Clinic n° 01 du 01/01/2012

 

Profession : chirurgien-dentiste

ENQUÊTE

EDMOND BINHAS*   ANNE-CHANTAL DE DIVONNE**  

La profession de chirurgien-dentiste est toujours aussi attrayante et offre des possibilités de développement à la fois professionnel et personnel. Et ce malgré la morosité ambiante. C’est l’un des enseignements de la première grande enquête annuelle menée par le Groupe Edmond Binhas et Clinic entre le 1er septembre et le 31 octobre 2011. Quelques résultats clés en témoignent. Ainsi, près de 30 % des sondés estiment que leur résultat en 2011 sera meilleur que celui de 2010 et que la moyenne de leur chiffre d’affaires a augmenté. Sur environ 200 praticiens ayant répondu à la question sur le stress, les deux tiers évaluent le leur de bas à tolérable.

Cette première enquête annuelle sur la profession, fruit de la volonté commune de la revue Clinic et du Groupe Edmond Binhas, fournit une photographie inédite de la profession grâce aux réponses de 440 praticiens. Mais il ne faut pas se tromper sur sa portée : elle ne représente qu’un instantané des modes de pratique. De plus, si de nombreux résultats correspondent à l’idée que nous avions de la profession, d’autres surprennent, voire apparaissent provocants. Nous resterons donc très prudents sur les interprétations possibles.

Omnipraticien et libéral

Sans surprise, l’omnipratique est le type d’exercice des quatre cinquièmes des praticiens (82 %). Une part non négligeable des chirurgiens-dentistes se positionne comme des omnipraticiens avec une orientation particulière (16 %). Seuls 1,8 % des praticiens sont des spécialistes exclusifs. S’agissant du mode d’exercice, près de la moitié des praticiens (47 %) exercent encore en solo. Ceux de l’autre moitié exercent à deux (31 %), voire plus (22 %). Par ailleurs, 57 % des praticiens exercent sans collaborateur, 25 % avec 1 collaborateur et 7 % avec 2 collaborateurs ou plus.

Les assistantes perçoivent un salaire mensuel net de 1 683 euros

Le nombre moyen d’assistantes dans les cabinets de l’ensemble des personnes interrogées est de 1,71. De façon surprenante, seules 15,5 % des personnes interrogées indiquent ne pas avoir d’assistantes. Ce nombre est bien inférieur à celui habituellement mis en avant dans la profession, car on estime que la moitié des praticiens exerceraient sans assistante. Près de 28 % des cabinets sondés emploient 2 assistantes dentaires et 19,5 % plus de 2. Il n’est pas précisé s’il s’agit de cabinets de groupe ou non.

Les informations objectives sur les salaires des assistantes sont assez rares. Il est intéressant de noter qu’un grand tiers seulement des praticiens ont répondu à cette question et 18 % d’entre eux indiquent verser un salaire mensuel net inférieur à 1 500 euros (le SMIC net atteint 1 072 euros). Le salaire mensuel net moyen déclaré est de 1 683,56 euros pour une assistante au fauteuil. Cette moyenne est cependant à prendre avec précaution car certains praticiens n’emploient leur assistante qu’à temps partiel.

Un nouveau patient par jour

Le nombre moyen de nouveaux patients, toutes régions confondues, s’élève à 23,3 par mois, soit un nouveau patient par jour ! Ce chiffre élevé semble s’expliquer par une évolution à la baisse de la démographie professionnelle.

Un chiffre d’affaires pour 2011 en progression pour un tiers de la profession

L’année 2010/2011 semble s’être plutôt bien passée pour la majorité des praticiens qui estiment que leur chiffre d’affaires est resté stable (27,6 %), voire a progressé (27,8 %). Un dixième d’entre eux notent cependant sa diminution au cours des 12 derniers mois. Mais il s’agit de rester prudent sur ces données sachant qu’un tiers des praticiens interrogés n’a pas souhaité répondre. La moyenne du chiffre d’affaires réalisé par un praticien titulaire (en solo ou en association) atteint 250 664 euros, soit le même montant que celui indiqué par l’AGAPS (250 000 euros). Pour l’année 2011, 47 % des chirurgiens-dentistes pensent que leur chiffre d’affaires va stagner (17,8 %) ou progresser (29,4 %).

