Clinic n° 03 du 01/03/2017

 

COUR DES COMPTES

ACTU

Alors que la profession donne de la voix pour essayer de sensibiliser l’opinion publique aux enjeux du plafonnement des honoraires, les accusations de la Cour des comptes ne pouvaient tomber plus mal. Le président de l’Ordre répond.

La Cour des comptes dénonce « des dérives et des abus » dans la gouvernance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes et appelle l’institution à « retrouver le sens de ses missions de service public ». Les magistrats accusent l’Ordre d’avoir « délaissé une partie de ses missions de contrôle de la profession dentaire au profit d’intérêts catégoriels » comme le financement de lobbyistes contre les centres dentaires mutualistes ou associatifs, les subventions à la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) pour l’organisation de la manifestation contre Pessoa, le financement de la campagne « Sauvons nos dents », le « Grenelle de la santé bucco-dentaire » et les propositions formulées sur le financement des soins « où l’Ordre n’est doté d’aucune compétence »…

Des indemnités « généreuses »

Les accusations des magistrats portent aussi sur des indemnités « généreuses, parfois même indues ». Les conseillers, en principe bénévoles, peuvent percevoir des indemnités qui ont atteint 50 000 € en moyenne par conseiller national en 2015, auxquels ont pu s’ajouter jusqu’à 20 000 € pour participation à des conseils locaux. Ils disposent chacun d’un appartement de fonction. La Cour des comptes critique aussi la pratique de cadeaux en faveur des conseillers ou de leur famille « extrêmement répandue » (grands vins, coffret Relais et Châteaux(r) d’une valeur de plusieurs milliers d’euros, bijoux et accessoires de haute couture, pulls en cachemire, montres serties de diamants, ordinateurs, stylos de grande marque, soins de thalassothérapie) ainsi que des réunions délocalisées qui « s’apparentent davantage à des déplacements d’agrément ».

La Cour des comptes formule huit recommandations pour une réforme de « grande ampleur » portée par ses mandants et qui « s’impose de manière urgente ».

L’Ordre répond

Le président de l’Ordre estime le jugement de la Cour des comptes « sévère et injuste ».

« L’environnement a évolué » depuis la création de l’Ordre, « les conditions de formation, d’installation et d’exercice de la profession ont aujourd’hui autant d’importance que la vérification d’un diplôme et l’inscription au tableau d’une profession réglementée », estime Gilbert Bouteille. « L’harmonisation au sein de l’Union européenne en témoigne, avec les questions délicates d’accès à la profession notamment au titre des formations différentes selon les États… » L’action de l’Ordre est orientée vers « les valeurs, le respect de la déontologie ainsi que le maintien d’un haut niveau de sécurité et de qualité des soins ». À ce titre, l’Ordre « ne lutte pas contre les centres de santé » mais poursuit « les dérives mercantiles et les pratiques abusives ».

S’agissant des indemnités, Gilbert Bouteille explique que le travail des conseillers est « chronophage » (40 heures par semaine en moyenne pour un conseiller national) et « nécessite un haut niveau de professionnalisation et de compétences difficilement compatible avec le bénévolat » et que les indemnités ordinales sont « très nettement inférieures au plafond fixé par décret ». Les appartements sont en fait des studios de 25 m2 plus économiques que des nuitées à l’hôtel.

S’agissant des réunions délocalisées pour les représentants ordinaux, le président de l’Ordre précise qu’elles ont toujours été en lien direct avec les mandats des conseillers. Et le président honoraire de l’Ordre affirme que l’institution n’a jamais, sur ses fonds, acheté les cadeaux indiqués. Les vins ont été offerts en remerciement à des conférenciers bénévoles.