PROTHÈSE FIXÉE
Docteur en chirurgie dentaire
6, rue du Commandant Rivière 75008 PARIS
La gestion de l’empreinte, sa réalisation puis sa coulée, est une étape importante de la chaîne prothétique. De nombreux facteurs peuvent concourir à l’inadéquation du modèle de travail du prothésiste avec la situation clinique. La prise d’empreintes numériques permet d’augmenter la qualité de l’empreinte et la gestion du flux numérique augmente au final la précision de la prothèse posée.
À notre époque, où la recherche du beau et du naturel tient une place prépondérante dans la société, la dentisterie moderne se devait de progresser dans ces domaines.
Face aux demandes de plus en plus pressantes des patients non seulement du point de vue esthétique mais aussi biologique (toxicité, allergie, corrosion…) et mécanique (pérénité…), les matériaux ont vu leur cahier des charges s’étoffer.
La réalisation de restaurations prothétiques découle d’une longue chaîne technique dont la première étape est l’empreinte des préparations. Celle-ci doit permettre l’enregistrement des formes des contours, limites et lignes de finition des préparations dentaires ainsi que leur environnement. Différentes techniques d’empreinte et différents matériaux sont aujourd’hui disponibles pour obtenir une reproduction des préparations la plus fidèle possible. Cependant, la déformation d’une empreinte est cliniquement inévitable et a pour conséquence un modèle de travail qui ne reproduit pas parfaitement la situation clinique enregistrée. Les causes des déformations sont de trois types : physiques, chimiques et mécaniques. Les facteurs physiques et chimiques dépendent principalement du type de matériau utilisé, tandis que les facteurs mécaniques dépendent plutôt de la situation clinique et de la technique employée.
Aujourd’hui, le flux numérique (empreinte optique et techniques de conception et fabrication assistées par ordinateur, ou CFAO) n’est pas un « effet de mode » mais une réalité qui permet d’optimiser la qualité des restaurations en diminuant les imperfections de la chaîne prothétique.
Cet article présente différents cas cliniques traités à l’aide du système d’empreinte optique Lava™ C.O.S. (3M ESPE) et du procédé de CFAO Lava™ (3M ESPE).
Le Lava™ C.O.S. (chairside oral scanner) (fig. 1) est un système d’empreinte optique destiné à l’enregistrement des préparations de prothèses fixées : couronnes, bridges, inlays/onlays, facettes, piliers implantaires. Il se présente sous la forme d’une unité mobile à roulettes qui comporte un ordinateur, un écran tactile, une caméra et un vaporisateur de poudre. Il est relié au réseau internet sans fil pour l’envoi des fichiers numériques d’empreintes au laboratoire.
Les dents sont préparées en respectant les impératifs spécifiques aux restaurations. Ici, il s’agit de couronnes tout céramique (réduction incisale de 1,5 à 2 mm, réduction axiale de 1 à 1,5 mm, préparation globalement arrondie, limite sous forme de congé ou d’épaulement à angle interne arrondi). La préparation doit présenter une limite bien lisible : supragingivale, juxtagingivale ou intrasulculaire selon la situation clinique.
Une méthode d’isolation efficace doit être choisie en fonction de la situation clinique afin d’évacuer la salive : écran parotidien, rouleau salivaire, aspiration chirurgicale. En effet, toute présence de sang, de salive ou de fluide sulculaire sur la limite de préparation sera enregistrée par la caméra et compromettra le résultat prothétique.
Une technique d’évasement sulculaire est choisie en fonction de la situation clinique (fils rétracteurs, pâte d’évasement ou laser…) pour permettre la visibilité la plus parfaite de la limite de préparation. Une fois la déflexion gingivale obtenue, les dents sont légèrement poudrées à l’aide d’un vaporisateur de dioxyde de titane. Ce poudrage est nécessaire à l’enregistrement des préparations (fig. 2 et 3).
Pour des raisons d’asepsie, la caméra est protégée d’une gaine plastique jetable. Une fois qu’elle est introduite en bouche, le déclenchement peut être réalisé au niveau de l’écran tactile ou, de manière plus simple, directement par le bouton positionné sur la pièce à main. La caméra est déplacée au-dessus des surfaces dentaires sans aucun contact. Son faible diamètre (1,32 cm) permet une bonne maniabilité en bouche. Le praticien visualise sur l’écran l’enregistrement en cours. Grâce à la technologie 3D in motion, la caméra intraorale enregistre un film continu en temps réel. Ce procédé permet de restituer un flux continu de données phénoménal (20 images 3D par seconde, 2 400 images en 2 minutes correspondant à 24 millions de points de données) pour une présentation plus précise de la situation buccale du patient.
La prise d’empreinte peut être arrêtée à tout moment, l’écran affiche alors les données déjà acquises. L’enregistrement peut être repris et les nouvelles données s’afficheront dans une teinte différente du premier enregistrement. L’empreinte peut donc être prise en un seul mouvement dynamique ou par une succession de séquences. L’écran permet un contrôle de la préparation, de sa limite et des tissus environnants (fig. 4 et 5).
Le temps nécessaire à la réalisation d’une empreinte varie en fonction du nombre de piliers à enregistrer et de l’expérience de l’utilisateur. Il faut compter entre 2 et 7 minutes en fonction de la situation clinique.
