Vers l’alliage idéal ?

Ces instruments peuvent se tordre dans tous les sens et conserver la forme donnée aussi facilement qu’un fil de cuivre. Je l’avoue, cette propriété m’a d’abord laissé perplexe : un métal mou en endodontie, ce n’est pas très engageant. Tout le contraire du nickel titane superélastique auquel nous sommes habitués. Comment un alliage aussi malléable peut-il couper de la dentine ? Lors de la première utilisation, j’ai réglé, par sécurité, le couple maxi de mon contre-angle favori à 0,5 Ncm. La séquence débute par une courte lime de n° 25 et conicité 0.8 qui sert à élargir l’entrée du canal. Aucun résultat. Idem avec les suivantes qui n’avançaient pas et semblaient inactives. Perplexe, je me suis décidé à consulter le mode d’emploi pour mieux comprendre l’origine du problème. Il faut en fait tourner à 500 tr/min avec un couple de 2,5 Ncm. Ces réglages effectués, je me suis remis au travail. Et là, j’ai enfin pu apprécier tout le potentiel de ces étonnants instruments.

Le set complet se compose de 6 limes. L’expérience le prouve, il n’est pas toujours nécessaire de les utiliser toutes. Naturellement, l’exploration initiale du canal s’effectue classiquement à la main. Vient ensuite la première lime courte évoquée plus haut. Puis une n° 20 de conicité 0.4 et une n° 25 de conicité 0.4 également. Pour préparer le corps du canal et faire la transition entre les deux, une autre lime n° 20, mais de conicité 0.6 est ensuite utilisée. La préparation apicale se termine par une 30/0.4 ou une 40/0.4 si le canal est large et la racine assez solide. Les partisans de la technique de Schilder trouveront sans doute à redire, car il manque des instruments permettant d’obtenir une plus forte conicité apicale. Préservation tissulaire optimale diront les uns, dépassement possible de gutta sous la pression des fouloirs rétorqueront les autres.

Utilisée à la bonne vitesse de rotation et au couple recommandé, la capacité de coupe des HyFlex se révèle très convaincante. Contrairement aux limes habituelles en NiTi, elles agissent avec une douceur extrême. Mais le plus impressionnant – dont je me suis aperçu en m’entraînant sur dents extraites – est leur surprenante capacité à suivre et respecter les trajectoires canalaires les plus tortueuses. Là où une lime NiTi n° 30 finit immanquablement par redresser le dernier millimètre, les HyFlex de même dimension parviennent au foramen sans le moindre déport grâce à leur absence totale d’élasticité.

Fabriquées dans un alliage à mémoire de forme, elles diffèrent des instruments habituels par un autre aspect : complètement tordues ou déspiralisées, elles retrou­vent une deuxième jeunesse une fois passées au stérilisateur, d’où elles ressortent toutes droites, comme neuves. L’exact contre-pied des limes à usage unique, d’où l’image du Phœnix renaissant de ses cendres à laquelle le fabricant les a associées. Sur le papier, une résistance à la fracture trois fois supérieure à celle du NiTi conventionnel. J’ignore combien de fois on peut les réutiliser sans risque. Pour l’heure, après une bonne vingtaine de canaux traités, aucune d’entre elles ne m’a encore lâché !