La détection précoce, une des clés du pronostic des cancers oraux

Clairement, cet ouvrage est consacré à un véritable problème de santé publique puisque la France est malheureusement l’un des pays au monde où la morbidité et la mortalité dues aux cancers des muqueuses orales sont les plus importantes. Même si l’incidence de ces cancers est en régression, tout retard au diagnostic devient vite dramatique tant ces tumeurs sont grevées d’un fort taux de mortalité, et ce d’autant plus que leur pronostic est corrélé à la précocité du diagnostic. Et pourtant, 90 % des cancers oraux sont des carcinomes épidermoïdes affectant le revêtement épithélial, donc théoriquement aisément accessible à l’inspection par tout praticien correctement formé. Comme le pronostic est corrélé à la précocité du diagnostic, la détection le plus tôt possible est la pierre angulaire de la lutte contre ces cancers. De plus, les principaux facteurs de risque sont bien connus : l’addiction tabagique et la consommation régulière d’alcool. Dès lors, chez ces patients à risque, un examen minutieux des muqueuses orales devrait être systématique lors de toute consultation bucco-dentaire à la recherche de la moindre lésion muqueuse. L’auteur distingue les lésions potentiellement malignes, qui peuvent éventuellement évoluer vers un cancer, des lésions précancéreuses, qui montrent une évolution cancéreuse quasi systématique, et des lésions cancéreuses établies. Les principales lésions potentiellement malignes regroupent certaines formes de lichen plan buccal et certaines kératoses tabagiques présentant un état de surface particulièrement inhomogène. Les lésions précancéreuses montrent des signes histologiques de désorganisation ultrastructurale épithéliale accompagnée d’atypies cellulaires. Leur diagnostic fait donc appel à l’analyse histologique d’un prélèvement tissulaire intéressant tout (exérèse) ou partie (biopsie) de cette lésion. Les lésions cancéreuses établies sont principalement des carcinomes épidermoïdes dans une forme clinique ulcéreuse ou végétante ou mixte. D’autres formes existent cependant. L’induration sous-lésionnelle est un élément primordial à rechercher car il s’agit du signe d’accompagnement le plus fréquent et le plus précoce. Il convient de ne pas oublier certaines tumeurs malignes d’expression muqueuse mais ayant comme origine une glande salivaire accessoire ; ce sont des adénocarcinomes. Tous ces aspects sont parfaitement étudiés dans ce manuel dont la vocation clinique est incontestable. Une riche iconographie de grande qualité illustre efficacement les propos de l’auteur. Une bibliographie sélectionnée vient clore l’ouvrage, ainsi qu’une liste de lectures conseillées.

Cet ouvrage reflète avant tout la grande expérience de l’auteur en la matière. Le praticien généraliste et l’étudiant y trouveront de très nombreux exemples de lésions à risque et de lésions cancéreuses et, à ce titre, sa lecture est utile. Le sujet est sans nul doute d’importance puisqu’il s’agit de l’une des rares pathologies létales sur laquelle le chirurgien dentiste peut avoir une influence en la détectant le plus précocement possible. Si l’objectif d’initier le plus grand nombre à cette détection précoce est louable (car sans aucun doute très efficace), l’absence d’éducation à la démarche diagnostique (aucun chapitre n’y est consacré) est regrettable car il s’agit sans doute aussi d’un moyen d’action non négligeable dans la lutte contre ce fléau. Il est à noter qu’en complément de cet ouvrage, deux vidéos sont à consulter, l’une relative à l’examen approfondi de la cavité buccale, l’autre à la biopsie.