Clinic n° 05 du 01/05/2016

 

PRESSE INTERNATIONALE

NOTRE SÉLECTION

Contexte

Quand un patient présente un trouble du sommeil, le dentiste doit être préparé à collaborer avec des praticiens d’autres spécialités et disciplines pour lui prodiguer le traitement le plus efficace possible. Les écoles dentaires offrent de plus en plus de cours sur le sommeil dans leurs programmes initiaux et dans leurs formations continues. Les structures professionnelles de médecine dentaire et du sommeil permettent aussi de diffuser à différentes occasions...


Contexte

Quand un patient présente un trouble du sommeil, le dentiste doit être préparé à collaborer avec des praticiens d’autres spécialités et disciplines pour lui prodiguer le traitement le plus efficace possible. Les écoles dentaires offrent de plus en plus de cours sur le sommeil dans leurs programmes initiaux et dans leurs formations continues. Les structures professionnelles de médecine dentaire et du sommeil permettent aussi de diffuser à différentes occasions des informations sur le sommeil auprès des omnipraticiens. Un sommeil troublé affecte négativement la qualité de vie, l’état de santé générale, la satisfaction de vie, l’humeur et la performance au travail. Les symptômes des troubles du sommeil comprennent une somnolence diurne excessive, une fatigue, des maux de tête matinaux et des défauts d’apprentissage et d’attention. Les troubles du sommeil peuvent être influencés par la morphologie cranio-faciale ; ainsi, modifier la structure maxillo-faciale et la fonction orale peut améliorer le sommeil. Les interactions entre le sommeil et les divers problèmes de santé orale ainsi que les principes de prise en charge de ces situations ont été discutés.

Problèmes de santé buccale

Les principaux problèmes de sommeil et de santé orale sont les apnées obstructives du sommeil, la respiration buccale chronique et le bruxisme du sommeil. L’édentation peut aussi influer sur les troubles du sommeil.

Dans les apnées obstructives du sommeil, les patients cessent complètement de respirer en raison d’une obstruction des voies aériennes supérieures pendant des durées variées. De plus, ils souffrent d’une respiration et d’un flux d’air réduits (éveil lié à un effort respiratoire, ou, selon le sigle anglais, RERA pour respiratory event-related arousal) qui les réveillent. Le diagnostic d’apnées obstructives du sommeil est fondé sur les symptômes et sur une étude du sommeil qui révèlent un indice d’apnées hypopnées ou un indice de perturbation respiratoire de plus de 5 événements respiratoires par heure de sommeil. Le désordre affecte environ 2 % des femmes, 4 % des hommes et de 1 à 4 % des enfants. La prévalence peut atteindre 50 % chez les adultes plus âgés. La cause est probablement liée à des déficits anatomiques transversaux des voies aériennes supérieures, des modifications de compliance des parois des voies aériennes supérieures et un contrôle neurophysiologique altéré des muscles des voies aériennes supérieures. Les facteurs qui contribuent ou entretiennent les apnées obstructives du sommeil sont l’âge, l’obésité, un déficit neurologique, des réflexes respiratoires anormaux, l’alcool et le tabac. La qualité de vie et la fonction cognitive peuvent être altérées et les patients ont un risque accru de nycturie, d’hypertension et de maladies cardio-vasculaires. L’utilisation nocturne de la pression positive continue (PPC) pour physiquement garder les voies aériennes supérieures ouvertes est le premier traitement proposé, mais la compliance est loin d’être idéale. La PPC peut être remplacée par le dispositif d’avancée mandibulaire qui est prescrit par les spécialistes du sommeil. Ces dispositifs ne sont pas indiqués pour les patients souffrant aussi de désordres temporo-mandibulaires, ceux qui ne peuvent pas suffisamment avancer la mandibule, ceux qui ont une obstruction nasale et ceux qui ont des apnées sévères ou centrales du sommeil. Les appareils oraux peuvent aussi être combinés avec la PPC. Pour les cas les plus sévères, la chirurgie peut être utile et peut améliorer les symptômes, même si l’apnée du sommeil ne disparaît pas complètement. Les chirurgies les plus fréquentes sont l’avancée maxillo-mandibulaire, l’avancée génienne, la suspension hyoïde et l’uvulo-palato-pharyngoplastie. Une amygdalectomie peut être réalisée chez les enfants. Un traitement orthodontique peut être requis pour corriger les relations occlusales, aider à repositionner la langue et améliorer la déglutition. La croissance cranio-faciale et la posture associée peuvent toutes deux être altérées par la respiration buccale. La position plus basse de la mandibule provoque une diminution du tonus musculaire oro-facial. Une rétrognathie du maxillaire et de la mandibule est aussi possible. Divers traitements orthodontiques ou chirurgicaux peuvent rétablir une respiration nasale, en fonction des endroits où le passage aérien est réduit. Une expansion maxillaire orthodontique rapide peut améliorer la respiration nasale en réduisant la résistance et en augmentant le volume des fosses nasales.

