Elles font le maximum

Les loupes télescopes font partie de l’équipement standard des chirurgiens-dentistes « up-to-date ». Comme la plupart de leurs promoteurs sont de jeunes loups pas encore perclus d’arthrose, ils ne se rendent pas compte de leurs défauts et, subjugués par ce qui se dessine sous leurs oculaires, ils en oublient totalement leur posture de travail. Paradoxal me direz-vous, puisqu’on lit partout, enfin surtout dans les brochures publicitaires, que les loupes, justement, permettent de travailler le dos droit. Cela vaut certes mieux que de s’affaler sur le patient pour distinguer les sillons de ses molaires. Mais l’attitude qu’elles imposent n’est pas toujours idéale, loin s’en faut, quand on y prête attention.

La société française Dentalis commercialise une série d’équipements de fabrication américaine, conçus pour offrir les meilleures performances, notamment en termes de posture. Les loupes TTL (through the lens) qu’elle propose nécessitent la prise en compte de paramètres personnels et n’ont pu être testées ici. Je me suis donc rabattu sur le modèle Flip-Up, qui dispose d’un maximum de réglages pour s’adapter à la plupart des visages. J’ai essayé les optiques de haute résolution, grossissant 2,5 fois, sur monture en titane. Celles-ci sont légères et confortables, avec des verres en polycarbonate très enveloppants, comme sur les lunettes de cyclistes. Il est possible d’adjoindre, à l’intérieur, des verres correcteurs sur un cadre séparé, option intéressante pour les porteurs de lunettes de vue.

Le réglage de l’écartement bipupillaire est extrêmement simple et rapide : il suffit de tourner une petite molette sur le dessus de la barrette en plastique noir semi-rigide qui tient les loupes. Le système est doté de deux articulations et peut coulisser de haut en bas de façon à placer au mieux les optiques par rapport aux verres, en fonction des souhaits de l’opérateur. De fait, les réglages sont aisés même si, comme sur tous les systèmes Flip-Up, un petit réajustement peu s’imposer à chaque fois qu’on chausse les loupes.

La qualité des optiques est excellente : bien lumineuses, elles donnent une vision très nette et bien contrastée, sans distorsion ni irisation. Le grossissement est tout à fait satisfaisant pour une utilisation quotidienne, car il offre une bonne profondeur de champ, ce qui évite de figer les muscles de la nuque lorsque l’on travaille sur une surface réduite.

Malgré leurs nombreuses possibilités d’ajustage, ces loupes ne m’ont cependant pas permis de me tenir confortablement. Les optiques étant plus éloignées des yeux que sur les modèles TTL, le champ de visée est plus réduit. Ce que je voyais à travers les loupes se trouvait systématiquement au-dessus de ce que je pouvais observer sans elles. Du coup, il m’a fallu systématiquement pencher la tête un peu plus vers le bas pour embrasser mon champ de travail, ce qui a fini par devenir très fatigant pour ma nuque.

Le problème qui se pose avec ce genre de dispositif est donc, hélas, toujours le même : les optiques sont souvent irréprochables mais les montures sont encore imparfaites pour une position optimale. Pour être tout à fait honnête, précisons que ce modèle, qui ne m’a convenu qu’à moitié, peut très bien s’avérer idéal pour une autre personne. Comme tous les ergonomes qui se sont penchés sur la question, je dirais qu’il est très important, avant d’acheter des loupes, de les tester pendant plusieurs jours dans son cabinet. Acquérir ce type d’équipement par correspondance est un non-sens. Les représentants sont là pour nous écouter, enregistrer nos mesures et proposer les modèles les mieux adaptés à nos exigences et nos besoins. Ainsi, les modèles TTL sont-ils sans doute le must dans cette catégorie d’équipement. Leur coût final est plus élevé, mais la garantie d’un outil vraiment personnalisé est à ce prix.