RESTAURATION
Marine PETITJEAN* Brice RIERA** Marie-Anne GARBOUA*** Imen LARADH**** Franck DECUP*****
*Pratique privée, Paris 13e
**Assistante HU Paris Descartes
***Interne Université Paris Descartes
****Pratique privée, Le Vésinet
*****Assistante HU Paris Descartes
******Pratique privée, Plouer-sur-Rance
*******Assistante HU Rennes 1
********Maître de conférence Université Paris Descartes
Étape finale de la réalisation d’une restauration composite, les gestes de finition sont indispensables au succès durable du traitement. L’objectif de ce temps opératoire est d’éliminer les excès de matériaux, d’obtenir la forme finale de la restauration (anatomie primaire et secondaire) et de reproduire un état de surface (anatomie tertiaire) proche de celui de l’émail pour satisfaire aux impératifs anatomiques et cliniques. La qualité de la finition conditionne en partie l’intégration biologique (diminution de l’adhérence du biofilm), fonctionnelle (résistance à l’usure) et esthétique (réflexion optique) du traitement restaurateur. Le confort du patient (contact de la langue) est également un critère immédiat de satisfaction.
Ce temps opératoire a deux aspects limitatifs pour le praticien : le choix des instruments parmi une (trop) grande diversité du matériel existant et un manque de rationalisation.
La complexité des systèmes instrumentaux (multiplication du matériel et donc des étapes) et des gestes opératoires peut créer un dilemme entre souhait de qualité et nécessité d’efficacité du praticien car le temps consacré est souvent long pour une modification pas facilement perceptible. La question se pose donc à propos du protocole le plus ergonomique à appliquer et du choix des instruments les mieux adaptés [1, 2].
Dans cet article, nous proposons d’aider à y répondre en nous appuyant sur une analyse bibliographique des performances des systèmes existants et des solutions proposées par des experts dans les rapports de cas. Nous y avons associé notre expérience clinique et un souci de simplification. Nous tenterons ainsi de proposer un plateau technique et des procédures qui allient faisabilité et résultat optimal.
Une première partie a pour objectif de présenter les résultats concernant les capacités des matériels disponibles à répondre aux objectifs voulus, pour aider à la constitution des plateaux techniques adaptés.
Deux prochaines parties s’intéresseront aux spécificités des procédures de finition des restaurations composites pour les dents postérieures puis pour les dents antérieures.
Cliniquement, en fonction des objectifs de reproduction anatomique à atteindre et du protocole associé, on distingue classiquement l’étape de la finition de celle du polissage.
L’étape de la finition a pour but de donner la forme finale à la restauration. Elle comprend l’élimination des excès de matériau, la restitution du rendu anatomique (anatomie primaire et secondaire) et l’aplanissement des joints. On obtient alors une restauration dont la surface « finie » reste une surface « rugueuse » qui n’est pas encore compatible avec l’environnement buccal. Elle est caractérisée par un aspect mat qui doit être poli [3]. La qualité du résultat des finitions dépend en partie des instruments que l’on utilise [4]. La rugosité d’une surface peut être évaluée au laboratoire avec un « profilomètre ». L’unité utilisée est la Ra (rugosité arithmétique). À l’issue de cette étape, la surface obtenue présente une Ra comprise entre 150 µm pour les plus grosses granulométries et 10 µm pour les plus fines (encadré 1).
Le polissage assure la transformation d’une surface « rugueuse » en une surface « polie », sans aucune modification de forme et/ou de volume. Une surface « polie » a des valeurs de rugosité « faibles ». Elle est lisse et caractérisée par un aspect de surface « brillant ». La brillance est la conséquence d’une diminution de la rugosité de la surface d’un biomatériau. Un matériau de restauration qui présente un état de surface supérieur à Ra = 1,4 µm sera considéré comme « rugueux » et de mauvaise adaptation marginale. Il contribue à l’accumulation de plaque, à l’inflammation parodontale, à l’augmentation du risque de carie secondaire et il est à l’origine de complications (fractures, sensibilités postopératoires ou colorations). Une surface est parfaitement compatible avec l’environnement buccal si on obtient un état de surface proche de l’émail (Ra = 0,62 µm) ou si les irrégularités sont de taille inférieure à la taille moyenne d’une bactérie : on peut alors considérer que l’on a atteint un bon état de surface. Elle doit donc avoir la valeur la plus faible possible et tendre vers 0,5 µm, seuil de rétention de plaque dentaire. De même, une surface ayant un bon rendu esthétique présente une rugosité de l’ordre de 1 µm, ce qui est très proche de l’émail naturel.
