Clinic n° 04 du 01/04/2012

 

QU’EN DITES-VOUS ?

Deux centres dentaires qui ont ouvert au début de l’année en plein cœur de Paris et de Lyon (cf. l’enquête p. 12) mettent en avant des travaux prothétiques et implantaires à faible coût. Trois omnipraticiens réagissent.

CELA ME GÊNE MAIS NE M’INQUIÈTE PAS

Philippe COURT (91 – Saclay)

Le low cost ? Comme tous mes confrères, je suis contraint d’en faire tous les jours en appliquant les tarifs de la Sécurité sociale pour les soins opposables ! Le low cost pour des actes prothétiques et des implants, je me pose des questions : la qualité est-elle au rendez-vous ? Qui sont les praticiens ? Sont-ils incités à « faire de l’abattage » pour atteindre des objectifs de rentabilité ? Qui va effectuer les soins pré prothétiques ?

De toute façon, cette histoire va encore porter ombrage à la profession car, dans l’esprit des gens, s’il existe des chirurgiens-dentistes low cost, cela signifie que les autres sont des arnaqueurs ! Et puis, l’approche marketing et commerciale me gêne. Nous restons une profession de santé ! Mais ce type d’établissement ne me fait pas peur. Ces centres tenteront peut-être les personnes qui étaient prêtes à partir pour l’étranger mais pas celles qui ont confiance dans leur praticien.

MON MÉTIER N’EST PAS CELUI D’UN TECHNICIEN

Jean-Yves SEBBAN (54 – Lunéville)

Ces centres low cost prétendent qu’ils peuvent s’en sortir en proposant des prothèses en céramique et des implants à des prix défiant toute concurrence. Le problème est qu’ils limitent leurs travaux à la prothèse et aux implants. C’est le travail d’un technicien mais ce n’est plus mon métier. En effet, je ne veux surtout pas que mon travail soit réduit à un acte technique. Je prends chacun de mes patients dans sa globalité. Et je cherche à établir des relations de confiance dans la durée avec eux. Si je demande un certain prix pour la pose d’une couronne, c’est que j’ai pris du temps auparavant avec mon patient pour des soins, là où la Sécurité sociale m’empêche de gagner ma vie normalement et d’avoir le plateau technique qui convient à mon exercice.

ON SORT DU CADRE DE LA PRATIQUE QUOTIDIENNE

Paul CATTANEO (75 – Paris)

Ce qui me gêne, c’est que ces centres ne réalisent que certains actes. On sort du cadre de la pratique quotidienne. Un chirurgien-dentiste est un professionnel de santé, un médecin de la bouche. Il prend en charge son patient, soigne ses dents, éventuellement le conseille sur des prothèses et les réalise. Mais c’est un acte qui fait partie d’un ensemble et ce professionnel de santé est au service de son patient dans son ensemble. On ne peut pas distinguer deux types de pratique, d’un côté, celui qui réalise les couronnes et les implants et, de l’autre, celui qui ferait les soins. C’est cette question de compétence des chirurgiens-dentistes qui me paraît essentielle.

Je ne m’avancerai pas sur la question des tarifs. Sur ce sujet, vis-à-vis du grand public, la profession pourrait donner l’impression de vouloir sauvegarder son périmètre.

Cela étant, nous n’avons pas à craindre ce type de structure. Les patients qui veulent profiter de ce créneau auront un jour ou l’autre des soucis. Car, lorsqu’on fait un implant, il faut assumer l’entière responsabilité de l’acte et être là en cas de problème.