainsi que, surtout, un contre-angle sans fil capable de tous les mouvements de rotation, y compris la réciprocité selon Dentsply.

En ce qui concerne l’obturation canalaire, c’est désormais FKG qui va commercialiser le fameux BC Sealer (fig. 16), ciment biocéramique en seringue fabriqué par BUSA et jusqu’ici distribué en France par Henry Schein. Pour faire le pendant, le Coréen Vericom propose lui aussi un ciment d’aspect similaire en seringue, le Well-Root ST, tandis que la compagnie Maruchi du même pays expose l’Endo Seal MTA gris à base de mineral trioxyde aggregate prêt l’emploi que l’on introduit dans le canal via une petite aiguille métallique.

Empreintes, prothèse et imagerie

Les innovations qui touchent les produits à empreinte ne concernent pratiquement plus que leur aspect visuel. Presque tous les fabricants disposent aujourd’hui d’une gamme d’élastomères mats pour le scannage, impossible à réussir avec des matériaux réfléchissant la lumière. Qu’il soit chimique ou numérique, un bon enregistrement des limites cervicales s’avère indispensable. Les pâtes d’hémostase et de rétraction gingivale fleurissent chez une multitude de fabricants. L’inventeur du procédé, le français Actéon, présente l’Expazen (fig. 17), ultime aboutissement de l’Expasyl. Le produit est enfin disponible en capsules à longue buse pour pistolet à composite. Je découvre que l’Américain Centrix propose trois versions, en capsules également, d’ersatz plus ou moins réussis, dont celle vendue par Septodont que j’ai présentée ici dans ma rubrique de février.

Vita a encore amélioré son Easy Shade, qui dispose maintenant d’un large écran d’affichage sur sa base. Avec ce petit appareil aussi joli que pratique, la prise de teinte n’a jamais été aussi simple, sûre et agréable.

Les progrès dans la prise d’empreinte numérique sont flagrants. Les scanners intra-oraux sont de plus en plus maniables, la procédure de plus en plus simple. L’enregistrement se fait en couleur et sans poudrage dans la majorité des cas. Je m’attarde un moment sur le stand de la société française Lyra qui propose des solutions d’empreinte numérique et de réalisation prothétique à la location. J’y découvre la nouvelle caméra 3Shape (fig. 18), que cette société semble privilégier par rapport à celle de chez 3M ESPE, plus simple, un peu plus petite, mais qui exige un poudrage des surfaces.

L’I-Tero américaine a également réduit le volume de sa pièce à main. Toujours sur un kart, sa maniabilité semble meilleure qu’auparavant. La caméra Carestream est d’une taille elle aussi très raisonnable. Elle n’est pas sur kart mais se place sur un plan de travail à côté de l’écran d’ordinateur. Elle ne nécessite aucun poudrage et enregistre les images en couleur au format universel pour les exporter aisément vers n’importe quel laboratoire. Le logiciel de gestion des images offre d’excellentes performances et pilote également tous les dispositifs d’imagerie de la marque. La Cerec Omnicam (Sirona) dispose d’une tête aux dimensions réduites. Elle aussi enregistre les images en couleur et sans poudre que l’on peut combiner à celles obtenues avec le cone beam de la marque (Orthophos SL) (fig. 19). Ainsi, cette caméra offre des possibilités thérapeutiques inouïes, comme la conception de guides chirurgicaux pour la pose d’implants en toute sécurité. Le logiciel d’imagerie Sidexis 4, qui va avec, est non seulement très puissant mais présente aussi une interface de toute beauté qui permet de déplacer, d’ordonner, de combiner les images avec une précision et une rapidité époustouflantes.

À ce propos, je rencontre le représentant de la société française Kitview. Son produit est un logiciel gestionnaire d’images qui s’interface avec les principaux softwares de gestion dentaire du marché. Les photos du patient sont immédiatement transférées dans l’ordinateur central grâce à une carte Wi-Fi équipant l’APN. Elles sont ensuite placées dans un classeur et archivées selon des critères prédéfinis par l’utilisateur. Elles seront ainsi très aisément retrouvées pour le travail en cours, l’historique du traitement ou l’information et la motivation de nouveaux patients.

D’autres fabricants présentent des caméras 3D de taille beaucoup plus réduites que toutes les précédentes. La remarquable Condor (fig. 20, 21), vendue par la société française Biotech et créée par François Duret, se révèle maintenant sous une forme quasi aboutie. Sa légèreté est incroyable et les images, en couleurs réelles, d’un très grand réalisme.

Bien sûr, toutes les grandes compagnies proposent des stations d’usinage au cabinet ou bien au laboratoire de prothèses. Sirona, pionnier dans ce domaine, est capable de toutes les prouesses. Il s’étend en direction de l’orthodontie avec la prise d’empreinte d’arcades entière et la réalisation de gouttières de positionnement transparentes, un procédé en pleine expansion. Le géant de Bensheim a signé pour cela un partenariat avec l’Américain Invisalign, leader mondial sur ce marché.

J’ai vu plusieurs scanners de modèles en plâtre, dont celui vendu par Heraeus, qui m’ont fait comprendre comment fonctionnent ces appareils. Et j’ai découvert, enfin, que l’impression 3D était, elle aussi, entrée dans notre champ d’activités. Elle ne sert pas - encore - à élaborer des prothèses conjointes définitives mais à réaliser des modèles de travail, des gouttières transparentes par addition de matière ou encore des maquettes en résine calcinable pour la coulée du métal remplaçant la cire élaborée à la main par le prothésiste.

Si la radiographie 2D et 3D explose, les dispositifs de prise de clichés rétroalvéolaires se standardisent : d’un côté, on trouve les traditionnels capteurs filaires de taille 1 et 2, avec une petite nouveauté chez Vatech qui en propose un souple, mais assez large (EZ Sensor Soft) ; de l’autre, des plaques au phosphore chez presque tous les fabricants, y compris Sirona aujourd’hui. Les Français Owandy (fig. 22) et Actéon (fig. 23) se distinguent par la taille extrêmement réduite de leur lecteur, beaucoup plus logeable dans la salle de soins que les autres.

Conclusion

L’explosion des nouvelles technologies, axées sur l’imagerie, va certainement modifier nos habitudes de travail dans les années à venir. Nous aurons un exercice plus propre et peut-être plus intellectuel qu’aujourd’hui où il faut mettre les mains dans le cambouis dans pas mal de situations cliniques. C’est la première fois depuis longtemps que ces équipements high-tech me font envie. Leur prix reste tout de même encore bien élevé par rapport aux possibilités d’évolutions futures. Mais ils ont déjà le mérite de nous rendre optimistes sur notre exercice, ce qui, étant donné les circonstances dans notre pays, est toujours bon à prendre.