Clinic n° 12 du 01/12/2012

 

CHRONIQUE D’EXPERT

M. V. a un accident de moto ; il fait une chute sur un rond-point, se relève seul et ne souffre que de dermabrasions.

Selon ses dires, quelques jours plus tard il constate des maux dentaires. Il se rend chez son praticien traitant qui rédige un certificat précisant :

« Je soussigné, Docteur D., certifie avoir reçu M. V. le mardi 10 mars, pour une consultation, à la suite de son accident du 1er mars 2012.

Après examen clinique confirmé par un contrôle radiologique, nous lui avons proposé le plan de traitement suivant :

• démontage du bridge actuel,

• extraction des racines cassées en raison de l’accident, puis remplacement de celles-ci par des implants. Nous lui avons remis un devis chiffré. »

Le devis, d’un montant global de 7 270 euros, prévoit l’extraction des 11 et 21, le remplacement des 11, 21 et 22 par leur adjonction sur le stellite en place provisoirement, puis la mise en place de 3 implants en position de 11, 21 et 22, et de 3 prothèses implantoportées sur ces mêmes dents.

Lors de notre examen, nous trouvons un bridge de 8 dents allant de la 15 à la 23, avec des attachements distaux supportant un stellite de 6 dents.

Nous trouvons une légère mobilité de l’ensemble prothétique avec un mauvais état parodontal et des poches de l’ordre de 5 mm.

L’examen radiologique montre une fonte osseuse importante mais aucune trace radiologique de fracture radiculaire.

Notre mission était clairement définie par l’assureur : « Vérifier l’imputabilité des dommages dentaires à l’accident de moto déclaré, notamment vérifier si un état antérieur ne préexistait pas. »

Il nous était donc impossible de conclure que la mobilité du bridge et les douleurs évoquées étaient imputables à l’accident et, dans un souci déontologique, nous nous en sommes expliqués par téléphone avec le praticien.

EN PRATIQUE

• Rédigez des certificats dans lesquels aucune ambiguïté ne doit apparaître.

• Soyez précis : écrire « extraction des racines cassées » sans préciser lesquelles laisse trop la place à une interprétation subjective.

• Vos certificats sont le reflet de votre professionnalisme : ils vous servent de vitrine et vous devez donc soigner leur rédaction.

• Les patients font facilement un lien de causalité entre un accident et des problèmes dentaires, surtout quand cela les arrange. Évitez de tomber dans le piège qui consiste à rentrer dans leur jeu, ce qui vous décrédibilise aux yeux des assureurs qui ne sont pas naïfs.

• Enfin, rappelez-vous certains articles du Code de déontologie :

— article R. 4127-213, « Il est interdit d’établir un rapport tendancieux ou de délivrer un certificat de complaisance » ;

— article R. 4127-221, « Sont interdits :

– tout acte de nature à procurer à un patient un avantage matériel injustifié ou illicite,

– toute ristourne en argent ou en nature faite à un patient,

– tout versement, acceptation ou partage de sommes d’argent entre des praticiens ou entre des praticiens et d’autres personnes sous réserve des dispositions propres aux sociétés d’exercice en commun de la profession,

– toute commission à quelque personne que ce soit. »

La lecture ou relecture attentive de ce code pourra vous éviter bien des pièges, surtout par les temps qui courent où les patients n’hésitent plus à engager des procédures dans l’espoir de gagner quelques sous.