Clinic n° 08 du 01/09/2014

 

Équipe et Espace

CATHERINE FAYE  

Installé dans l’ancienne Banque de France de Fontainebleau, Jean-François Russon a su garder l’esprit des lieux en jouant avec l’espace, l’architecture et un mariage subtil entre décor d’origine et agencement design. Pour ce chirurgien-dentiste entrepreneur, projets et famille sont la clef de voûte de sa réussite.

Quatre mètres de hauteur sous plafond, verrières Art déco, grands volumes, espace et lumière caractérisent le cabinet atypique de Jean-François Russon. Passé et présent s’y entremêlent dans un cadre inattendu, au cœur d’une ancienne banque : ici, une applique d’origine, là, un mur rouge vif, un peu plus loin la porte entrouverte d’un coffre-fort, puis un plan de travail où s’alignent système Cerec, four de frittage à céramique Vita Vacumat 6 000 m, SiroLaser Advance de Sirona. Pensé dans ses moindres détails par le praticien, le cabinet a su trouver sa place entre guichets, murs blindés et barreaux aux fenêtres. Dans ce lieu original et high-tech, salles de soins, de prophylaxie et blocs chirurgicaux s’organisent sur une surface de 340 m2 au cœur d’une construction de caractère – façade en brique rouge et toiture en ardoise – datant de 1910.

Spécialisé dans une approche globale des traitements bucco-dentaires, le praticien, diplômé de la faculté de Garancière en 1986 et titulaire d’un DU d’implantologie de la faculté de Bordeaux II, exerce aujourd’hui aux côtés de sa fille Marie-Charlotte, 28 ans, et de son fils Hugues, 26 ans, tous deux diplômés de la faculté de chirurgie dentaire de l’université Paris Descartes. C’est pour accueillir ces nouveaux associés qu’il déménage en 2010. Non loin de son précédent cabinet, situé à moins d’une encablure de là. « Le fait que je sois heureux dans mon métier a dû les conforter dans leur choix », confie-t-il. En leur permettant de travailler à ses côtés, son objectif est de « leur faire gravir leur courbe d’apprentissage » afin qu’ils puissent rapidement le seconder. Pour l’heure, sa fille se partage entre le cabinet et son DU d’implantologie à Garancière. Quant à Hugues, il reçoit pour l’instant ses propres patients à mi-temps.

Choix bellifontain

Dès le début de sa carrière, Jean-François Russon, Limousin d’origine, cherche à s’installer près de Paris, « sur un axe sud pour pouvoir facilement rejoindre ma Creuse natale », explique-t-il. Fontainebleau est un bon compromis, « une petite ville de 16 000 habitants (34 000 pour l’agglomération et plus d’une vingtaine de chirurgiens-dentistes), agréable à vivre, avec une forêt magnifique et un contexte historique ». Jeune diplômé, il envoie donc des courriers à des chirurgiens-dentistes proches de la retraite. Un praticien bellifontain lui offre d’exercer à mi-temps dans son cabinet installé au fond de son jardin. En 1987, le jeune praticien reprend la structure, la transforme, crée une société civile de moyens (SCM) puis, en 2002, une société d’exercice libéral à responsabilité limitée* (SELARL). Il exerce dans « ce beau cabinet dont les baies vitrées plongeaient sur un petit jardin » pendant 23 ans. Seul d’abord, puis avec une associée. En 2010, changement de cap. « J’ai décidé de créer un cabinet de référence avec un plateau technique high-tech pour pouvoir accueillir Marie-Charlotte et Hugues, tout en restant dans le même quartier. »

Située à une rue de son ancien cabinet, la Banque de France était fermée depuis 10 ans. L’État l’avait vendue à un groupe bancaire qui cherchait lui-même à la revendre. Le praticien ­bâtisseur visite les lieux, s’y intéresse. Mais, outre l’envergure du projet, de nombreuses difficultés apparaissent. Notamment la structure, soit 1 150 m2 habitables, difficilement transformable : vitres blindées dont 1 cm2 équivaut à 450 kg, treillis soudé à l’intérieur du béton dans le sol, 3 000 € de frais pour retirer les barreaux à chaque fenêtre, 350 000 € pour démonter les coffres-forts au sous-sol… En un mot, il fallait ajouter au prix d’achat plusieurs centaines de milliers d’euros de frais. De plus, le local étant situé dans le périmètre classé de la ville, non loin du château de Fontainebleau, il était indispensable de garder le même style, les mêmes briques, les mêmes soubassements en pierre de taille de Château-Landon… Garder une unité. Un style. Pour Jean-François Russon, rien n’est impossible, il suffit de trouver la solution. Son idée ? Toucher au minimum à la construction, conserver l’esprit et l’histoire du bâtiment, jouer avec le cachet que cela peut apporter, diviser les espaces pour en louer une partie. En bref, réussir une bonne opération et faire naître un cabinet d’exception. « Je suis parti de l’open space qui se trouvait derrière les guichets pour imaginer mon cabinet et des bureaux. J’ai tout pensé, mâché, en traçant mes plans à la craie au sol avant de me décider. Je voulais être sûr de pouvoir en faire quelque chose. » Après 3 mois de constitution de dossier et de plans élaborés avec l’architecte Marc Boethas – spécialisé dans les réalisations en milieu hospitalier –, il récupère les clés et lance les travaux. Résultat ? Son cabinet dentaire, une agence de voyages et un cabinet d’avocat occupent le rez-de-chaussée. À l’étage, il a créé deux appartements de caractère. « Le docteur Russon savait où il allait, ce qu’il faisait », raconte Nathalie, son assistante depuis 17 ans. « Le déménagement s’est fait à la fin du mois d’août 2010, après nos congés. Tout de suite après, nous avons commencé. »

