QU’EN DITES-VOUS ?
Les bars à sourire qui proposent de blanchir les dents ouvrent à un rythme soutenu depuis plusieurs mois en France. Il y aurait de 10 à 15 nouveaux pas-de-porte en moyenne chaque semaine. Comment réagissez-vous ?
Si le traitement a de l’effet, c’est que les bars à sourire utilisent du peroxyde d’hydrogène à plus de 0,1 %. En fait, ces bars détournent la loi de plusieurs façons. D’abord, plutôt que d’utiliser directement du peroxyde à un taux supérieur à 0,1 % qui leur est interdit, ils ont recours au perborate de sodium, mais sans avoir pris la précaution de vérifier que ce produit est connu comme étant dangereux pour la reproduction ! De plus, ce perborate est activé à l’aide d’un autre produit, dont on ne connaît pas la composition, mais dont on sait qu’il libère du peroxyde ! Ces bars à sourire détournent aussi la loi en donnant à poser une gouttière avec le produit actif à leur client. Je pense qu’il y a là un problème de responsabilité civile. En cas de problème, de grave allergie par exemple, ils sont responsables car même s’ils n’ont pas posé le produit, ils l’ont donné à poser à leur client. Ce problème est peu abordé.
Le chirurgien-dentiste a vraiment un rôle à jouer dans la décision de faire ou non un blanchiment. Il ne le fait que dans des cas bien particuliers et en tout cas, en veillant auparavant à l’existence ou non de caries, à des problèmes d’étanchéité des reconstitutions, ou encore à la présence d’un émail anormalement taché ou poreux.
J’ai d’abord été très étonné, puis très en colère et, maintenant, j’attends de voir. À Perpignan, une quantité considérable de ce type de magasins a ouvert. Comment pourraient-ils tous continuer à fonctionner ? Et puis, un de mes confrères a déjà vu une patiente revenir dans son cabinet après deux séances à 70 euros qui n’avaient pas donné le résultat escompté. Je ne suis personnellement pas concerné car je ne fais pas de blanchiment. Mais j’ai été en colère car il y a quelques années nous avons eu des denturologues. Or, nous n’avons jamais vraiment réussi à éradiquer le problème. Ces boutiques de blanchiment sont à nouveau une pierre contre l’activité des chirurgiens-dentistes. Et il apparaît que nous ne pouvons rien faire à leur encontre.
En plus, elles ne se gênent pas pour glisser des publicités dans les boîtes aux lettres. Cette pratique est totalement déloyale.
Leur offre fait encore passer les praticiens pour des méchants qui font payer cher. Cette stigmatisation de la profession est très déplaisante. Mais aujourd’hui, avec mes confrères, nous attendons de voir dans 6 mois quand les clients seront déçus.
Installer des boutiques de blanchiment dans la rue, ouvertes à tous et sans aucun filtre, est dangereux pour la santé et réduit l’activité du chirurgien-dentiste à celle d’un commerce lucratif quelconque. C’est mettre le travail en bouche sur le même plan qu’une coupe de cheveux ou un soin de manucure ! Comme si l’on retournait à la période des arracheurs de dents de rue. Je trouve hideux de voir des gens assis sur un fauteuil en vitrine sous des lumières électriques qui violent la confidentialité et l’intimité de la personne.
Tous les travaux effectués dans la bouche d’un patient appartiennent au domaine médical. Je ne suis pas contre le fait que des personnes non-chirurgiens-dentistes puissent faire du blanchiment, mais il faudrait que cette pratique passe par une décision du Conseil de l’Ordre. On ne peut pas laisser des charlatans exercer sans contrôle !