Clinic n° 01 du 01/01/2011

 

REPORTAGE

Catherine FAYE  

> L’hôpital Rothschild, situé dans le 12e arrondissement parisien, fait peau neuve. Issu de son transfert de la faculté de Garancière-Hôtel-Dieu, le Service d’odontologie du Pr Bernard Picard s’est désormais installé dans un bâtiment ultra neuf du nouveau Rothschild*. Cette unité pilote dotée d’un équipement de pointe et de la fine fleur des chirurgiens-dentistes peut se targuer d’être devenue un must dans le domaine de la dentisterie.

Couleurs vives, patios intérieurs, baies et portes vitrées, le concept du nouveau Rothschild repose sur le visuel et l’espace. Tourné vers la médecine physique et la réadaptation, la gériatrie et l’odontologie, l’hôpital assure une prise en charge de proximité et d’expertise dans ces trois domaines pour la population de l’Est parisien.

Vus de la rue, les bâtiments modernes, habillés de hautes fenêtres, de briquettes rouges et de panneaux métalliques couleur bois, prolongent la structure ancienne. À l’entrée de l’établissement, le hall s’étend sur une très grande superficie. Banque d’accueil, cafétéria et terrasse, boutique, salon de coiffure, salle culturelle, accès direct au jardin, tout a été pensé pour que le patient ne se sente pas dans un lieu de soins. Des jeux permettent aux enfants ainsi qu’à leurs frères et sœurs de patienter avant de se rendre dans le service d’odontologie, au premier étage.

Une sensation d’espace

Le service d’odontologie est installé sur tout un étage. Ce plateau de 2 500 m2 est entièrement neuf. « Nous étions trop à l’étroit à Garan­cière, raconte Bernard Picard. J’ai écrit le projet de ce service il y a une dizaine d’années. Dossier après dossier, j’ai défendu mon idée pour y arriver. » Un combat probant. « C’est surtout ces dernières années qu’il a fallu renégocier des choses considérées comme acqui­ses. Il faut se battre en permanence. » Il peut se féliciter d’avoir tenu bon. Ouvert de 8 h 30 à 21 h 30, son service abrite des boxes de soins individualisés et 55 fauteuils prévus pour une prise en charge « à quatre mains » d’environ 300 à 350 patients par jour. « C’est un très beau vaisseau, il n’y a rien à dire », affirme Olivier Hue, praticien dans le service.

C’est aux comptoirs d’accueil, installés dans une ­vaste salle dotée d’une signalétique claire, que sont gérés les rendez-vous, les inscriptions, les appels téléphoni­ques… L’unité de chirurgie est située dans l’aile C, la radiographie et les bureaux sont immédiatement accessibles. De part et d’autre du hall partent deux couloirs longés de baies vitrées au bout desquels se trouvent les espaces d’attente qui regardent vers l’extérieur.

Prise en charge globale

Le service est composé de quatre unités fonctionnelles : « Accueil des urgences, consultations et orientation », « Traitement de l’enfant et de l’adolescent, prévention, odontologie et maladies rares », « Pathologie, chirurgie buccale et parodontale », « Réhabilitation orale ». La première accueille les urgences dans un cadre spécifique. Dirigée par le Pr Pierre Colon, elle sert de plateforme tournante pour décider de l’orientation des patients et des plans de traitement ou pour filtrer, quand les problématiques ne sont pas adaptées au service.

Avec une circulation différenciée pour les patients, le personnel et les instruments, le confort et l’efficacité priment. Trois maîtres mots caractérisent les lieux : lumière, espace et informatisation. Tout a été pensé pour optimiser la qualité globale de la prise en charge. Le bâtiment, imaginé par le cabinet d’architectes Bruno Gaudin, est exemplaire en termes d’ergonomie et d’accessibilité. Les patients en chaise roulante ou dans des brancards peuvent y être soignés, qu’ils soient hospitalisés dans d’autres services de l’hôpital ou non. Ce plateau technique de soins dentaires est « l’un des plus beaux en Europe », affirme le chef du service. L’imbrication des activités médicales de pointe, de l’enseignement et de la recherche clinique permet d’offrir une grande qualité des soins.

L’équipe est constituée de près de 65 praticiens (professeurs, maîtres de conférences, assistants), de 9 professeurs des universités et de 7 internes. À leurs côtés, une trentaine d’aides-soignants et de membres du personnel administratif et technique. Parmi la vingtaine d’attachés bénévoles, d’anciens assistants : « Ils restent dans le circuit professionnel et transmettent leur savoir tout en s’intéressant à la recherche et aux dernières techniques de pointe », poursuit Bernard Picard. Le personnel de stérilisation de la pharmacie de l’hôpital est principalement affecté au service.