Esprit d’équipe

« J’apprécie le fait de réaliser des actes perceptibles immédiatement, le travail bien fait, mais aussi le contact humain. Le résultat est moteur pour moi, je suis assez pragmatique. » Pour ce sportif, le choix de la dentisterie s’est fait au détriment d’une carrière de footballeur. « J’aime ce qui est manuel, précis et difficile », indique-t-il. Méthodique et réfléchi, ce père de famille passionné et investi travaille selon des protocoles bien définis. Spécialisé en chirurgie implantaire et osseuse, en parodontologie et dans toutes les techniques de restaurations esthétiques, il est également formateur pour Génération Implant – une association de 15 plateformes de formation professionnelle réparties en France – et responsable des plateformes Sud-Île-de-France et Centre de la France. « Je fais beaucoup de traitements globaux et travaille avec des correspondants », spécifie-t-il. La chirurgie occupe 75 % de son activité. Un de ses deux blocs chirurgicaux est attenant à l’ancienne salle de réunion de la Banque de France qu’il a conservée pour ses sessions de formation : une baie vitrée permet d’assister en direct aux interventions chirurgicales. En revanche, c’est à la polyclinique de la Forêt de Fontainebleau qu’il fait ses interventions sous anesthésie générale.

Ses nombreuses activités sont facilitées par la présence de 3 assistantes, Valérie, Nathalie et Elena, et de la secrétaire, Karin. Très organisées et polyvalentes, leur emploi du temps a été pensé pour qu’il y ait un roulement efficace. Il faut dire que Jean-François Russon est levé dès 6 heures du matin, reçoit ses patients de 8 heures à 12 heures, puis de 14 heures à 20 heures. Néanmoins, « il est essentiel de savoir s’arrêter, de connaître ses limites, admet-il. Que le patient de 19 heures soit aussi bien traité que celui de 8 heures. ». Pour cela, orchestration dans le travail, bonne gestion de la transition entre les patients, conduction efficace des séquences de traitement et gestion de la relation avec le patient sont essentielles. Ainsi, le trio familial de praticiens partage les lieux sans encombre et dans un échange constructif. « Chacune de mes assistantes progresse régulièrement en connaissances et en compétences, assure-t-il. Elles suivent différentes formations et, dès qu’un point est perfectible, on en parle. » De fait, Nathalie, diplômée de la Commission nationale de qualification des assistants en odontostomatologie (CNQAOS) de la Nièvre, jongle, comme ses consœurs, entre personnalisation des facettes, couronnes en porcelaine et maquillage de prothèses. « Ici, les soins, les interventions varient. Chirurgie, extractions, implants… tout cela nous permet d’être polyvalentes et rend notre travail intéressant. » Et puis, le nouveau cabinet, beaucoup plus vaste, mieux pensé et mieux organisé que le précédent, apporte plus d’ergonomie. « Nous avons tout sous la main alors qu’avant, c’était plus compliqué. » Rangements optimisés, stérilisation centrale, espace et agencement différents constituent un gain de temps inestimable et plus de plaisir dans le travail.

Équilibre de l’espace

Dès l’entrée, la grande salle d’attente propose des informations diverses sur les soins, les traitements proposés : documents, plaquettes de présentation, films. Les couleurs vives, les tableaux – dont certains sont l’œuvre de l’épouse du praticien –, les objets cassent les lignes parfois strictes de l’architecture, s’amusent avec barreaux et portes blindées. Dans les salles de soins, des documentaires d’aventure s’allient à la musique zen et invitent les patients à se détendre. Une atmosphère à laquelle le jeu des transparences apporte une respiration supplémentaire : panneaux vitrés, chaises transparentes signées Philippe Starck, chez Kartell.

Toutes les salles de soins sont équipées d’un fauteuil Planmeca, « mon fournisseur depuis 20 ans », observe le praticien, avec un système de chariot élévateur et une colonne déportée « qui permet de passer les jambes dessous ». Dans les blocs de chirurgie, les fauteuils thermoformés offrent plus de confort aux patients. Cone beam 3D et radiographie sont de la même marque : « Je suis un showroom de Planmeca », s’amuse-t-il. Le cabinet abrite en tout 6 salles de soins, réparties autour de la stérilisation et consacrées à l’omnipratique, à l’implantologie, à la chirurgie, à la prophylaxie et à l’esthétique. Jean-François Russon n’en démord pas : « Une offre d’accueil et de soins en multispécialités sur un même lieu : l’avenir est là. »

*http://selarl-cabinetdentaire-194ruegrande.chirurgiens-dentistes.fr

ON AIME

Luminaires Art déco, poignées d’origine, angles en laiton entre deux murs, verrières restaurées, issues de secours dont les échelles rappellent les braquages de banques durant les Années folles.