Cliniquement, il est difficile d’évaluer la rugosité. L’absence de brillance d’une restauration et la sensation d’inconfort du patient peuvent indiquer que la surface est encore rugueuse et qu’il est nécessaire de la repolir (encadré 2).
Le succès des étapes de finition et de polissage est déterminé par le respect du protocole, l’expérience du praticien et la séquence instrumentale utilisée. La qualité de surface et son maintien dans le temps dépendent de l’aptitude du praticien à vérifier le résultat obtenu à l’aide de sondes, de radiographies et d’aides optiques. À ce titre, des critères ont été établis (par la Fédération dentaire internationale, FDI) pour l’aider à évaluer de manière objective la qualité des restaurations [5].
La qualité du polissage dépend à la fois du matériel utilisé et du matériau de restauration. L’aptitude au polissage des résines composites dépend de la dimension moyenne des particules minérales qui entrent dans leur composition [6]. D’une manière générale, les résines composites micro-hybrides présentent toutes une aptitude au polissage équivalente [3].
Toute résine qui entre en contact avec de l’air pendant la polymérisation va créer une couche de surface non polymérisée. Cette couche est fragile et se dégradera au cours du temps. Par conséquent, même lorsque la finition ne paraît pas nécessaire (par exemple forme adéquate obtenue d’emblée), le polissage reste indispensable afin d’obtenir une stabilité chimique et d’améliorer les propriétés mécaniques de la surface du composite [7].
Les séquences instrumentales de finition et de polissage n’aboutissent pas toutes à des résultats identiques. Le choix du système de polissage est dicté par des notions d’efficacité et d’ergonomie, par la situation clinique et la position de la restauration sur la dent ainsi que par le coût. (encadré 3)
Le « principe fondamental » qui régit la finition et le polissage est l’abrasion. L’abrasion est le processus qui consiste à user une surface dure (le substrat) par le frottement avec un autre corps dur (l’abrasif). Elle peut se faire par coupe avec des lames qui entaillent le substrat (par exemple une fraise en carbure de tungstène) ou par meulage avec des particules abrasives collées ou frittées qui vont user le substrat (par exemple des fraises diamantées).
L’efficacité des dispositifs et l’état de surface qui en résulte dépendent principalement des facteurs suivants [1] :
• différence de dureté entre le substrat et le matériel abrasif ;
• caractéristiques des particules abrasives utilisées dans le matériel de finition/polissage ;
• propriétés physiques du support du matériel ou de la substance abrasive (rigidité, élasticité, flexibilité, épaisseur, souplesse, porosité) ;
• vitesse et pression du matériel abrasif appliquées au substrat ;
• lubrification pendant la période de finition/polissage (eau, glycérol, silicium…).
L’abrasion dépend de nombreux facteurs. L’efficacité d’un instrument de finition/polissage dépend essentiellement de la dureté, de la taille, de la forme et de la nature de l’abrasif choisi. Compte tenu de leur différence d’action, le résultat souhaité ne pourrait être obtenu avec un seul instrument et nécessite donc une séquence. Au-delà des instruments eux-même, leur mode d’action (pression, vitesse, lubrification) reste dépendant de l’opérateur.
Au vu de la multitude des instruments proposés, la connaissance des caractéristiques de chaque instrument de finition et de polissage et l’analyse des études comparatives doivent pouvoir nous aider à déterminer les meilleurs protocoles.
Les instruments utilisés et étudiés sont les suivants:
• fraises en carbure de tungstène multilames ;
• fraises diamantées ;
• disques à support fin en plastique ou en papier ;
• inserts sonores/ultrasonores avec lame abrasive monoface ;
• inserts avec contre-angle à mouvements alternatifs;
• strips ;
• instruments manuels (CK6, scalpel, instruments spécifiques) ;
• disques, cupules et pointes souples élastomères;
• roues en spirale ;
• brossettes en feutrine ;
• brossettes à poils imprégnés de particules abrasives ;
• pâtes à polir.
