Clinic n° 01 du 01/01/2011

 

C’EST MON AVIS !

Marc BROUARD  

Dès 2011, notre profession va subir, comme toutes les autres, les effets du papy-boom : un nombre important de départs à la retraite avec un déficit de renouvellement des effectifs. Ce qui est le plus inquiétant, c’est la désaffection des jeunes qui existe déjà pour notre profession et les professions de santé en général. Si l’on compare le nombre de praticiens entrants à la CARCDSF* (praticiens libéraux) à celui des étudiants en début de cursus universitaire 6 ans plus...


Dès 2011, notre profession va subir, comme toutes les autres, les effets du papy-boom : un nombre important de départs à la retraite avec un déficit de renouvellement des effectifs. Ce qui est le plus inquiétant, c’est la désaffection des jeunes qui existe déjà pour notre profession et les professions de santé en général. Si l’on compare le nombre de praticiens entrants à la CARCDSF* (praticiens libéraux) à celui des étudiants en début de cursus universitaire 6 ans plus tôt, c’est-à-dire au numerus clausus de n – 6, on ne retrouva­it, en 2007 et 2008, que 78 et 77 % des inscrits. Ce nombre est tombé à 63 % en 2009, en sachant que parmi ces libéraux, les assistants collaborateurs n’ont ni créé ni repris un cabinet.

Tout cela explique que, déjà, de nombreux retraités ont dû mettre la clé sous la porte faute de successeur. Il est vrai que l’apparition de redressements et liquidations judiciaires a fait classer les chirurgiens-dentistes dans les professions à risque par les banques, au même titre que les médeci­ns et les pharmaciens de quartier. Il est évident que tout jeune qui veut s’installer dans des zones sensibles où plus de la moitié des patients est bénéficiaire de la CMU s’expose à de fortes difficultés financières.

Honoraires de soins et de prothèses sont bloqués, sans rapport avec les frais de gestion incontournables qui, eux, augmentent sans cesse avec des contraintes de plus en plus nombreuses.

Cette situation est très alarmante pour deux raisons. La première concerne la profession elle-même. Comment, dans un régime par répartition, assurer les retraites quand il n’y a pas de renouvellement des générations ?

La seconde concerne la santé publique. Les patients trouveront de moins en moins de cabinets de proximité pour les soins dentaires les plus élémentaires. Lorsque l’on voit, sur les sites de tourisme dentaire, les honoraires demandés par nos confrères hongrois pour un traitement canalaire (de 60 à 80 € par canal), on peut se demander si les praticiens français vont accepter longtemps de dispenser les mêmes soins pour trois ou quatre fois moins avec des charges beaucoup plus élevées. Et subir, en plus, les campagnes de dénigrement des journaux et des organismes de consommateurs. Constat parallèle, combien de praticiens ont déjà mis leurs instruments de chirurgie au placard ?

Dans les années 1990, les professionnels de santé sont descendus à plusieurs reprises dans la rue. Je me rappelle y avoir entendu des passants nous traiter de « nantis ». Nous voici maintenant à l’heure où il va falloir faire les comptes et se demander les raisons pour lesquelles il y a pénurie dans les professions médicales et pratiquement plus de jeunes qui reprennent le cabinet de leurs parents, si justement leur exercice était si « juteux » que cela…

Et peut-être verra-t-on un jour, comme c’est arrivé en Angleterre, un futur ministre de la Santé se fixer comme objectif qu’il n’y ait plus aucune discipline médicale dont les listes d’attente excèdent… 12 mois !