DE BOUCHE À OREILLE
Nous avons déjà traité de deux aspects fondamentaux de l’exercice libéral, à savoir le paiement direct et le règlement à l’acte. Voyons aujourd’hui ce qu’il en est d’un autre point constitutif de ce mode d’exercice : le libre choix du praticien par le patient.
Le code de déontologie des chirurgiens-dentistes régit très clairement les relations patients praticiens. Selon l’article 4127-210, ces principes sont :
• le libre choix du chirurgien-dentiste...
Nous avons déjà traité de deux aspects fondamentaux de l’exercice libéral, à savoir le paiement direct et le règlement à l’acte. Voyons aujourd’hui ce qu’il en est d’un autre point constitutif de ce mode d’exercice : le libre choix du praticien par le patient.
Le code de déontologie des chirurgiens-dentistes régit très clairement les relations patients praticiens. Selon l’article 4127-210, ces principes sont :
• le libre choix du chirurgien-dentiste par le patient ;
• la liberté de prescription du chirurgien-dentiste ;
• l’entente directe entre patient et chirurgien-dentiste en matière d’honoraires ;
• le paiement direct des honoraires par le patient au chirurgien-dentiste.
Prudent, le législateur a tout de même prévu que : « Sauf si cela devait compromettre le fonctionnement rationnel et le développement normal des services ou institutions de médecine sociale »
Tout un programme !
Deux phénomènes d’égale importance vont impacter, voire annuler le premier alinéa de cet article fondateur.
En premier lieu, l’avenir étant au financement des soins dentaires par les mutuelles, celles-ci n’auront de cesse de négocier des tarifs avec des groupes de praticiens, afin de diriger leurs adhérents vers des chirurgiens-dentistes conventionnés. Dans les grandes villes universitaires et sur les côtes basque et d’Azur, où la pléthore de chirurgiens-dentistes dilue leurs revenus, ces derniers n’auront guère d’autre choix que d’accepter de passer sous les fourches caudines des mutuelles et autres assurances santé afin de s’assurer un minimum vital de clientèle.
Parallèlement, les patients, dirigés d’une main de fer dans un gant en euros par leurs assurances, devront « choisir » un praticien conventionné. Le libre choix ne pourra alors plus se faire qu’en amont, lors de la sélection de l’assurance santé. Considérant que ces dernières proposeront des packs de praticiens et de prestations, gageons que l’option « dentiste » sera reléguée au tout dernier rang des critères d’adoption.
En second lieu, la désertification des campagnes entraîne les patients à faire des trajets de plus en plus longs pour se rendre chez leur chirurgien-dentiste. Il n’est désormais plus rare, dans pas mal de départements, de faire quarante, soixante minutes de voiture avant de trouver un praticien. Dans ces conditions, le choix du soignant ne se fait plus en fonction de critères de sympathie, accord de personnalité, qualité du travail ou tarif des prestations. Il se fait selon un mode binaire : je me soigne en acceptant le seul praticien raisonnablement accessible, ou je ne me soigne pas.
De ces deux phénomènes, nous pouvons conclure que le libre choix du praticien par le patient, garanti par le code de déontologie d’une profession bien structurée, va mourir, tué par le nouveau modèle économique de santé, lorsqu’il n’est pas déjà mort, balayé par la disparition des chirurgiens-dentistes de campagne tels que nous les avons connus depuis toujours.