Clinic n° 10 du 01/11/2011

 

UNIVERSITÉ D’ÉTÉ DE LA CNSD

ACTU

La question est plus que jamais d’actualité alors que doivent s’ouvrir les négociations conventionnelles. Ministre de la Santé, élus et financeurs se sont employés, lors de la table ronde politique de la 4e université d’été de la CNSD*, à convaincre les 300 cadres syndicaux que la santé bucco-dentaire avait toute sa place dans la santé. Lui en donneront-ils les moyens ?

La profession va « dans le mur », a lancé sans détour le président de la CNSD. La situation est désormais connue, les cabinets dentaires ne peuvent pas vivre des soins et, en même temps, l’accès aux soins des Français est de plus en plus difficile.

Une juste place

Pour rompre avec cette situation, Roland L’Herron a demandé un « geste politique fort » : le doublement des honoraires des soins conservateurs pour les porter à leur juste valeur, ce qui représente une enveloppe de 2 milliards d’euros. Cette demande peut paraître déplacée quand on sait le Gouvernement en train de lutter contre l’endettement énorme du pays. Mais pour le président de la CNSD, il était important « de ne plus se contenter d’affirmer du bout des lèvres » que les soins sont sous-évalués. Cette revalorisation aurait pour effet de « booster » l’embauche d’assistantes dentaires, de régler une partie des problèmes de démographie en relançant l’activité dans des zones économiquement défavorisées et de remettre la chirurgie dentaire à sa juste place. Car la crainte est toujours de voir celle-ci poussée hors des murs du médical.

Dans son allocution, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, s’est employé à rassurer : il n’est « pas question » de pousser la chirurgie dentaire « hors les murs du médical ». Mais en même temps, même si le ministre n’a pas rejeté la demande de financement, il a fait remarquer que dans le contexte économique actuel tendu, « pas grand monde pourra vous promettre » 2 milliards.

Satisfaction

Valérie Boyer (UMP, Bouches-du-Rhône), rapporteur de la proposition de loi Fourcade, est revenue sur un sujet de satisfaction pour la profession. Il s’agit du texte de loi âprement discuté au Parlement sur l’information à donner au patient. Il permet enfin de tourner la page sur plus de 2 années de débats qui ont jeté la suspicion sur la profession. En mettant l’accent sur la traçabilité de la prothèse, le texte voté « permet d’aborder de meilleures relations avec les patients ». Reste à instaurer des relations renouvelées avec les financeurs.

Marges limitées

Du côté de l’Assurance maladie obligatoire, Philippe Ulman, directeur de l’offre de soins de la CNAMTS**, est resté peu disert sur les intentions de l’Assurance maladie. Il est vrai que son conseil d’administration n’a pas encore voté les grandes orientations. Il a tout de même affirmé sa volonté de « pérenniser l’exercice libéral », de « valoriser des actes », de progresser dans la prévention et dans d’autres domaines mais « toujours en considérant l’évolution des revenus des professionnels ». Sa proposition d’aligner la consultation dentaire sur la consultation médicale a été accueillie par un tollé dans la salle. On se souvient en effet que ce point faisait déjà partie de l’accord conventionnel de 2006. Jamais appliqué. « L’équilibre général macro économique limite les marges de manœuvre », prévient le directeur de l’offre de soins.

Les conventions renouvelées récemment donnent aussi des indications sur les orientations de l’Assurance maladie. « Nous sommes dans des réformes structurantes de notre exercice », observe le président du CNPS***, Alain Bergeaud, qui prend pour exemple les mesures de régulation de l’offre dans les zones déjà bien dotées en personnels de santé dans l’accord avec les infirmiers, et l’introduction d’un mode de paiement dépendant de la performance et de la qualité introduit dans la convention des médecins.

La grande inconnue

La grande inconnue des prochaines négociations conventionnelles reste l’attitude des complémentaires de santé dont on sait qu’elles y participeront. La CNSD, qui compte beaucoup sur leur apport financier important, doute. La taxe de 1 milliard qui leur est imposée par le plan Fillon risque d’affaiblir leur capacité d’investissement. Au-delà, « la difficulté pour l’UNOCAM**** est peut-être parfois d’adopter une position commune sur une vision stratégique structurante. Sur le dentaire, il y aura peut-être moins de dissensions », analyse Philippe Ulmann en exposant quelques aspects sur lesquels l’Assurance maladie souhaite collaborer avec l’UNOCAM : la place des complémentaires dans le suivi des chirurgiens-dentistes au niveau local ou encore l’élaboration de nouvelles missions pour les chirurgiens-dentistes conseils, telles que la promotion de la santé publique.

Un autre aspect des relations avec les complémentaires de santé inquiète la profession. Le retrait par le Conseil constitutionnel de l’article de la loi Fourcade qui remettait en cause les réseaux fermés (les réseaux dans lesquels les complémentaires choisissent leurs praticiens) crée une « situation embarrassante », a estimé Roland L’Herron. La CNSD est favorable aux réseaux ouverts, elle en a d’ailleurs créé en partenariat avec des mutuelles et 25 000 praticiens en font partie. Mais elle s’oppose aux réseaux fermés. « Les praticiens qui y adhèrent pensent qu’ils capteront une clientèle mais, à terme, il y a un risque de perte de confiance du patient qui serait orienté vers un professionnel de santé pour des critères économiques », prévient Thierry Soulié, vice-président de la CNSD. Sur ce dossier, la CNSD peut compter sur l’appui de Valérie Boyer : « Ce n’est pas avec un réseau fermé que l’on réglera le problème du reste à charge. Créer un réseau fermé change la donne de notre système. Je ferai en sorte qu’il n’y en ait pas », a-t-elle affirmé, applaudie par la salle. ?

* Confédération nationale des syndicats dentaires.

** Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés.

*** Centre national des professions libérales de santé.

**** Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire.