L’image du chirurgien-dentiste véhiculée par les médias ou le cinéma apparaît rarement à l’avantage de la profession. La publicité sert en revanche beaucoup mieux les intérêts de la profession.
Dans un article publié en 2009, Stine Grumsen(1) analyse l’image du chirurgien-dentiste dans la publicité aux États-Unis entre 1910 et 1950. Des études ont décrypté l’image populaire du chirurgien-dentiste dans les films, la télévision et les bandes dessinées. On y retrouve un chirurgien-dentiste surtout associé à la douleur et à la peur. L’auteur s’intéresse, lui, à la publicité car on y découvre une interaction différente. À tel point qu’en 1916, le président de la Moderne Ethical Dental Association of Indiana pouvait écrire que « la publicité pour les pâtes dentifrices et les brosses à dents a fait plus pour l’avancement de la cause de l’hygiène orale que toute la profession réunie ».
Sur plus de 150 publicités analysées, datant de 1911 à 1954, il ressort que l’image du chirurgien-dentiste est plutôt celle d’un homme, proprement rasé, souvent avec des lunettes ou une cravate, d’âge intermédiaire, parfois avec quelques cheveux blancs : l’image de la respectabilité telle que se la représentait l’époque. Le cas de la blouse blanche est très intéressant. Symbole de la culture scientifique qui se développe au XIXe siècle, elle apparaît plus vite sur les chirurgiens-dentistes des publicités que dans les cabinets qui ressemblent encore largement à des salons aménagés. Le dentiste, partout, apparaît clairement comme une autorité bienveillante, appuyant la publicité, de manière objective et désintéressée. Une caution pour le message.
L’invention du tube en métal, dans les années 1890, permet la mise au point des pâtes dentifrices à l’endroit des poudres, et donc la production de masse. Jusqu’aux années 1920 et 1930, dentifrices et brosses à dents restent des produits onéreux. Ils sont le symbole d’une réussite et des hautes classes sociales. Ils se démocratisent avec les années 1940 pour devenir partie intégrante de l’hygiène quotidienne. Très tôt, l’hygiène orale et le beau sourire sont des symboles de l’Amérique qui réussit. À tel point que, dès la première guerre mondiale, des publicités vantent le sourire des soldats américains(2) ! Dans le message délivré, la publicité va aussi s’adresser aux femmes en promettant beauté et jeunesse. Parallèlement, des marques s’appuient aussi sur les théories de Miller pour démontrer les qualités de neutralisation des acides, de stimulation du flux salivaire, etc., des dentifrices. De plus, dans les années 1940, le sourire ne sert plus seulement à « conserver son job », mais bien à « trouver le bon job ». Nous retrouvons là des préoccupations très actuelles.
Il ressort de cette étude que :
• l’image du chirurgien-dentiste dans les publicités est bien plus positive que dans les autres médias ;
• la publicité a fait beaucoup pour l’hygiène orale ;
• il y a, dans les interactions entre la profession et la publicité, des moyens dynamiques d’agir sur l’image de la profession et la santé.
Il est en effet très intéressant de poser la question de l’image de notre profession dans ce sens car, même si elle sert des intérêts autres, des messages sont passés qui ont influé positivement sur la santé de la population.