Une fois l’empreinte terminée, les préparations sont vérifiées et validées. On peut afficher sur l’écran tactile l’image de la préparation avec une fonction « zoom » (fig. 6). Toutes les faces de la préparation peuvent être visualisées. Il est possible de noter dans une zone difficilement lisible des points sur la limite (fig. 7). Ces points seront visibles par le prothésiste et lui donneront ainsi l’information directe de la situation de la limite (l’utilisation de l’image 3D avec des lunettes spéciales de visualisation peut encore faciliter la détermination de cette limite).
Ce système permet au praticien de contrôler immédiatement la qualité de la préparation, de l’éviction gingivale et de la limite cervicale.
De la même manière, l’empreinte optique antagoniste et un enregistrement de l’occlusion sous forme d’une clé vestibulaire sont réalisés.
Ce système présente de nombreux intérêts pour le praticien :
• optimisation de l’empreinte du fait de l’élimination des erreurs classiques des techniques traditionnelles de prise d’empreinte ;
• précision d’adaptation des restaurations augmentée ;
• diminution du temps passé au fauteuil (réglage des points de contacts…) ;
• amélioration du niveau d’hygiène par rapport aux prises d’empreinte traditionnelles.
Une fiche d’ordre préétablie est complétée à l’écran. Le type de restauration (couronne, bridge, inlay…), les dents concernées, le matériau, le type de procédé (tout céramique, céramo-métallique…), la teinte et d’autres éléments sont spécifiés (fig. 8).
L’ensemble du cas – enregistrement de la préparation et de son environnement, arcade antagoniste et clé vestibulaire – et sa fiche d’ordre sont contrôlés par le praticien. Celui-ci signera son cas et le validera à l’aide de son code personnel. Le fichier du cas clinique complet est transféré à l’aide du réseau interne.
Au laboratoire (fig. 9 à 16), de nombreuses étapes sont supprimées :
• modèle en plâtre ;
• mise sur socle et pins ;
• découpe et détourage manuels du die…
Le laboratoire équipé du Lava™ Lab Software télécharge le fichier. Il a accès à toutes les données enregistrées par le praticien. Il marque les limites, place les découpes pour individualiser les modèles positifs unitaires. Il peut visualiser les points recommandés par le praticien sur la limite. Une fois traité, ce fichier numérique est envoyé à une société qui va réaliser des modèles stéréolithographiques puis montés sur occluseur.
Ce même fichier est parallèlement traité par le logiciel de conception assisté par ordinateur (Lava™ Design Software) pour la modélisation des infrastructures prothétiques. Ce logiciel permet de créer virtuellement la restauration prothétique souhaitée à l’aide d’une bibliothèque de dents. L’infrastructure sera alors obtenue par réduction homothétique de cette modélisation.
Le fichier est ensuite envoyé à la fraiseuse CNC 500 (fraiseuse 5 axes) qui va usiner un bloc de zircone TZP surdimensionné de 20 à 25 %. Les pièces obtenues sont immergées dans un bain de coloration (8 teintes disponibles) et sintérisées dans un four pour obtenir leurs propriétés et dimensions finales.
L’infrastructure est alors positionnée sur le modèle stéréolithographique. Le prothésiste vérifie la qualité de l’infrastructure et réalise le montage cosmétique.
Le système d’empreinte optique Lava™ C.O.S. permet aujourd’hui de répondre à un grand nombre d’indications de prothèse fixée (couronnes, bridges, inlays/onlays, facettes…).
Après une courte période d’apprentissage, il confère au cabinet un confort de travail et un réel gain en précision. Pour le patient, la prise d’empreinte numérique a également un impact très positif.
En constante évolution, ce système permettra bientôt de prendre des empreintes des vis implantaires, ce qui simplifiera grandement les traitements (passivité des armatures, plus de solidarisation des transferts…).
La gestion de l’empreinte, sa réalisation puis sa coulée, est une étape importante de la chaîne prothétique. De nombreux facteurs peuvent concourir à l’inadéquation du modèle de travail du prothésiste avec la situation clinique. La prise d’empreintes numériques permet d’augmenter la qualité de l’empreinte et la gestion du flux numérique augmente au final la précision de la prothèse posée.
• Attal JP, Tirlet G. La CFAO, ce qui change pour le praticien. Real Clin 2009 ; 20 : 215-218.
• Dejou J. La zircone… cette belle inconnue ! Clinic 2010 ; 31 : 8-10.
• Duret F. La CFAO dentaire trente ans après. Profession Chirurgien-dentiste 2003 ; 2 : 5-9.
• Duret F, Pelissier B. Les différentes méthodes de prise d’empreintes pour la CFAO. Stratégie prothétique 2003 ; 3 : 343-349.
• Unger F. La CFAO dentaire. Stratégie prothétique 2003 ; 3 : 327-340.
Testez vos connaissances suite à la lecture de cet article en répondant aux questions suivantes :
1 1. Le Lava COS est une unité :
• a. scanner pour enregistrer les tissus durs et mous ;
• b. une caméra intraorale pour la motivation du patient ;
• c. une camera intraorale pour la prise d’empreinte numérique.
2 La prise d’empreinte est réalisée :
• a. par une série de clichés photographiques ;
• b. par un film dynamique d’une durée moyenne de 2 minutes ;
• c. par la technique 3D in motion.