Elles comptent, en Suisse

Ces limes sont apparues comme un OVNI dans le paysage endodontique. Périodiquement, les vépécistes nous proposent de nouveaux produits de marques connues, ou bien dont on devine immédiatement l’origine. Rien de tout cela ici : vendues uniquement chez Mega Dental, elles affichent en petits caractères, sous la plaquette « Swiss made ». Aucune information n’est disponible à leur sujet sur le Net. La notice d’utilisation mentionne une seule étude, effectuée à l’université de Zurich.

Une séquence simple

L’assortiment de base comporte quatre instruments en nickel-titane, tous de 25/100^e à la pointe, mais de longueur et conicité différentes. Leur profil est assez étrange : on dirait des limes H aux spires très espacées. La qualité de fabrication est exemplaire : les lames, brillantes, semblent avoir subi un polissage électrolytique effaçant presque totalement les stries d’usinage. La technique de préparation proposée est simple : du crown-down pur et dur. Tout cela, bien sûr, une fois le canal exploré sur toute sa longueur à l’aide de limes K10 et 15.

Identification aisée

Les deux limes rotatives de pénétration sont courtes – 19 mm – avec une partie travaillante de 8 et 9 mm respectivement. La première a une conicité de 10 %, la seconde de 8 %. Elles servent à élargir l’entrée du canal pour un abord plus rectiligne de sa partie cervicale. Les deux dernières, longues de 25 mm et 6 et 4 % de conicité, permettent de préparer la partie médiane puis apicale de la racine. Une fois l’opération accomplie, on peut, si le canal n’est ni trop long ni trop courbé, tenter l’élargissement jusqu’à la conicité 0.8 le plus loin possible. La bague sur le manche de ces quatre instruments étant rouge, c’est la couleur du stop en caoutchouc qui permet de les distinguer, selon le code ISO bien connu : rouge 4 %, bleu 6 %, vert 8 % et noir 10 %. Leur capacité de coupe est excellente : elles forment une quantité de gros copeaux qu’il faut veiller à éliminer par une irrigation abondante. L’angle des lames étant assez fermé, l’instrument s’encrasse rapidement et s’avère un peu difficile à nettoyer. Testées sur dents extraites, ces limes m’ont surpris par leur efficacité. L’instrument progresse rapidement au début puis émet de petits cliquetis lorsqu’il force un peu. Quand on tient la dent dans la main, cela n’est guère impressionnant. Mais en bouche, on est rapidement tenté, en pareil cas, de « lever le pied ».

Comme les autres

Plus prudent lors de mes essais sur patients, j’ai constaté une mise en forme un peu laborieuse. Et un évasement parfait de l’entrée des canaux, j’ai accusé une légère déception en visualisant les radiographies de contrôle : portion apicale trop fine et condensation de gutta indigente. J’ai donc repris l’expérience sur dents extraites pour tenter d’améliorer mes performances. Hélas, les deux limes intermédiaires se sont fracturées à la pointe dans un long canal de molaire inférieure. J’en conclus que ces instruments se comportent exactement comme tous les autres. Un usage unique serait certes idéal mais, étant donné leur prix, cela s’avère difficilement envisageable de ce côté-ci des Alpes.