Les dépenses du cabinet atteignent 60 % du CA

Concernant les dépenses, les résultats de notre enquête confirment sans surprise la tendance à l’accroissement de la part des dépenses du cabinet dentaire dans la balance financière. Les dépenses atteignent en moyenne 60 % du chiffre d’affaires. Mais elles s’élèvent jusqu’à 65 % dans 22 % des cabinets.

Parmi les dépenses du cabinet dentaire, la masse salariale est un indicateur important de l’efficacité de l’équipe mais aussi d’un éventuel sureffectif ou sous-effectif. Il convient de surveiller régulièrement tout accroissement ou toute diminution de ce rapport. L’enquête montre que 37 % des personnes interrogées ont une masse salariale inférieure ou égale à 15 % des dépenses ; pour 22,5 % d’entre elles, elle est comprise entre 15 et 25 % et, enfin, pour 41 %, elle est supérieure à 25 %.

Quand il s’agit de parler de bénéfice, 40,3 % des personnes sondées préfèrent se taire ! Ce n’est pas une grande surprise sachant à quel point ce sujet reste tabou en France. Le ratio est l’un de ceux que les praticiens ont le plus de mal à partager lors des discussions dans les congrès ! Si l’on prend en compte les réponses des 60 % de praticiens qui ont répondu, près de 28,8 % déclarent un bénéfice inférieur à 50 000 euros, 36,7 % entre 50 000 et 99 000 euros et 34,5 % au-dessus de 100 000 euros. Ils sont 6,2 % à reconnaître plus de 200 000 euros.

La diminution du nombre de jours travaillés

Le nombre de jours de travail hebdomadaire a évolué et diminue. Mais peu d’études se sont réellement penchées sur cette question. Le sondage révèle que 69 % des praticiens exercent 4 jours et plus par semaine, dont 14,8 % 5 jours ou plus. Il est à noter que 13 % des confrères travaillent au maximum 3 jours par semaine. Contrairement à un mythe répandu, les femmes travaillent un peu plus de jours par semaine que les hommes : elles annoncent 3,56 jours en moyenne contre 3,46 pour les hommes. Il s’agit sans doute d’un changement en profondeur qui reflète une évolution de la société.

Modes d’organisation

Le fait que 80 % des praticiens interrogés utilisent des agendas avec des unités de temps de 15 minutes montre que le mode de travail standard, sans prise en compte précise de la durée réelle des actes, est le plus largement répandu.

Des délais de règlement qui augmentent

Une autre tendance forte concerne l’étalement du règlement des honoraires par les patients. En recoupant les différents paramètres, on constate que les délais de règlement augmentent. La majorité des praticiens (55 %) affirment accepter des paiements échelonnés et 29 % considèrent que ce phénomène est en augmentation dans leur cabinet. En revanche – autre fait relativement récent –, 3,4 % des sondés disent proposer parfois à leurs patients le recours à un organisme de crédit. À noter que près du quart des praticiens accepte le tiers payant.

S’agissant des impayés, 40 % des praticiens ayant répondu à cette question disent avoir un taux d’impayés inférieur à 3 %. Mais 14 % annoncent un taux supérieur à 5 % (parmi eux, 5 % en déclarent plus de 10 %).

Il faut aussi noter que plus de la moitié des praticiens (près de 55 % des personnes qui ont répondu à la question) considèrent que les accords avec les mutuelles ne représentent pas un avantage dans l’acceptation des plans de traitement, tandis que 45 % pensent le contraire.