Mission : formation

La structure assure la formation d’une centaine de chirurgiens-dentistes chaque année ainsi que celle d’environ 200 étudiants hospitaliers, de 4e et 6e années (D2 et T1), et d’une cinquantaine d’étudiants en formation continue. « Le service conserve son cadre hospitalo-universitaire avec une formation continue tirée vers le haut grâce, notamment, au diplôme européen d’implantologie et de parodontologie clinique et aux masters cliniques que nous accueillons », spécifie le professeur Picard. Pour ce faire, le service dispose d’équipements pour les visioconférences et l’enseignement postuniversitaire, dont une salle d’une trentaine de places à l’étage et une autre, plus grande, d’une capacité de 150 personnes au rez-de-chaussée. « Nous avons la possibilité de faire des démonstrations en direct ou en différé lors d’un acte ou d’une opération chirurgicale. »

Le Pr Philippe Bouchard dirige l’Unité de pathologie et de chirurgie buccale et parodontale qui regroupe l’ensemble des activités de chirurgie et de traitements invasifs. Ses 7 blocs opératoires ultramodernes sont installés dans le secteur Blanc. Les patients y accèdent par un sas distinct de l’entrée des praticiens. Les blocs permettent de pratiquer une importante activité chirurgicale, notamment l’implantologie. Si Garancière posait entre 350 et 400 implants par an, l’objectif est d’atteindre 1 000 implants annuels. « Nous traitons les pathologies au sens large et tout ce qui est extraction, en parallèle avec le développement de l’implantologie », spécifie Bernard Picard. Les interventions chirurgicales sont pratiquées dans d’excellentes conditions d’asepsie. « Nous disposons aujourd’hui de techniques chirurgicales très élaborées avec des instruments non traumatiques (chirurgie ultrasonique ou piézochirurgie) qui permettent d’ajouter de l’os chez des patients à qui il en manque. Notamment en faisant de l’élévation de sinus ou des greffes osseuses », explique Philippe Bouchard. Il est secondé par son confrère, le Pr Yvon Roche. « Nous avons également des matériaux synthétiques très performants. Alors qu’avant il fallait prélever de l’os au ­niveau du menton ou à l’arrière de la mâchoire, nous utili­sons aujourd’hui des substituts osseux dans 70 à 80 % des cas. »

Soins spécifiques

L’hôpital nouveau Rothschild est, entre autres, consacré aux soins de suite et de réadaptation assurant, dans ce cadre, la prise en charge de personnes handicapées ou âgées et de patients atteints de maladies rares. À ce titre, le Service d’odontologie est amené à pratiquer des soins spécifiques, notamment pour les enfants qui souffrent d’agénésie ou de maladies occasionnant la perte des dents et qui peuvent bénéficier des meilleurs soins en implantologie.

Pour la prise en charge de la douleur, le service collabore avec le centre antidouleur de l’hôpital, en s’appuyant en particulier sur les nouvelles techniques. « Nous développons un projet d’intervention sous sédation consciente, ni locale, ni générale », enchaîne Bernard Picard. Le service est voué à être un centre de formation pour l’usage du MEOPA (mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote) qui permet à la fois de diminuer l’anxiété des patients et de réduire la quantité d’anesthésique utilisée. Un chariot MEOPA est à la disposition des praticiens formés à son utilisation ; par ailleurs, deux chariots d’urgence avec défibrillateur et de l’oxygène sont présents dans le service.

La présence de la pharmacie à usage interne (PUI) sur place garantit une plus grande sécurité des soins. Une antenne a été mise en place juste à côté du Service d’odontologie. La stérilisation, elle, est située au sous-sol de l’hôpital : des ascenseurs distincts pour le « sale » et pour le « propre » y mènent directement. Enfin, la radiographie informatisée, ou CR (computed radiography), est dotée d’un système Kodak CR7400 et permet de prendre des clichés en pré ou postopératoire. Quatre boxes sont facilement accessibles au cœur des unités. Pour visualiser les clichés, le logiciel Trophy Dicom est installé sur des ordinateurs situés à proximité. Il est également possible de les lire au fauteuil, grâce au logiciel centralisé Carestream PACS.

