La médiatisation du burn-out a levé le tabou sur ce syndrome « d’épuisement au travail ». Mais elle n’en banalise pas pour autant les effets ravageurs. Il est urgent, pour les chirurgiens-dentistes menacés comme pour l’ensemble des professionnels de santé, de se prémunir contre les conséquences humaines et financières du burn-out.
Ce sont des confrères « cabossés ». C’est ainsi que Serge Deschaux, directeur de l’Observatoire national de la santé des chirurgiens-dentistes, nomme ces chirurgiens-dentistes qui un jour, subitement, « ne remettent plus les pieds au cabinet ».
Le burn-out tombe comme un couperet. « Il se manifeste par un épuisement physique et psychologique, un grand sentiment de vide. La personne exprime une impression intense d’avoir consumé toute son énergie vitale accompagnée d’une très grande dépréciation de soi », souligne Patrick Légeron. Ce psychiatre, qui a été l’un des premiers professionnels français à identifier ce syndrome, note que même s’il ne figure pas dans le registre international des troubles mentaux (DSM-V, 5e édition du Diagnostic and statistical manual of mental disorders), le burn-out est une forme de dépression, « une dépression de l’épuisement ».
Souvent associé au salariat, le burn-out s’attaque autant aux professions libérales. « Nous estimons que 48 % des chirurgiens-dentistes sont cernés de près ou de loin par le burn-out », rappelle Serge Deschaux, s’appuyant sur l’enquête nationale menée en 2011 sur le burn-out et les troubles musculo-squelettiques dans la profession. Selon lui, cette démarche a permis de lever un déni « collectif » sur ce phénomène. Une prochaine enquête, programmée courant 2015, révélera si les chirurgiens-dentistes reconnaissent aujourd’hui davantage la menace du burn-out, dès lors qu’il met à mal leur image d’infaillibilité. « Pour ces professionnels de santé, axés sur la relation d’aide au patient, ce syndrome met à jour des faiblesses, physiques et morales, difficilement acceptables. »
Pourtant, le burn-out menace la pratique professionnelle. Les conséquences financières induites par un long arrêt de travail, voire par la fermeture du cabinet, n’en sont qu’un aspect. L’altération du système émotionnel qui l’accompagne peut également être lourde de conséquences pour le professionnel de santé ; le manque d’empathie, l’indifférence à autrui, voire le cynisme s’installent, ne mettant pas les chirurgiens-dentistes à l’abri d’une erreur.
Cette apparition du burn-out dans la profession risque de s’aggraver dans l’environnement économique actuel. Car aux facteurs de stress habituels, liés à la dépendance à un plateau technique très sophistiqué et à l’utilisation d’une haute technologie, s’ajoute le contexte de crise qui tend les rapports à l’argent entre le praticien et son patient. La désertification médicale ne fait qu’accentuer la pression sur les chirurgiens-dentistes, souvent obligés de prodiguer des soins plus palliatifs que curatifs. « Nous sommes une profession de perfectionnistes et ce décalage entre nos aspirations déontologiques et la rude réalité du terrain pèse de plus en plus », remarque Serge Deschaux. D’où l’importance de dresser des remparts contre ce mal qui s’insinue au cabinet. Et d’être en alerte face à ces signes annonciateurs qui s’installent progressivement. L’entourage proche est ainsi appelé à repérer ces symptômes : troubles du sommeil, dérapage des émotions, épuisement…
Selon Patrick Légeron, il convient également de réduire les facteurs de stress au travail en fixant des limites à sa charge de travail et en ne se surinvestissant pas. Une bonne relation à autrui, l’entretien du lien social, voire l’appel à l’aide d’un spécialiste sont, pour ces habitués de l’exercice libéral, une autre protection. Pour inciter les chirurgiens-dentistes à veiller à ces risques d’épuisement professionnel, l’Observatoire national de la santé des chirurgiens-dentistes mettra en place, au premier semestre 2015, une offre d’accompagnement à la qualité de vie sous forme de modules de prévention audio-vidéo.
Référence Programme B52
Séance interactive
Le burn-out : comment s’en protéger ?
Comprendre les causes et les conditions d’apparition du burn-out et savoir le prévenir
Mercredi 26 novembre, 15 h 30-18 h 00