Clinic n° 02 du 01/02/2015

 

EN VAL-DE-MARNE

ACTU

ANNE-CHANTAL DE DIVONNE  

Un accord passé entre l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France et le centre de santé municipal de la ville d’Ivry-sur-Seine met en place la première Permanence d’accès aux soins de santé (PASS) bucco-dentaire en secteur ambulatoire.

Des PASS médicales hospitalières et ambulatoires ont déjà été mises en place. Mais pour le dentaire, il n’existait jusqu’à présent que des PASS en milieu hospitalier (4 en Île-de-France). Intéressée par une expérimentation menée depuis une dizaine d’années dans le Val-de-Marne, l’ARS d’Île-de-France mise aujourd’hui sur le centre dentaire municipal d’Ivry pour accueillir la première PASS bucco-dentaire ambulatoire et lui a attribué une enveloppe de 20 000 euros. Le dispositif doit permettre aux personnes vulnérables ou exclues d’accéder gratuitement à une prise en charge des soins bucco-dentaires et un accompagnement social « en ville ».

Accompagnement

Pour lutter contre le renoncement aux soins, le responsable du service dentaire du Val-de-Marne, Fabien Cohen, a organisé dès 2005 un réseau social dentaire dans les communes d’Ivry et Vitry. De nombreux acteurs sont impliqués : les centres de santé dentaires des deux collectivités, leur centre communal d’action sociale (CCAS), l’Espace départemental social (EDS), le centre de soins de l’hôpital Charles-Foix, les structures sociales qui accueillent des personnes en difficulté, la mission locale des jeunes, le foyer des émigrés, Emmaüs… ainsi que des chirurgiens-dentistes libéraux.

« Le refus de soin est d’abord et avant tout culturel. Il est plus lié à la situation sociale que financière des gens », affirme d’expérience ce chirurgien-dentiste passionné de santé publique. De fait, malgré la mise à disposition par le conseil général du Val-de-Marne d’une enveloppe financière destinée à compléter le panier de soins des patients bénéficiaires de la CMU (soins de parodontie, couronnes en pédodontie…), les personnes en situation précaire restent en marge des soins dentaires. Une assistante est recrutée pour effectuer des permanences et aller à la rencontre des patients potentiels dans divers centres d’accueil. « Son objectif est de comprendre les raisons du renoncement aux soins, d’aider administrativement les personnes et les inciter à se faire soigner », explique Fabien Cohen.

Des résultats

Les résultats montrent à quel point le problème financier apparaît secondaire. Sur 1 000 personnes sollicitées par l’assistante, 75 seulement se rendront à un rendez-vous pour des soins. Par étape, sur 1 000 personnes contactées, 500 acceptent de discuter, 250 d’entre elles acceptent un entretien dans le bureau de l’assistante qui propose son aide et un rendez-vous à la faculté de chirurgie dentaire de Charles-Foix. Mais seules 125 personnes s’y rendent effectivement. Cette consultation spécifique créée en lien avec l’AP-HP (Assistance publique-hôpitaux de Paris) et l’ARS est « une sorte d’examen bucco-dentaire de précarité ». En plus d’un examen de l’état de la bouche, l’objectif est de responsabiliser les patients, de les inciter à se rendre à un rendez-vous pour les soins qui leur est fixé rapidement et selon les cas à l’hôpital, dans un centre de santé ou dans un cabinet libéral. Seuls 75 se rendront à ce rendez-vous.

La PASS : un suivi

La PASS bucco-dentaire va prendre en charge ces patients lorsqu’ils se présentent dans le centre dentaire. Pour Fabien Cohen, cette nouvelle entité « ne bouleversera pas le centre qui est déjà organisé pour accueillir les personnes en situation précaire. La PASS est plus une reconnaissance du travail effectué » depuis de nombreuses années dans le centre. Une assistante de santé publique y effectue un suivi régulier des patients précaires, relance les rendez-vous, aide à résoudre les questions administratives…

L’efficacité de la PASS sera contrôlée par deux indicateurs : le nombre de personnes attirées dans la PASS qui permet d’évaluer l’accès aux soins et le niveau des soins reçus permettra d’observer le succès de la lutte contre le renoncement aux soins. Quelques questions restent encore en suspens. Par exemple, on ne sait pas comment seront financés les soins aux personnes qui ne bénéficient pas de la CMU. Reste aussi à élaborer un modèle permettant d’installer des PASS dentaires ambulatoires dans d’autres localités d’Île-de-France, et même d’autres régions dès 2017.