Clinic n° 03 du 01/03/2017

 

JURIDIQUE

Audrey UZEL  

À l’heure du numérique, les professionnels et les établissements de santé conservent de nombreuses données de leur patient (données nominatives, suivi des soins…) sous forme numérisée. Dans le cadre d’une action en responsabilité intentée contre le professionnel de santé, dans quelle mesure un document numérisé peut-il servir de preuve ? Une ordonnance du 12 janvier 2017 vient faire le point.

Le principe. Aujourd’hui, un professionnel de santé peut conserver de manière numérisée tous les documents comportant des données de santé à caractère personnel produits, reçus ou enregistrés à l’occasion d’activités de prévention, de diagnostic, de soins, de compensation du handicap, de prévention de perte d’autonomie ou de suivi social et médico-social. L’existence d’un double sur papier n’est pas exigée puisque l’ordonnance autorise le professionnel à détruire l’original avant le délai d’archivage légal. En matière de responsabilité médicale, aucun délai légal n’est fixé. On rappellera seulement que l’Ordre préconise une conservation des dossiers pendant une durée de 20 ans pour les patients majeurs et jusqu’aux 28 ans d’un patient mineur. Cette ordonnance constitue donc une avancée majeure en matière de gestion de cabinet puisqu’elle conduira certainement le professionnel de santé à favoriser le cloud à l’archivage papier, souvent volumineux et parfois très coûteux.

Les conditions. La copie numérique des documents comportant des données de santé doit être fiable. Juridiquement, la fiabilité est présumée lorsque la copie résulte d’une reproduction à l’identique de la forme et du contenu de l’acte, par le biais d’un procédé garantissant l’intégrité de la copie. En d’autres termes, la copie doit résulter d’un procédé qui dispose d’une empreinte électronique permettant de détenir des informations liées à la copie et destinées à l’identification de celle-ci, précisant le contexte de la numérisation, en particulier la date de création de la copie. Le procédé doit également viser à garantir que toute modification ultérieure de la copie à laquelle elle est attachée est détectable, telle qu’un horodateur qualifié, un cachet électronique qualifié ou une signature électronique. La conservation de la copie doit intervenir sur un support permettant d’éviter toute altération de sa forme et de son contenu. Le procédé de reproduction par voie électronique doit produire. En d’autres termes, la numérisation ne doit pas favoriser l’altération et la modification du document. Toute modification doit pouvoir être visible.

L’accessibilité. Comme pour le dossier papier, les patients peuvent avoir accès au dossier numérique. Ils peuvent réclamer une copie numérique, une copie papier, voire un document récapitulatif établi sur la base de l’ensemble des documents numérisés. En effet, l’intégrité d’une copie numérique ne s’oppose pas à ce qu’un professionnel de santé procède à la fusion de documents si cette fusion ne modifie ni le sens ni le contenu des données, et ce dans le respect du secret médical et de la confidentialité des données collectées et traitées. La fiabilité du document créé est présumée lorsqu’un procédé de production permet d’insérer les métadonnées nécessaires à la garantie de l’identification de l’émetteur et de l’intégrité des données ainsi matérialisées. Les métadonnées, ou metadata, sont des données créées pour fournir des informations sur des ressources électroniques. Il s’agit en quelque sorte de la légende du document numérisé.

EN RÉSUMÉ

Les professionnels de santé peuvent aujourd’hui limiter l’usage du papier au bénéfice du numérique. Naturellement, la sécurité et l’intégrité des données doivent être les maîtres mots. En conséquence, le recours à un logiciel spécialisé, fourni par un prestataire agréé comme hébergeur de données de santé, est indispensable.