Les fraises en carbure de tungstène doivent présenter un minimum de 12 à 40 lames [4] pour avoir une action de coupe douce et peu agressive [8]. Cette faible efficacité de coupe en fait un instrument de choix pour obtenir un état de surface plus lisse au sein du matériau. Cependant, leur action de coupe ne respecte pas parfaitement l’intégrité de la limite marginale. Les dommages causés au niveau du joint provoquent des microfissures à l’origine de défauts marginaux préjudiciables. Ces fraises sont recommandées pour rectifier le matériau dans sa masse (par exemple équilibration occlusale, sculpture soustractive, etc.). La rugosité de surface laissée est acceptable pour permettre le polissage direct (tableau 1).
Les fraises diamantées ont l’avantage de générer moins d’irrégularités, en particulier lorsque l’on respecte leur utilisation successive par granulométrie décroissante (vert, rouge, jaune, blanche) [9, 10].
Le choix des formes est fonction de l’accessibilité aux zones à finir : aplanissement du joint, surfaces axiales vestibulaires et linguales, embrasures, surfaces occlusales, etc. On recherchera donc des formes fines et allongées (fig. 1) pour les finitions axiales et les joints et des formes concaves pour les finitions occlusales du relief anatomique et de l’équilibration (fig. 2).
Ces fraises sont recommandées en utilisation tangentielle pour l’aplanissement des joints, la mise en continuité du composite avec la surface dentaire et pour le remodelage soustractif dans la masse du composite. Pour obtenir une rugosité de surface acceptable, « prête à polir », il faut utiliser au moins deux granulométries (rouge et jaune) (tableau 2).
Les disques abrasifs (support fin en plastique ou en papier) peuvent être utilisés pour les finitions jusqu’à des niveaux de rugosité proches du polissage (Ra = 5 10 µm). Leur utilisation est pratique, principalement dans le secteur antérieur (fig. 3) (aplanissement du joint et des irrégularités laissées par les fraises, embrasures, bord libre) pour des questions d’accessibilité. Attention ! Utilisés de manière intempestive, ces instruments ont tendance à gommer les macroreliefs nécessaires au rendu optique d’une anatomie naturelle. Ils offrent aussi des possibilités d’action dans le secteur postérieur pour la finition des faces axiales et des embrasures occlusales, vestibulaires et linguales. De nombreuses études s’accordent à dire que les disques souples abrasifs permettent d’obtenir les états de surface les plus lisses lorsqu’ils sont utilisés par granulométrie décroissante (au moins trois granulométries sont nécessaires). Lorsque les limites de la restauration sont accessibles, il est préférable d’utiliser les disques souples abrasifs pour minimiser l’abrasion iatrogène de l’émail entourant les limites de la restauration [11]. En revanche, si la restauration n’est pas accessible, il est préférable d’utiliser des fraises diamantées ou en carbure de tungstène (tableau 3).
Les inserts sonores à lame diamantée monoface sont abrasifs, à mouvements oscillatoires, atraumatiques vis-à-vis des tissus parodontaux et de la dent adjacente (fig. 4). La littérature scientifique sur l’utilisation de ce type d’instruments lors de la finition est encore trop pauvre mais leur utilisation est très pratique pour la finition dans les régions proximales, notamment lorsque les excès sont importants (tableau 4).
Le système Profin® permet une finition, notamment en interproximal, des restaurations à l’aide d’un contre-angle à mouvement de va-et-vient et d’inserts abrasifs unifaces. Ce système permet de travailler dans des zones difficiles d’accès, sans être iatrogène au niveau des tissus mous et de la dent adjacente et sans accrocher la digue. Différentes granulométries existent pour obtenir une efficacité travaillante adaptée à l’importance des excès et finitions à réaliser (tableau 5).
Les strips abrasifs sont indispensables pour la finition des faces proximales (fig. 5). Il faut préférer les plus fins pour concentrer leur action sous le contact proximal et ne pas risquer d’en diminuer l’intensité. C’est surtout au niveau du joint cervical que leur travail est nécessaire afin d’aplanir cette zone, inaccessible aux autres instruments. Leur utilisation doit être systématique. Plusieurs granulométries sont disponibles. Les strips en métal sont supérieurs à ceux en plastique, car ils sont très efficaces pour des réductions interproximales importantes [12]. Ils doivent néanmoins être utilisés avec attention puisqu’ils éliminent autant de composite que de tissu dentaire [2] (tableau 6).
