Clinic n° 12 du 01/12/2016

 

BURN-OUT, ADDICTIONS, COMPORTEMENTS SUICIDAIRES

ACTU

ACD  

Les professionnels de santé ne savent pas à qui s’adresser lorsqu’ils sont en situation de souffrance psychologique. L’association SPS (Soins aux professionnels de santé) travaille à la mise en place d’un parcours de soins qui leur serait réservé. Une ligne d’appel téléphonique ouverte à tous les professionnels de santé doit être lancée au mois de décembre.

Une enquête réalisée l’an dernier avait montré l’importance de l’exposition au risque de souffrance psychologique des professionnels de santé. La moitié d’entre eux déclaraient en effet être ou avoir été en burn-out (syndrome d’épuisement professionnel). Une nouvelle enquête* menée en cette année, en partenariat avec le Centre national des professions de santé (CNPS), révèle que les trois quarts des professionnels de santé chercheraient de l’aide s’ils se trouvaient en situation de souffrance psychologique mais que la moitié d’entre eux ne saurait pas à qui s’adresser. L’autre moitié penserait à se tourner vers sa famille, un confrère ou un ami. Par ailleurs, 95 % des répondants disent ne pas connaître d’associations et de numéros d’écoute réservés aux professionnels de santé en souffrance psychologique. Si un numéro d’appel était mis en place, la majorité des soignants (80 %) préférerait que ce soient des associations professionnelles qui le gèrent et garantissent l’anonymat. Un psychologue se révèle être l’interlocuteur privilégié en premier contact. Les personnes sondées citent aussi un confrère de même spécialité.

Un numéro d’appel

S’appuyant sur ces résultats, l’association SPS présidée par Éric Henry a prévu un parcours de soins spécial dont la première étape, prévue au mois de décembre, est l’ouverture d’une plateforme téléphonique interprofessionnelle, indépendante et tenue au secret médical. Ce service aura pour mission d’apporter une écoute psychologique et une aide à l’orientation soit en direction de personnes pouvant aider à résoudre des problèmes administratifs, soit vers des structures d’aide. Pour les personnes dont l’état nécessite une hospitalisation, l’association SPS s’est aussi lancée dans la mise en place d’une dizaine d’unités réservées aux professions de santé, réparties sur le territoire. L’ensemble du dispositif devait être détaillé le 29 novembre lors du second colloque national sur le parcours des soins des personnes vulnérables à l’hôpital du Val-de-Grâce. Pour Éric Henry, ce parcours de soins doit être aménagé sans frais particuliers, à l’exception de la ligne d’appel téléphonique par laquelle il cherche des financements (57 € l’appel). Le responsable du SPS table sur 12 000 appels annuels.

Ce n’est pas « nombriliste de se préoccuper de sa propre santé » tient à affirmer Jean-Pierre Olié, président de la Fondation Pierre-Deniker, qui est en train d’élaborer un arbre décisionnel pour les écoutants de la plateforme. Ce psychiatre est « très motivé pour agir en amont » car, observe-t-il, « les médecins se préoccupent de leur addiction ou de leur dépression à un stade trop tardif ».

* Enquête à laquelle 4 000 professionnels de santé travaillant en majorité dans le secteur libéral ont répondu entre le 19 septembre et le 10 octobre dernier (990 kinésithérapeutes, 842 médecins, 680 orthophonistes, 491 infirmiers, 329 podologues, 224 pharmaciens, 178 chirurgiens-dentistes, orthoptistes, aides-soignants, biologistes…).

SELON L’ENQUÊTE

• Près de la moitié des professionnels de santé (48 %) pense que leur souffrance pourrait affecter la qualité des soins au point de mettre en danger la vie d’autrui ;

• En situation de souffrance, les professionnels de santé estiment à 24 jours en moyenne le temps maximum qu’ils pourraient passer à se soigner sans travailler ;

• 16 % des professionnels de santé se disent prêts à s’investir et aider leurs confrères. Pour Éric Henry, si elles sont formées, ces personnes pourraient devenir « des sentinelles dans les régions » chargées de repérer les professionnels en situation de souffrance psychologique afin de leur venir en aide.