L’exercice dentaire n’est pas solitaire

La gestion d’un cabinet apparaît très différente selon les cas. Ainsi par exemple, seuls 18,2 % des participants déclarent utiliser des descriptions de postes pour le travail de leur personnel, 13 % disent avoir défini des objectifs et une philosophie de travail et 1 praticien sur 10 affirme avoir établi une stratégie et une vision de son cabinet.

Enfin, pour être assistés dans la gestion de leur cabinet, les chirurgiens-dentistes s’adressent en majorité à leur expert-comptable (37 %) et, dans une proportion moindre, à leur banquier (20 %). 6 % d’entre eux ont recours à un consultant en organisation.

Qualité de vie

Soixante-dix des praticiens interrogés indiquent prendre plus de 5 semaines de vacances par an. Cela ne constitue pas vraiment une surprise étant donné le rythme scolaire français. Il est à noter toutefois que près de 5 % des confrères ayant répondu à l’enquête prennent moins de 2 semaines de vacances et que 25 % prennent entre 3 et 4 semaines.

Une carrière qui peut durer après 70 ans

De façon étonnante, à la question « À quel âge souhaitez-vous partir à la retraite ? », seuls 41,8 % des personnes interrogées ont répondu. Parmi elles, 46 % espèrent s’arrêter avant 65 ans, 36 % entre 65 et 67 ans et quand même 16,4 % après 67 ans, dont la moitié affirme même vouloir travailler après 70 ans. En revanche, à la question « Pensez-vous devoir travailler plus longtemps compte tenu des changements économiques actuels ? », le nombre de personnes ayant répondu « oui » à la question est 3 fois supérieur à celui des « non ».

440 PRATICIENS SONDÉS

L’enquête a été menée par Internet et par voie de presse auprès de 440 chirurgiens-dentistes en France entre le 1er septembre et le 31 octobre 2011. Le gestionnaire a été reproduit avec l’autorisation du Levine Groupe et adapté à la population française. Les résultats ont été reçus à 85,6 % par Internet et à 14,4 % par courrier. La collecte en ligne a été réalisée par ZapSurvey. L’analyse statistique a été réalisée sur le logiciel Sphinx +. Les principaux domaines étudiés sont les types de pratiques (âge, ancienneté, type d’exercice, nombre d’assistantes, de patients, chiffre d’affaires, pourcentage de dépenses), la localisation géographique, le profil du praticien (âge, sexe, ancienneté, temps de travail), le mode d’organisation (rendez-vous, encaissements, philosophie de travail et stratégie de développement) et les souhaits et habitudes des praticiens (âge souhaité de la retraite, partenaires extérieurs, niveau de stress). Les résultats complets sont disponibles, sur les sites Internet de Clinic et du Groupe Edmond Binhas.

LE PROFIL DES CHIRURGIENS-DENTISTES SONDÉS…

La répartition géographique des personnes ayant répondu à l’enquête est homogène, tant en termes de région administrative que de taille de la commune d’installation. Toutes les tranches d’âge ont participé à l’enquête avec une représentation plus élevée des 25-35 ans et des 46-55 ans (respectivement 25,7 et 31,4 %). Toutes catégories confondues, 38,5 % des praticiens interrogés ont plus de 25 ans de pratique. Les hommes ont représenté 63,8 % des personnes ayant répondu et les femmes 36,2 %.

Les confrères ayant répondu intégralement au questionnaire ont participé automatiquement à un tirage au sort permettant de gagner les 50 lots mis en jeu. Félicitations aux lauréats !

Pour clore sur ces quelques points clés de l’enquête, nous nous sommes intéressés à un critère de bien-être des praticiens : le niveau de stress.

Il n’est pas simple de l’évaluer quand 54 % des praticiens interrogés se refusent à répondre à la question s’y rapportant ! Toutefois, parmi ceux qui ont accepté de l’évaluer, on notera simplement que pour les deux tiers (62 %), le niveau de stress est bas ou tolérable et qu’un tiers d’entre eux (33 %) l’estiment élevé, voire très élevé.