SOCIÉTÉ
INTERNET
Souvent des expressions sont utilisées sans trop s’interroger sur ce qui a conduit à leur adoption. Essayons de voir ce que recouvrent les notions de « réalité virtuelle » ou de « réalité augmentée ».
Depuis que l’informatique s’est imposée dans notre quotidien, nous sommes familiarisés avec la possibilité de visiter et d’interagir avec des univers virtuels. Ces applications popularisées avec les jeux vidéo sont aussi devenues incontournables dans différents domaines comme ceux de l’architecture ou de l’éducation. Si les simulateurs de vol ont été les pionniers, l’enseignement des gestes en chirurgie dentaire dispose à présent aussi de ses propres solutions, à l’instar de celle mise au point par Virteasy(1).
Parallèlement au développement de la réalité virtuelle, un autre domaine n’a cessé de prendre de l’importance, c’est celui de la réalité augmentée. La démarche est tout autre puisqu’il s’agit de compléter notre perception du monde réel par des données virtuelles. Cette combinaison doit se faire en temps réel et dans un repère à trois dimensions. Il faut pour cela un système de capture de l’environnement comme une caméra. Il faut également un ordinateur capable d’identifier et de localiser la scène puis d’accéder à des données, afin de les associer de manière pertinente aux éléments capturés. Enfin, le tout doit être restitué en temps réel à l’observateur, généralement par le biais d’un écran.
La réalité augmentée a donné lieu à plusieurs applications en médecine. La plupart visent à apporter une aide au chirurgien en lui permettant d’enrichir son champ de vision avec des images issues d’examens radiologiques ou d’IRM préalables. C’est ce qui est mis en pratique au Service de neurochirurgie du CHU de Nancy en collaboration avec l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA)(2), pour de délicates interventions après rupture d’anévrisme cérébral. Dans le domaine dentaire, plusieurs projets tournent autour de l’utilisation de l’imagerie CBCT (cone beam computed tomography) en réalité augmentée. Une thèse présentée à Strasbourg en 2014 propose une expérience de positionnement d’un modèle numérisé issu d’un scanner sur le visage d’un sujet(3). L’auteur aborde les difficultés techniques posées par l’intégration des images numérisées, leur positionnement ainsi que le rendu des couleurs et de la lumière. Il balaie également l’ensemble des applications de réalité augmentée envisageables en dentisterie, de la chirurgie à l’orthodontie, sans oublier l’enseignement et l’apprentissage des techniques.
Le développement de l’Internet mobile s’est accompagné d’une multiplication des applications de réalité augmentée à destination du grand public. En effet, les ordiphones sont de véritables ordinateurs qui disposent de tous les éléments : écran, caméra, GPS, accès aux données par l’Internet. Plusieurs enseignes dans les domaines les plus divers proposent des solutions pour visualiser des lunettes sur son nez ou des meubles dans son intérieur(4). Des sites culturels comme le château de Versailles ou le musée d’Orsay offrent des visites enrichies par des applications de ce type.
En fin de compte, peut-on parler de réalité augmentée ? L’allégorie de la caverne est curieusement remise au goût du jour. Si, pour Platon, nos sens ne nous permettent d’accéder qu’à une interprétation du monde réel, alors l’augmentation de nos sens par des données numériques ne nous permet qu’une interprétation augmentée de la réalité. Une quasi-réalité, qui est le véritable sens de virtual reality en anglais. Nous voici revenus au point de départ.
(1) Virteasy-dental : http://www.hrv-simulation.com/virteasy-dental/virteasy-dental-savoir-plus.html
(2) Inria – Chirurgie : quand la réalité augmentée s’en mêle : http://www.inria.fr/actualite/actualites-inria/chirurgie-quand-la-realite-augmentee-s-en-mele
(3) Jenny Alexis. Réalité augmentée – intérêts cliniques et pédagogiques en chirurgie dentaire : http://ra.codeix.fr/
(4) Application catalogue Ikéa : http://www.ikea.com/ms/fr_FR/france/appli_catalogue_2015.html