Clinic n° 09 du 01/09/2016

 

ÉQUIPE ET ESPACE

Catherine Faye  

Le cabinet dentaire de Taissy (55), au sud-est de la banlieue rémoise, est un bel exemple de cohésion professionnelle et humaine. Complémentaires, les quatre praticiens qui y exercent ont à cœur de mettre leur savoir-faire au service d’une patientèle fidèle, dans une atmosphère familiale animée d’un esprit de solidarité constant.

À moins d’une dizaine de kilomètres à vol d’oiseau du célèbre Ange au Sourire sculpté sur la façade principale de la cathédrale de Reims, d’autres sourires s’affichent une fois franchie la porte d’entrée. Des sourires cordiaux et de circonstance dont l’équipe du cabinet dentaire de Taissy peut s’enorgueillir. Car s’il est une chose qui prévaut dès l’accueil, ainsi que d’une salle de soins à l’autre, c’est bien la bonne humeur. Jeunes et motivés, les quatre chirurgiens-dentistes associés, secondés par quatre assistantes, ont su inventer un style propre dans leur façon de concevoir l’exercice dentaire comme dans leur façon de travailler : ensemble et avec simplicité. L’agencement du cabinet est à leur image, ouvert, lumineux et coloré, les salles de soins communiquant les unes avec les autres, toutes portes ouvertes, comme pour asseoir une confiance mutuelle et installer un flux d’échanges aussi bien techniques qu’amicaux. Au cœur du cabinet de 185 m2, la stérilisation est accessible depuis deux des trois salles de soins, ainsi que depuis l’accueil, tandis que, nichée dans les toilettes, une vitrine abritant une collection de boules à neige rapportées de tous les coins du monde – un rituel pour toute l’équipe – fait figure de porte-bonheur. Le ton est donné. Pas d’ostentation, une atmosphère détendue rehaussée d’une pointe d’humour : le patient se sent à l’aise.

Dans les starting-blocks

Installée dans une construction récente, sur une départementale filant à travers vignes et exploitations viticoles, la structure est le fruit d’une histoire quasi décennale qui prend sa source à une rue de là, dans l’ancien cabinet dentaire de Philippe Ternant, retraité depuis fin 2015. C’est lui qui propose en 2008 à Delphine Le Héron – la première à entrer dans cette aventure – de s’associer, à parts égales. Ayant obtenu sa thèse en 2005 à la faculté d’odontologie de Reims, elle accepte et commence à exercer en binôme avec lui – avec l’assistance d’un collaborateur une fois par semaine – dans la petite commune de la vallée de la Vesle, « un village attrayant de la banlieue de Reims ». Une formule qui vient à point nommé pour elle, après plusieurs collaborations et remplacements dans la région. Mais l’idée de Philippe Ternant est déjà de s’agrandir : il a en ligne de mire des cellules commerciales situées non loin de son cabinet, au rez-de-chaussée d’un immeuble d’un étage, sur la route qui mène de Reims aux nombreuses maisons de champagne. Faciles d’accès, elles disposent de plusieurs places de parking devant la façade. Sans perdre de temps, il décide d’en acheter quatre, de quoi laisser le champ à de nouveaux projets et accueillir un collaborateur cette fois-ci à plein temps. Architecte et installateur dentaire de la région s’attellent alors à faire du plateau vide un cabinet, avec pour consigne d’aligner salles de soins et stérilisation de façon à pouvoir circuler de l’une à l’autre de façon transversale et de transformer les vitrines commerciales en larges baies vitrées. Orientés plein sud, les trois fauteuils, signés Adec, bénéficient ainsi de lumière aux beaux jours. La salle de chirurgie est quant à elle prévue pour plus tard, côté nord, à côté de la salle de radiographie abritant un cone beam Carestream Dental, et ne sera équipée qu’en 2013, avec stérilisation attenante rien que pour elle. Pour la décoration, Delphine Le Héron a carte blanche. Son idée ? De la couleur et « que l’espace ne fasse pas médical ». Ainsi, salle d’attente et accueil, bordés de panneaux vitrés, font la part belle à du gris zinc, du rose fuchsia, du bleu turquoise. Aux murs, des tableaux pleins de gaieté, qu’elle a peints elle-même. L’atmosphère s’habille d’un air de fête tandis que les deux associés essuient quelques difficultés et retards. Qu’à cela ne tienne, le nouveau cabinet ouvre ses portes fin 2008.