Le reflux gastro-œsophagien lié au sommeil accompagne souvent les apnées obstructives du sommeil : environ 60 % des adultes rapportent des symptômes apparaissant au moins une fois par an et jusqu’à 20 % une fois par semaine. Le reflux gastro-œsophagien nocturne est associé à une forme particulièrement sévère de reflux. Les causes peuvent être une pression faible du sphincter œsophagien ou un stress intragastrique. Les activités électroencéphalographiques pendant le reflux ont été documentées et la clairance acide prend plus de temps pendant le sommeil que pendant l’éveil; les apnées obstructives du sommeil et le reflux gastro-œsophagien partagent des facteurs de risque communs comme l’obésité et la position couchée sur le dos. La PPC peut alléger le reflux gastro-œsophagien chez les patients avec apnées obstructives du sommeil. Les problèmes de santé buccale liés au reflux gastro-œsophagien comprennent l’érosion dentaire et des problèmes chroniques de la gorge comme un enrouement, un mal de gorge, une laryngite chronique, des difficultés d’élocution, une toux et des granulomes sur les cordes vocales. Un œsophage de Barrett peut se développer si aucun traitement n’est apporté : cette maladie est fortement associée à l’adénocarcinome œsophagien. L’ORL est le référent privilégié pour ces patients qui ont besoin d’une modification de leur style de vie, d’une médication et/ou d’une chirurgie.

L’activité rythmique des muscles masticatoires (ARMM) apparaît chez 60 % des patients au sommeil normal mais le bruxisme du sommeil est une forme exacerbée de l’ARMM normale pendant le sommeil qui inclut une fréquence plus élevée de mouvements, des contractions électromyographiques plus fortes et des bruits de grincement des dents. Le bruxisme du sommeil peut causer une usure anormale des dents, des douleurs dentaires, une douleur des articulations temporo-mandibulaires et des maux de tête. Les schémas de grincement en latéralité et en protrusion peuvent affecter négativement le niveau d’attache gingivale en clinique et provoquer une mobilité dentaire, des lésions cervicales non carieuses et une hypersensibilité. Le bruxisme du sommeil affecte non seulement le patient mais également le conjoint partageant son lit.

Les facteurs de risque pour le bruxisme du sommeil couvrent un large éventail, allant de facteurs psychologiques, douleurs des articulations temporo-mandibulaires, médications et drogues récréatives aux problèmes médicaux. Le bruxisme du sommeil est diagnostiqué sur la base d’un antécédent de grincements dentaires rapporté par le conjoint, une observation clinique d’usure dentaire anormale et de douleurs ou d’une fatigue des muscles de la mâchoire.

L’évaluation oro-faciale comprend l’évaluation de l’usure dentaire, de l’indentation de la langue, des marques de morsure sur la face interne de la joue, des craquements des articulations temporo-mandibulaires et de l’hypertrophie du muscle masséter pendant l’occlusion forcée. Les praticiens peuvent gérer ces patients avec des changements de style de vie et d’hygiène de sommeil, des appareils occlusaux pour empêcher les dommages bucco-dentaires et des appareils d’avancée mandibulaire.

Gestion

Une équipe pluridisciplinaire est la mieux armée pour apporter les soins nécessaires aux troubles du sommeil liés à la santé orale. L’équipe comprend généralement un ou plusieurs spécialistes du sommeil et des spécialistes de la santé orale, comme un dentiste, un orthodontiste ou un chirurgien maxillo-facial.

APPLICATION CLINIQUE

Les dentistes omnipraticiens et spécialistes en prothèse dentaire sont qualifiés pour traiter les apnées obstructives du sommeil sur les recommandations d’un médecin du sommeil et peuvent gérer les divers appareils oraux. Les patients devraient être prévenus qu’il leur faut avoir une bonne hygiène aussi bien orale que du sommeil. Les dentistes devraient choisir l’appareil oral approprié en se fondant sur la présence potentielle ou l’absence de ronflements et d’apnées du sommeil. Si la chirurgie est nécessaire, elle est souvent précédée et suivie d’un traitement orthodontique pour assurer un repositionnement réussi et stable. Les enfants sont souvent pris en charge de façon appropriée par les orthodontistes. Un contrôle réussi des désordres du sommeil a le potentiel de réduire les risques de diabète, d’hypertension, d’infarctus, d’accident vasculaire cérébral, d’arythmie et de mort prématurée.