L’instrument manuel CK6 et les bistouris lame 12 et lame 15 peuvent être utilisés avantageusement pour les finitions. Ils ont une action de coupe adaptée à l’élimination des excès marginaux d’adhésif et de composite en faible quantité (fig. 6). Ils laissent un état de surface lisse et ne créent pas de destruction iatrogène au niveau des marges d’émail adjacentes au composite. Il est également possible de travailler la surface du composite (accentuation des reliefs, sculpture du bord libre, etc.) [13]. Les points d’appui doivent être sûrs et les mouvements dirigés de la gencive vers l’extérieur pour ne pas risquer de blesser les tissus mous.
Des instruments à sculpter en carbure de tungstène, spécialement conçus pour les composites, sont aussi disponibles (Hu-Friedy® ou LM Arte Eccesso®). Ils présentent des extrémités coupantes de différentes formes. L’utilisation du carbure de tungstène permet de maintenir leur tranchant de manière prolongée (tableau 7).
Les disques, cupules et pointes souples à base élastomère servent à finir, polir et assurer le brillantage [1, 8] (fig. 7). On utilise aujourd’hui essentiellement des pointes souples imprégnées de particules abrasives. Cette génération d’outils est qualifiée de « système one-step » : ils réduisent le nombre d’étapes de polissage sans différence significative entre eux. Une utilisation, sous spray, avec forte pression et vitesse moyenne (7 500 tr/min) permet d’agir en finition puis un relâchement de la pression et une augmentation de la vitesse (15 000 tr/min) offrent une action de polissage. Tous ces systèmes permettent d’obtenir des valeurs de rugosité inférieures à 0,7 µm, cliniquement acceptables comme défini précédemment. De plus, les protocoles de polissage les plus simples (polissage en une ou deux étapes) donnent les résultats les plus reproductibles. La simplification du protocole permet de limiter le facteur opérateur (tableau 8).
Les roues en spirale constituent une forme d’instrument proposée depuis peu. Elles sont constituées d’un élastomère souple intégrant des particules d’alumine (fig. 8). Elles sont utilisées pour la finition et le polissage des restaurations composites, à une vitesse de contre-angle comprise entre 15 000 et 20 000 tr/min et une pression faible, sans pâte ni spray et sans provoquer d’échauffement préjudiciable.
Elles semblent offrir un état de surface et une brillance comparables à ceux des produits principaux du marché. Elles dégagent très peu de chaleur, présentent une très bonne ergonomie et sont réutilisables plusieurs fois. Leur intérêt réside aussi dans l’amélioration des possibilités d’accès aux différents reliefs des dents à l’aide du même instruments (en comparaison avec les systèmes de disques, pointes ou cupules) (tableau 9).
Les brossettes en feutrine sont à utiliser avec une pâte abrasive afin d’obtenir un état de surface brillant c’est-à-dire inférieur à Ra ≤ 1 µm (tableau 10).
Les brossettes imprégnées de particules abrasives sont conçues pour atteindre les sillons, les fissures, les zones interproximales des restaurations en céramique ou en composite auxquels il est impossible d’accéder avec les autres dispositifs sans modification intempestive de l’anatomie de la restauration. La brossette imprégnée de particules abrasives semble être une alliée indispensable pour les praticiens qui désirent faire de la dentisterie dite esthétique et obtenir des restaurations directes brillantes avec un protocole simple (tableau 11).
Les pâtes à polir sont uniquement utiles pour le « brillantage » dans le secteur antérieur (fig. 9). À base d’oxyde d’aluminium ou de diamant, leur granulométrie est comprise entre 0,3 et 10 µm. L’intérêt des pâtes abrasives est moindre aujourd’hui : d’une part, du fait de la difficulté du protocole (utilisation de plusieurs pâtes successives) et, d’autre part, parce que les résultats des études in vitro ne sont pas tous en leur faveur. En effet, plusieurs études mettent en évidence un défaut majeur : leur pouvoir abrasif est supérieur sur la matrice des composites que les charges, laissant place à une surface rugueuse à l’échelle microscopique.
Au-delà de l’instrument lui-même, c’est son mode d’action qui va influencer le résultat final.
