Adieu Herbert !

Voici un produit français dont nous pouvons être fiers. Le BioRoot™ RCS est un ciment d’obturation canalaire à base de silicate tricalcique, dérivé de la fameuse Biodentine™ de la société Septodont. Il se présente sous forme d’une poudre non pas ocre beige, comme son aînée, mais d’un blanc immaculé dans un flacon de 15 grammes dans lequel on puise la quantité voulue à l’aide d’une cuillère doseuse en plastique. Le liquide, essentiellement de l’eau et du chlorure de calcium, se trouve dans des petites fioles rassemblées par 5 dans des sachets métallisés étanches. La poudre contient de l’oxyde de zirconium pour la radio-opacité et un polymère biocompatible qui améliore son adhésion.

Le choix de la quantité

Alors que la Biodentine™ se prépare dans des capsules prédosées, l’opérateur a ici le choix de la quantité qu’il veut utiliser. On peut se dire qu’a priori, un produit aussi novateur sous une forme aussi archaïque n’est pas de très bon augure. C’est vrai qu’il faut le malaxer à la main. Mais cette présentation offre beaucoup plus de liberté et de réelles économies : si le coffret, contenant 35 fioles de liquide, peut sembler cher à l’achat, il se révèle beaucoup moins coûteux qu’il n’y paraît quand on comprend qu’il est absurde d’utiliser la totalité d’une cuillère pour un traitement. Comme, par chance, les flacons de liquide sont munis d’un bouchon amovible bien étanche, il est tout à fait possible de n’utiliser qu’une fraction de leur contenu à chaque fois. Selon mon estimation, une fiole de 0,20 mL permet de préparer assez de ciment pour 3 molaires. On peut donc estimer à près d’une centaine de traitements la capacité totale de l’ensemble. Bonne surprise, la pâte obtenue lors du malaxage peut être extrêmement onctueuse et juste assez « grasse » pour bien coller aux cônes de gutta et ne pas couler sans retenue. Mauvais point en revanche, le malaxage à l’aide d’une spatule métallique laisse des traces grises dans le ciment. Dommage que le fabricant ne livre pas de spatule en plastique, indispensable pour préparer le précieux produit sans le polluer. Il préconise l’enduction d’un cône de gutta calibré et son introduction jusqu’à la longueur de travail avec un petit mouvement de va-et-vient pour bien répartir le ciment sur les parois du canal. Je ne suis pas totalement convaincu de l’efficacité de cette méthode pour combler les zones hors d’atteinte des instruments endodontiques.

Viscosité idéale

On peut aussi utiliser un bon vieux lentulo, mais gare aux dépassements : ce n’est pas parce que ce produit est parfaitement biocompatible qu’il faut accepter de l’égarer dans le péri-apex ! J’avais été déçu par la biocéramique prête à l’emploi délivrée en seringue : sa granulométrie est trop élevée pour être injectée dans le canal au moyen d’une aiguille très fine, laissant quelques doutes sur sa capacité à pénétrer dans les canaux accessoires. Le BioRoot™ RCS, en revanche, est doté d’une viscosité idéale. Il peut être facilement introduit dans le canal au moyen d’une seringue Skini et de son aiguille de 29 G du fabricant américain Ultradent. La simplicité, le confort et la sécurité d’utilisation du produit sont alors optimaux. L’absence de rétraction de prise, la bonne étanchéité, la biocompatibilité et l’adhésion naturelle du ciment au cône de gutta font de ce matériau innovant un concurrent sérieux de la technique d’obturation à la gutta chaude selon Herbert Schilder. La désobturation, pourvu qu’on ait introduit un cône de gutta jusqu’au bout du canal, n’est pas plus difficile qu’avec n’importe quel autre ciment. Celui-là, tout du moins à court terme, ne devient pas suffisamment dur pour empêcher les limes de le désagréger, au besoin en s’aidant d’une solution chélatante d’EDTA.