ENDODONTIE
Si l’arrivée en endodontie du mouvement de réciprocité a fait l’effet d’une bombe il y a 2 ans, les choses se sont un peu tassées aujourd’hui.
L’Allemand VDW propose, ce n’est plus un scoop, son dernier moteur Reciproc Gold, très semblable au Silver, mais équipé d’un localisateur d’apex intégré. Comme dit précédemment, le Français Ionyx commercialise un tout nouveau combiné moteur-contre-angle sans...
Si l’arrivée en endodontie du mouvement de réciprocité a fait l’effet d’une bombe il y a 2 ans, les choses se sont un peu tassées aujourd’hui.
L’Allemand VDW propose, ce n’est plus un scoop, son dernier moteur Reciproc Gold, très semblable au Silver, mais équipé d’un localisateur d’apex intégré. Comme dit précédemment, le Français Ionyx commercialise un tout nouveau combiné moteur-contre-angle sans fil à contrôle de couple et système auto-reverse, l’Endy NT2 (fig. 37), ainsi que le Suisse FKG qui dévoile son Rooter. Le moteur du NT2 peut tourner à la vitesse de 250 à 1 200 tr/min, un exploit pour ce type d’équipement. Micro-Mega, qui fait maintenant partie du groupe Sanavis, expose sa lime unique, la One Shape, ainsi que, pour la pénétration initiale du canal, les G-Files que nous connaissons depuis l’année dernière. Tout en conservant son WaveOne en réciprocité, Dentsply Maillefer fait évoluer ses ProTaper avec une toute nouvelle version appelée Next. Si l’allure générale de ces instruments ressemble beaucoup à celle des Universal, avec bague de couleur et manche doré – un peu plus court cependant –, le reste est radicalement différent. Le métal est du M-Wire, nickel-titane amélioré par traitement thermique, plus résistant à la fatigue cyclique. La section de l’instrument n’est plus triangulaire mais rectangulaire excentrée, ce qui lui donne un peu l’aspect d’une colonne baroque torsadée comme celles de l’autel de Saint-Pierre de Rome (fig. 38). Signe prémonitoire en cette semaine d’élection du nouveau pape ? L’ambition avouée du système est, entre autres, d’améliorer la résistance mécanique, sans perdre en souplesse. Le mouvement de la lime en rotation est dénommé weggering, ce qui signifie littéralement plastronner, faire le fanfaron. Une lime endodontique « qui se la pète », il y a mieux comme image de marque, non ? En fait, il s’agit plutôt d’un mouvement de reptation, comme celui des G.I. passant, à l’entraînement, sous un rideau de fils de fer barbelés. J’ai eu l’occasion d’essayer le système sur un canal en plastique. La séquence est simplifiée par rapport aux ProTaper Universal. Si le canal est fin, on l’explore à la lime 10 manuelle, puis on peut utiliser les PathFiles P1 et P2 respectivement de 13 et 16/100e pour amorcer l’élargissement en rotation continue. Ensuite, on passe aux ProTaper Next : le premier (X1), à bague jaune, mesure 17/100e à la pointe avec une conicité de 4 %. Le second (X2), bague rouge, est un n° 25 avec une conicité de 6 % à l’extrémité. Il existe également une lime bleue (X3), n° 30 en 7 %. Mais si les Finishing Files des ProTaper Universal affichaient une conicité de 7, 8 et 9 % sur leurs 3 derniers millimètres, les 4, 6 et 7 % des Next constituent une sérieuse rétrogradation. Comment vont se justifier les promoteurs de la première heure des ProTaper, méprisants à l’égard des autres marques qui se contentaient d’un petit 6 % ? Sur le canal en plastique, fortement coudé à l’extrémité, j’ai achevé la préparation très rapidement avec seulement les X1 et X2. La forme terminale était parfaite, régulière, sans la moindre déformation ou le plus infime déport du foramen et, bien sûr, aucune fracture instrumentale. Les spires terminales des ProTaper Next sont extrêmement rapprochées mais la lime est, dans l’ensemble, plus souple et, je trouve, plus agréable que les ProTaper Universal. En revanche, j’ai perçu une nette sensation d’aspiration dans le canal, qui ne m’a pas gêné, mais dont je sais qu’elle n’est pas toujours appréciée des praticiens. Je vous en dirai plus une fois que j’aurai testé cet intéressant produit sur plusieurs dents naturelles. Pour l’heure, il m’a paru plutôt séduisant, car utilisable finalement sur n’importe quel moteur en rotation continue. Les X1, X2 et X3 sont conditionnés sous blister stérile exactement comme les limes en réciprocité. On ne les considérera pas forcément, en revanche, comme des instruments à usage unique, même si le fabricant pousse dans ce sens : leur bague ne se déforme pas à la chaleur, ce qui autorise plusieurs stérilisations successives. Leur prix étant quasi identique à celui des WaveOne, environ 17 € l’instrument, l’investissement sera facilement amorti après 2 ou 3 utilisations.
Chez les concurrents, les propositions ne sont pas inintéressantes. Komet nous promet un nouveau système, avec limes plus souples, le F360, mais ce n’est pas pour tout de suite. En revanche, Sybron Endo, filiale de Kerr, présente un système complet parfaitement abouti. Le TF Adaptive se compose d’un tout nouveau moteur piloté par un assez volumineux boîtier équipé d’un écran à affichage numérique et de deux séries de 3 limes rotatives fortement inspirées des Twisted Files en Ni-Ti torsadé (fig. 39 et 40). Le système est assez particulier : la lime tourne normalement dans le sens des aiguilles d’une montre mais, quand elle rencontre une résistance, elle se met à travailler en sens inverse et, finalement, effectue ce fameux mouvement de réciprocité de 370° dans un sens, et jusqu’à 50° dans l’autre. Les instruments, qui possèdent une bague rouge, jaune ou verte selon leur diamètre nominal, sont rassemblés en deux séries, l’une pour les canaux étroits, l’autre pour les larges. Avouons-le, tout cela engendre une certaine confusion qui ne simplifie pas vraiment les choses, notamment dans les cas de molaires avec un canal large et les deux autres calcifiés.
