La santé est un champ d’application privilégié pour les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), comme en témoigne le décret « télémédecine » publié le 21 octobre dernier [1].
La télémédecine se définit comme une pratique médicale à distance utilisant les NTIC. Dans ce domaine comme dans bien d’autres, le législateur vient encadrer une évolution naturelle des pratiques sociales et professionnelles. Depuis quelques années, des établissements hospitaliers utilisent de tels dispositifs pour améliorer la prise en charge des patients dans des territoires touchés par la baisse de la démographie médicale. Ils apportent ainsi leur expertise à des praticiens éloignés, par exemple pour l’interprétation de l’imagerie médicale.
Le décret définit des actes qui concernent les relations entre professionnels médicaux dont :
– la téléexpertise qui permet à l’un d’entre eux de solliciter à distance l’avis d’un autre en raison de sa formation ou de ses compétences ;
– la téléassistance médicale où un professionnel médical assiste à distance un autre au cours de la réalisation d’un acte.
L’autre volet du décret a pour objet la relation patient-praticien avec :
– la télésurveillance médicale au cours de laquelle un professionnel interprète à distance les données nécessaires au suivi d’un patient et prend des décisions relatives à sa prise en charge ;
– la téléconsultation qui définit la possibilité pour un professionnel de donner une consultation à distance à un patient.
Le conseil national de l’ordre des médecins se félicite de cette avancée par la voix de son vice-président Jacques Lucas [2], tout en rappelant les réserves émises dans son livre blanc de 2009, qui stipulaient que « la réalisation d’un acte de télémédecine doit être fondée sur une nécessité justifiée par l’absence, dans la proximité géographique du patient, d’une offre de soins similaire de même qualité [3] ». Or le décret va plus loin, la téléconsultation qu’il autorise est bien définie comme une consultation véritable avec diagnostic et prescription. Si un cadre limitatif est évoqué, il concerne la prise en charge de ces nouveaux actes, mais non leur autorisation. Il est clair que le non– remboursement ne sera pas un obstacle à l’utilisation de ces services, tant le prix de la consultation peut être négligeable face aux dépenses liées au déplacement ou à la perte de revenus. C’est ce que montrent déjà les sites qui proposent des conseils payants donnés par des médecins, comme MédecinDirect [4] qui a dépassé les 100 000 clients.
Dans sa lettre de janvier, le conseil national de l’ordre des chirurgiens-dentistes souligne l’intérêt de la téléexpertise ou de la téléassistance mais élude totalement l’innovation que constitue la téléconsulta tion.
Si cette évolution est largement passée sous silence par les instances ordinales, n’est-ce pas parce qu’elle remet en cause plusieurs des fondements de l’acte médical ?