Il existe quelques recommandations cliniques simples à appliquer :
• quelle que soit l’instrumentation, les finitions et le polissage doivent toujours se faire du composite vers la dent et de manière tangentielle ;
• les finitions avec fraises et pointes souples imprégnées d’abrasif doivent se faire sous irrigation pour prévenir toute altération de l’interface dent/composite en raison de la chaleur générée par les instruments [14]. De même, une altération est possible au sein de l’interface charge/matrice du composite ;
• a contrario, certains auteurs conseillent d’utiliser les fraises diamantées à sec, avec une faible pression et sous spray d’air (en comparaison avec une finition sous irrigation) pour obtenir une texture et un brillant comparables à la dent naturelle [15] ;
• il a été montré que la plupart des praticiens polissent à des vitesses trop basses et qu’ils ont tendance à augmenter la pression lorsque la granulométrie diminue. Une étude révèle que le contraire permet d’obtenir de meilleurs résultats. Ainsi, il faut exercer une pression légère, durant un temps de l’ordre de 15 à 20 secondes par instrument avec un effet maximal atteint au bout de 5 secondes [16] ;
• enfin, il est recommandé de suivre les instructions des fabricants sur la vitesse, le temps et la pression à exercer avec leurs instruments.
Lors de la finition et du polissage d’une restauration en composite, la rugosité de surface idéale à atteindre, pour être compatible avec l’environnement buccal, doit être inférieure à Ra ≤ 1 µm.
Pour obtenir une intégration de la restauration la plus proche de l’aspect et de la texture de la dent naturelle, il est nécessaire de réaliser les ajustements anatomiques puis le polissage de la surface, par étapes, avec des instruments différents. À ce jour, aucun instrument unique ne permet d’atteindre les bons objectifs.
Cependant, ces instruments peuvent être choisis dans le but d’être le plus efficace possible, de permettre l’accès à toutes les surfaces et de couvrir successivement l’élimination des différentes échelles d’irrégularités jusqu’à l’obtention de l’état de poli souhaité.
La littérature scientifique montre que l’on peut obtenir un état de surface cliniquement acceptable avec la plupart des systèmes proposés.
La rationalisation des instruments doit se penser en termes de finition puis de polissage.
En ce qui concerne la finition, le premier geste conseillé est l’élimination des excès d’adhésifs (toujours présents) à l’aide d’un CK6 ou d’ultrasons à faible puissance.
Ensuite, la mise en forme anatomique et l’aplanissement des joints des surfaces axiales et occlusales sont réalisés avec des instruments actifs dont la forme et l’action travaillante sont choisies en fonction de la zone à finir. L’état de surface obtenu doit également diminuer le plus possible les irrégularités. À ce stade, cliniquement, il est souhaitable que le dernier instrument utilisé laisse une rugosité de 10 à 30 µm maximum. Ce résultat est obtenu avec l’utilisation de fraises bague rouge (au moins) et jaune (au mieux). Il est également possible d’utiliser une fraise multilame (de 8 à 16 lames), un disque médium ou un strip rouge puis jaune. Les cupules foncées des systèmes à deux étapes peuvent participer à ce niveau de finition si les régularisations sont limitées. Une action identique est obtenue avec les cupules en silicone « one-step » utilisées en pression modérée à vitesse moyenne. Quand cela est possible, en particulier sur les dents antérieures, l’action coupante d’un bistouri est avantageuse pour cette étape.
Dans les espaces interproximaux, les instruments ultrasoniques ou les lames à mouvements alternatifs sont utilisés quand les excès sont importants. Si non, ou en complément, l’utilisation des strips métalliques rouges et jaunes pour régulariser la surface proximale doit être systématique. En effet, l’observation aux aides optiques montre qu’il y a toujours des excès à éliminer ou des surfaces à régulariser malgré le recours aux matrices et aux coins interproximaux.
Nous avons choisi de constituer un set d’instruments pour la finition avec une fraise flamme bague rouge et une fraise flamme bague jaune. Elles ont des formes légèrement différentes afin d’accéder à toutes les faces régulières axiales et de permettre l’aplanissement des bords. Une fraise ovoïde bague rouge complète les instruments rotatifs de finition pour les corrections des faces occlusales et concaves. Lorsque l’action de l’instrument se fait uniquement dans la masse du matériau une fraise multilame donne l’avantage du meilleur état de surface avant polissage. Cependant, on pourra avoir une approche simplifiée sur les faces triturantes car la perception de poli est moins ressentie et la persistance de l’état de surface sera rapidement conditionnée par l’usure due à la fonction masticatrice. À l’inverse, pour le patient, la sensation de surface lisse est essentielle sur les faces axiales notamment en antérieur. Un maximum d’attention devra y être associé.
Des strips abrasifs rouge et jaune, un bistouri lame 12 et un insert interproximal pour ultrasons complètent le plateau technique.