Un air de famille

Romain Onraedt arrive en mars 2009, en stage actif de 6e année. Ses parents habitant le village d’à côté, il connaît le cabinet dont il est lui-même patient. Un lien amical se tisse entre les chirurgiens-dentistes. « On ne l’a jamais laissé repartir », s’amuse la praticienne. De fait, alors qu’elle part en congé maternité, elle lui propose d’effectuer son remplacement. Puis, en 2011, le binôme de départ lui offre de s’associer, à un tiers chacun, au sein d’une société civile de moyens (SCM). « Voilà pourquoi je n’ai jamais travaillé en ville. Mais c’est sans regret ! » assure celui pour qui l’art dentaire permet de concilier minutie, plan de traitement et suivi jusqu’au résultat final : un exercice où se conjuguent architecture, maîtrise d’œuvre et installation. Pour lui, c’est avant tout « le plaisir d’accompagner, de conseiller et de soigner le patient du début à la fin, de participer à tout le processus ». Il faut dire que la patientèle du cabinet, un mélange de citadins et de ruraux exerçant pour un certain nombre dans l’industrie du champagne, ne recule pas devant les soins bucco-dentaires et n’hésite pas à suivre les plans de traitement proposés. Voilà le binôme transformé en trio et la collaboration confiée à Marine Bartolino dans la foulée de son stage actif déjà effectué dans le cabinet. Jusqu’en 2013, où Louis Le Héron, l’époux de Delphine, vient à son tour effectuer son stage actif dans le cabinet. Il n’a rien d’un débutant et son parcours est à l’aune de sa pugnacité. En effet, ce petit-fils d’obstétricien et fils de chirurgiens-dentistes, au caractère bien trempé, a commencé sa carrière dans la médecine avec une perception spécifique : la médecine d’intervention. Mais, à l’issue de ses études auxquelles s’ajoutent un master de recherche et un double doctorat, la complexité du système français ne lui donne pas la possibilité de satisfaire ses ambitions. Qu’à cela ne tienne, il décide alors de changer de cap, mène de pair remplacements dans des cabinets de médecine générale et études odontologiques, profitant de la passerelle qui lui est offerte d’entrer directement en 3e année. « Mon objectif était de pouvoir m’autodéterminer, de faire du soin d’intervention, dont des actes chirurgicaux, et de rendre service au patient dans une relation de proximité. » Ayant obtenu sa thèse en 2015, il intègre alors l’équipe en remplacement de la collaboration de Marine qui, elle, a d’autres projets. Sa connaissance des pathologies médicales est un plus, il se voit confier les patients avec des pathologies lourdes, les prises en charge sensibles. « Louis a un regard sur le soin que nous n’avons pas », assure Romain Onraedt. Le cabinet trouve sa vitesse de croisière… jusqu’à l’approche du départ à la retraite de Philippe Ternant. Il faut lui trouver un remplaçant.

Quatuor gagnant

C’est à ce moment-là que Marine, ne voyant pas le bout de la création de la maison médicale qu’elle doit intégrer, rejoint de nouveau l’équipe que des liens amicaux soudent, chacun apportant sa touche : Delphine, l’énergique, Romain, le modérateur, Louis, le solutionneur, Marine, la force tranquille. Le capitaine quittant le navire, une décision s’impose. L’issue est vite trouvée. Début 2016, la nouvelle association voit le jour, regroupant les quatre praticiens, chacun détenant 25 % des parts. « Il fallait intégrer tout le monde, même avec trois fauteuils », raconte Delphine qui partage désormais le sien, « le fauteuil des filles », avec Marine. Dès lors, le quatuor reçoit une patientèle que le bouche à oreille ne cesse d’accroître. Louis et Romain se consacrent notamment à l’implantologie, Delphine et Marine, plus volontiers à la pédodontie, mais tous se partagent, quatre jours par semaine, les prises en charge de ce cabinet d’omnipratique convivial. Un cabinet de proximité, de qualité et d’évolutivité en fonction de la demande locale, où Laurence, Mélanie, Kelly et une seconde Marine, les assistantes, passent d’un fauteuil à l’autre, sans praticien attitré, et peuvent aussi bien s’occuper de la stérilisation que des tâches administratives. Un cabinet, enfin, où « on circule de salle de soins en salle de soins, où on se parle d’un fauteuil à l’autre, en riant et en échangeant ». Et où se rendre service n’est pas un vain mot pour le quatuor qui exerce désormais main dans la main.

On aime !

La nature omniprésente, à travers les baies vitrées et par touches dans tout le cabinet : buis, orchidées, tableaux fleuris, stickers muraux.