Le parcours de Denis Azoulay a quelque chose d’initiatique, entre ses 20 années d’exercice dentaire à Sainte-Foy-lès-Lyon, le cancer qui a changé le cours de sa vie et sa renaissance par l’écriture. Dans son premier roman, Mal et Fils, il interroge son histoire, ses racines.
En 2005, on m’a annoncé que j’avais un cancer de l’estomac. Quelques mois plus tard, cloué au lit, je repense aux propos d’Elie Wiesel que j’ai eu la chance de rencontrer : « Quand on a à témoigner, il ne faut pas perdre de temps et écrire ». Je me suis mis à noircir des pages, et c’est une sorte d’art-thérapie qui s’est mise en place. Plus j’écrivais, plus je guérissais. Une sorte de fusion s’est installée entre l’ordinateur et moi.
Quand j’ai appris que j’étais malade, je n’ai pas eu peur, par méconnaissance certainement. Ensuite, je me suis retrouvé sur un véritable tapis roulant de déshumanisation progressive : scanner, IRM… À partir de ce moment-là, votre corps se fond dans le corps médical, la peur monte, des heures à attendre, tout se complique. J’ai néanmoins continué à exercer jusqu’au jour de mon opération.
C’est sur les bancs de la faculté d’odontologie de Lyon que j’ai rencontré ma femme. Après l’obtention de nos diplômes, nous avons passé 2 années, près de Tel-Aviv, en Israël, en pleine guerre du Golfe dans des conditions difficiles… À notre retour, après la naissance de notre premier enfant, nous nous sommes associés. Omnipraticien, je faisais un peu d’implantologie ; quant à ma femme, elle s’est orientée vers l’orthodontie.
J’ai tenté de reprendre mon activité au cabinet, mais physiquement je n’arrivais pas à remettre le pied à l’étrier. De plus, dans le libéral, c’est la loi du tout ou du rien, il n’existe pas de mi-temps thérapeutique.
J’ai vraiment eu du plaisir à soigner. J’avais l’impression d’écrire une histoire dans la bouche de mes patients : c’est un métier fabuleux. Et puis, à un moment donné, la fraise et la plume sont devenues une même entité.
Je n’aurais pas pu écrire à 20 ans… La première partie de ma vie a été de rencontrer les autres, à travers mon métier de chirurgien-dentiste, la seconde, d’être écrivain.
Ne pas attendre. Il faut réaliser ses rêves, le plus rapidement possible.