Clinic n° 08 du 01/09/2012

 

Juridique

Audrey UZEL  

Cabinet Houdart et associés – Avocats au barreau de Paris

Vous envisagez sérieusement de vous séparer de votre salarié qui ne satisfait plus à vos exigences professionnelles. Par un arrêt du 3 mai 2012, la Cour de cassation rappelle un principe essentiel de la procédure de licenciement : reposer sur une cause réelle et sérieuse avérée, c’est-à-dire invoquer un motif légitime justifiant que le licenciement ne repose pas sur un élément discriminatoire.

Qu’est-ce qu’une cause réelle et sérieuse ? Il s’agit des motifs invoqués dans la lettre de licenciement permettant d’en justifier le bien-fondé. Cela implique l’existence d’une cause réelle caractérisée par « un élément matériel constitué par un fait concret, susceptible d’être prouvé, lié à l’exécution du contrat de travail et tenant soit à la personne du salarié ou à son aptitude au travail, soit à l’organisation ou au bon fonctionnement de l’entreprise1 ».

La cause sérieuse, quant à elle, suppose que le fait invoqué soit suffisamment grave, rendant impossible, sans dommage pour le cabinet, la continuation du travail. La preuve de la cause réelle et sérieuse repose sur l’employeur.

Quel motif invoquer ? Il doit être lié à l’exécution du contrat de travail. Il tient soit à la personne du salarié en raison de son comportement jugé fautif par l’employeur ou de son aptitude au travail soit à l’organisation ou au bon fonctionnement de l’entreprise. Il peut s’agir, par exemple, de retards continuels entravant l’activité du cabinet. Outre une faute, une insuffisance professionnelle caractérisée peut justifier un licenciement, comme le rappelle la Cour de cassation.

Cas d’école : un cabinet s’est entièrement informatisé. Constatant des défaillances d’une salariée dans la tenue des agendas électroniques et des fiches d’accueil des patients, dans l’accueil téléphonique et le traitement des urgences, le cabinet prononce son licenciement. La salariée, en poste depuis 34 ans, s’estime victime d’une discrimination liée à l’âge. Elle saisit la juridiction d’une demande d’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation donne raison aux praticiens qui apportent la preuve des défaillances : témoignages de patients (26) et comptes rendus de réunions internes (7 en moins de 3 mois). Les praticiens ont ainsi démontré que le comportement de Mme X posait des difficultés avec la clientèle et entravait l’activité du cabinet. Ils ont également démontré que Mme X était régulièrement informée des remontrances qui lui étaient faites, sans les contester, les comptes rendus de réunion étant signés de sa main. Les faits invoqués sont donc précis, objectifs, vérifiables et graves, justifiant le licenciement. Quant à la discrimination, c’est au salarié de la prouver.

1. Cass. Soc., 14 mai 1996, n° 94-45499.

2. Cass. Soc., 29 mai 2001.

À RETENIR

Un licenciement est une mesure lourde de conséquences. Avant de l’envisager, le praticien devra s’assurer qu’il a suffisamment d’éléments précis pour justifier le bien-fondé de sa décision, qu’il invoque une faute ou une insuffisance professionnelle. Ces faits doivent être objectifs, vérifiables et suffisamment graves. En revanche, la perte de confiance ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement, même quand elle repose sur des éléments objectifs2.