Le mouvement de réciprocité, tout le monde est techniquement capable de le proposer sur un moteur sans charbons à commande électronique. Mais il semble que les brevets déposés n’autorisent pas tous les fabricants à le commercialiser. Et si l’on se trompait, après tout ? Si la réciprocité n’était qu’un épiphénomène voué à disparaître aussi rapidement qu’il est survenu ? Si les limes Reciproc sont à ce point efficaces, cela résulte peut-être autant de leur profil, de leur alliage et de leur durée d’utilisation limitée que de leur mouvement spécifique. Lorsque l’on sait que toutes les limes en rotation, continue ou pas, cassent plus ou moins vite, on est en droit de se poser quelques questions. Déjà trois études publiées en 2012 dans l’International Journal of Endodontics et le Journal of Endodontics ont démontré une résistance à la fracture de cette lime supérieure à celle des WaveOne et des ProTaper.
Qu’à cela ne tienne : le Français Acteon, lui, n’a peur de rien ! Il nous offre une version relookée de son moteur EndoDual (fig. 41) et même un combiné moteur d’un côté, générateur d’ultrasons de l’autre pour servir de station complète pour l’endodontie (EndoCenter) (fig. 42). Le moteur permet une multitude de réglages, dont celui du degré de rotation à droite ou à gauche. Avec le représentant de la marque sur le stand, j’ai pu tester cela sur un canal dans un bloc de plastique. Le mouvement semble assez voisin de celui du Reciproc, mais il est très difficile de le vérifier car on le perçoit à peine à l’œil nu. Seul le léger cliquetis de la lime semble l’indiquer. Malheureusement, l’unique instrument disponible à ce moment-là avait déjà tellement servi qu’il ne pénétrait même plus dans le plastique pourtant bien tendre du bloc de simulation. Une seule certitude donc : essai d’efficacité non concluant mais preuve évidente que la rotation ainsi programmée ne provoque aucune rupture de lime ! Toujours en ce qui concerne les moteurs, le Suisse Bien-Air, généralement très sage, s’est lâché cette fois-ci. Son excellent système Optima est maintenant pilotable grâce à un iPod (fig. 43). Une application permet de contrôler la vitesse et le torque pour plusieurs types d’instruments endodontiques. Il suffit de caresser l’écran tactile d’une manière appropriée pour sélectionner les réglages. Jolie présentation, mais je ne suis pas sûr que le chirurgien-dentiste de base, pressé d’arriver au but, soit vraiment intéressé par ce joujou pour geeks postpubères.
L’endodontie, ce n’est pas seulement la préparation mécanique du canal, c’est aussi l’irrigation et la désinfection.
La seule nouveauté dans ce domaine qui ait attiré mon attention cette année, c’est le système Nanotech Endo de la société polonaise DNT (Dental Nanotechnology) (fig. 44). Soyons clairs : si j’ai pu le découvrir, ce n’est pas en visitant, au petit bonheur la chance, les stands les uns après les autres. Ni en consultant les revues ToDay ou Dental Tribune bourrées de communiqués, distribuées à l’entrée de l’exposition. Encore moins en consultant les dossiers de presse dans le local réservé aux journalistes. Aucune annonce de cet appareil n’a été faite nulle part, car la société semble encore bien modeste. Non, j’ai simplement découvert cette compagnie en effectuant une recherche sur l’irrigation canalaire sur la Toile il y a plusieurs mois. Contacté par téléphone, l’un de ses responsables m’a répondu que le dispositif, pour l’instant commercialisé seulement en Pologne, serait exposé à l’IDS. Le Nanotech Endo est constitué d’une pièce à main en plastique au bout de laquelle on fixe une aiguille d’irrigation canalaire. Un flux continu de solution – contenue dans une poche à perfusion – est amené, via un tuyau de plastique, jusqu’à l’aiguille grâce à une pompe électrique abritée sous un gros boîtier placé sur le plan de travail. On règle le débit à l’aide d’un bouton sur le panneau de contrôle. Un autre tuyau, sous le premier, est branché, lui, sur l’aspiration chirurgicale et sert à évacuer le trop-plein de liquide. L’aiguille est rétractable grâce à un petit curseur que l’on actionne avec l’index, sur le dessus de la pièce à main. Elle est au centre de l’embouchure du dispositif par laquelle est réaspiré le liquide d’irrigation. Les vidéos visibles sur YouTube sont éloquentes : le liquide est entièrement récupéré par le dispositif, rien ne coule en dehors de la dent. On peut même, si l’on est très vilain, travailler sans digue, certain de ne pas faire avaler la moindre goutte d’hypochlorite au patient. Le très sympathique représentant de la société m’a fait une démonstration du système sur le stand Nouvag, compagnie suisse qui fabrique la pompe électrique du Nanotech Endo. Je l’ai également expérimenté moi-même. Au-delà de l’inconfort dû au montage approximatif sur le stand, l’efficacité m’a paru plutôt concluante. Même pour les racines orientées vers le haut, afin de simuler le travail sur une molaire supérieure, le liquide est bien conduit dans le canal et ne coule pas au dehors. Reste que la pièce à main semble un peu fragile et nécessite une manipulation pas très pratique pour changer l’aiguille.