Mais, pour ce qui est de la technologie de pointe, Bernard Picard n’est à court ni d’idées ni de projets : « Nous prévoyons d’acquérir un scanner cone beam pour pouvoir faire des images en 3D. Pour l’implantologie, c’est quasiment indispensable. »

Soins polyvalents

Le Service d’odontologie du nouveau Rothschild prend en charge un très large panel de pathologies. Endodontie, odontologie conservatrice ou prothétique, parodontologie y sont pratiquées dans l’Unité de réhabilitation orale dirigée par Bruno Tavernier. Ces disciplines sont traitées par des étudiants de D2 et T1, des internes et/ou des étudiants de DU d’implantologie ou de prothèse ainsi que par des enseignants. L’unité dispose de 2 salles cliniques et de 36 fauteuils polycliniques pour tous les soins et les prothèses dentaires. Elle est située dans le secteur Genêt où jaune d’or et teintes mordorées tapissent fauteuils et panneaux transparents.

Enfin, pour faire face à une forte demande difficile à satisfaire en ville, l’un des objectifs principaux du service a été de développer et d’améliorer la prise en charge des enfants. Au nouveau Rothschild, jeunes patients polycariés, souffrant de pathologies médicales irréversibles, de problèmes hormonaux, de handicaps ou d’anorexie sont accueillis dans le secteur Grenat où, comme son nom l’indique, la couleur dominante est le rouge bordeaux. Dirigée par l’ancienne doyenne de Garancière, le Pr Marie-Laure Boy-Lefèvre, l’Unité de traitement de l’enfant et de l’adolescent s’occupe des soins polyvalents d’odontologie pédiatrique, des soins d’orthopédie dento-faciale (également pour les adultes) et de prévention. Elle travaille en lien avec le Centre de référence maladies rares (CRMR), pour les enfants atteints de maladies génétiques, ainsi qu’avec le Service de chirurgie maxillo-faciale et plastique infantile de l’hôpital Armand-Trousseau dirigé par le Pr Marie-Paule Vazquez. Les enfants qui y sont suivis pour des pathologies lourdes, telles que l’onco-hématologie, la néphrologie, le neuro-handicap ou l’infectiologie, peuvent être pris en charge dans l’unité de Marie-Laure Boy-Lefèvre. En effet, l’offre du nouveau Rothschild complète la prise en charge existante à Trousseau, qui est limitée aux enfants hospitalisés non déplaçables dans une autre structure ou nécessi­tant des soins sous anesthésie générale et/ou multi­disciplinaires.

Le Service d’odontologie du nouveau Rothschild a de beaux jours devant lui. Ce centre de référence et de compétences a tout pour devenir un exemple en termes d’expertise thérapeutique, notamment par les connaissances que praticiens et étudiants peuvent y acquérir.

* http ://rothschild. aphp.fr/

La construction et la mise en place du nouveau Rothschild, pour une surface utile de 20 000 m2, a demandé un investissement total de 98 millions d’euros, dont 9,2 millions pour l’équipement. Tourné vers la prise en charge du handicap, les soins aux personnes âgées et l’odontologie, l’hôpital assure une prise en charge de proximité et d’expertise. Nombre de ses patients sont issus des services des hôpitaux du groupe hospitalier STARTT (Saint-Antoine, Rothschild, Armand-Trousseau/La-Roche-Guyon, Tenon). Avec des moyens informatiques regroupés et une mutualisation des moyens, « on circule à l’intérieur du groupe comme si on était dans un immense hôpital », explique Bernard Picard.

Construit au début du XXe siècle à l’initiative du baron Edmond de Rothschild, l’hôpital, qui porte son nom, avait initialement vocation à accueillir et à soigner les patients de confession juive.

Pendant la Première Guerre mondiale, il est déclaré hôpital auxiliaire militaire et reçoit sans distinction les blessés du front et les civils victimes de la guerre. Il revient ensuite à sa mission première mais, pendant l’occupation allemande, il est placé sous une direction agréée par l’occupant et devient un centre de rétention.

En 1954, après 40 années de gestion privée, l’hôpital est donné à l’administration centrale de l’Assistance publique.

Il connaît ensuite de nombreuses modifications : construction d’un bâtiment de chirurgie, de laboratoires, du bâtiment social… Les pavillons, qui ont conservé leur aspect d’origine, ont tous été rénovés à l’intérieur.

C’est pour répondre aux besoins de l’Est parisien que l’hôpital Rothschild est aujourd’hui rénové. Sa vocation initiale de court séjour s’oriente désormais vers des activités de soins de suite, de rééducation neuro-orthopédique, de gériatrie, etc.

Le nouveau bâtiment est construit sur la partie ouest de l’hôpital. Il abrite 180 lits de rééducation et 23 places de jour, ainsi que 128 lits de soins de suite gériatrique, 32 lits de court séjour gériatrique et 6 places de jour.

Le Service d’odontologie, de 55 fauteuils, a ouvert ses portes le 31 août 2010.