Pour le polissage, la diminution progressive de la rugosité de surface est obtenue avec les pointes en silicone, des disques, des roues, des brossettes ou des feutrines, selon les dents et les faces à travailler.
Nous avons choisi de travailler avec les pointes en silicone “one step” qui permettent de limiter le nombre d’instruments tout en gardant une qualité d’action adaptée au résultat attendu. La littérature scientifique montre qu’il existe un gain en rapidité pour ces systèmes. La pression d’utilisation est légère et la vitesse rapide.
Nous utilisons également les disques fins pour les zones très planes, pour les embrasures occlusales et pour les bombés nécessitant une bonne réflexion optique.
Nous avons également souvent recours aux roues en deux étapes (beige puis rose). En effet, elles permettent dans de nombreuses situations, notamment postérieures, d’accéder, grâce au même instrument, aux surfaces planes, bombées et en relief avec de très bonnes performances de poli.
Dans notre pratique, le brillantage est particulièrement réservé aux dents du secteur antérieur. Pour cela, nous avons recours à une brossette imprégnée de particules abrasives ou à l’utilisation de pâte à polir de très fine granulométrie, associée à une feutrine. En effet, les seuls instruments ne faisant pas l’unanimité sont les pâtes abrasives associées aux brossettes car elles laissent des traces dans la matrice du composite.
Nous pouvons donc sélectionner un set type pour les finitions et le polissage (fig. 10).
L’étape de finition et de polissage d’une restauration en composite est indispensable pour obtenir son intégration anatomo-physiologique, le confort du patient et une qualité durable dans l’environnement buccal.
Il est possible d’atteindre des objectifs cliniquement acceptables avec des moyens suffisamment simples dans un temps raisonnable.
Malgré la multitude de systèmes et de protocoles proposés, les études montrent qu’il n’est pas nécessaire d’accumuler beaucoup d’instruments pour avoir un plateau technique adapté à cette procédure clinique. Ainsi est-il possible de simplifier et de rationaliser cette étape finale de la restauration en composite pour la rendre plus facile et lui consacrer toute la place qu’elle mérite. Une bonne sélection des systèmes disponibles et le choix du matériel qui convient le mieux au praticien permettent d’améliorer son organisation.
Notre proposition de plateau technique comporte donc deux instruments manuels (CK6 et bistouri 15), un séquenceur de cinq instruments rotatifs, deux boîtes de strips à prendre à l’unité et un réceptacle compartimenté pour les cupules en silicone et les roues en spirale.
Les autres systèmes peuvent occasionnellement venir compléter ce plateau en fonction de la dent, de l’importance des finitions et des habitudes de travail de chacun.
Dans une deuxième partie, nous détaillerons les protocoles de finition et de polissage en présentant les spécificités rencontrées dans les procédures pour les dents antérieures et celles pour les dents postérieures.
Représentation schématique du résultat de la finition
Les surfaces anatomiques sont mises en forme et aplanies. Après une finition par une fraise bague rouge, une fraise multilame (8 lames) ou un disque abrasif medium, la rugosité de surface moyenne est de 30 à 40 µm.
Objectifs du polissage :
Représentation schématique des états de surface
Rendre la rugosité de surface compatible avec l’environnement buccal, l’aspect esthétique et le confort du patient.
Rappel des valeurs de rugosité de surface moyenne (Ra) :
• surface rugueuse : Ra ≥ 1,4 µm ;
Rétention de plaque, aspect mat, sensation rugueuse.
• surface acceptable : Ra = 1 µm
Faible adhérence du biofilm, aspect brillant, sensation lisse.
• surface brillante : Ra ≤ 1 µm ;
• surface de l’émail : Ra = 0,62 µm ;
• Surface idéale : Ra = 0,20-0,7 µm.
Rugosité inférieure à la taille moyenne des bactéries, aspect brillant, sensation indétectable.
Finition et polissage : objectifs cliniques à atteindre
• Reproduction anatomique et adaptation occlusale.
• Adaptation marginale. Continuité de l’interface dent/composite.
• Réduction de la rugosité de surface. Diminution de l’adhérence du biofilm bactérien (obtenue par une surface de rugosité comprise entre 0,2 et 0,7 µm).
• Intégration esthétique avec une brillance optimale (obtenue à partir d’une surface de rugosité de l’ordre de 1 µm).
• Confort du patient (obtenu à partir d’une différence de rugosité comprise entre 0,25 et 0,5 µm).