Clinic n° 07 du 01/07/2010

 

DE BOUCHE À OREILLE

Frédéric BESSE  

1. Le règlement direct

Depuis des années, les piliers de l’exercice libéral à la française sont :

• le règlement direct des actes au praticien ;

• le règlement des praticiens à l’acte ;

• le libre choix des praticiens par les patients.

Désormais, les salariés ne touchent qu’une faible part de la richesse qu’ils produisent. En tant qu’employeurs, nous avons remarqué que le chèque que nous leur faisons chaque mois ne...


1. Le règlement direct

Depuis des années, les piliers de l’exercice libéral à la française sont :

• le règlement direct des actes au praticien ;

• le règlement des praticiens à l’acte ;

• le libre choix des praticiens par les patients.

Désormais, les salariés ne touchent qu’une faible part de la richesse qu’ils produisent. En tant qu’employeurs, nous avons remarqué que le chèque que nous leur faisons chaque mois ne correspond pas du tout au total de la rubrique « coût global du salarié ».

Ces montants considérables, que l’on peut au choix considérer comme détournés, volés, rackettés, disparaissent dans les circuits opaques de la « protection sociale ». Le problème, pour ceux qui ont produit cette richesse, est de pouvoir en profiter sans que cela leur coûte encore plus. Dans le cas de nos patients, dont la situation sociale risque fort de se détériorer, il va devenir de plus en plus difficile d’exiger qu’ils nous règlent avant d’être remboursés.

En effet, même si l’immense majorité de nos concitoyens, qui n’ont jamais pu sortir de leur statut de salarié, sont maintenus dans l’ignorance du rapport qui existe entre le travail et l’argent, et de la destination de ce dernier, confusément, beaucoup d’entre eux ont la certitude qu’une partie des prestations de santé est prépayée au travers de leurs cotisations sociales. Il n’est que de voir le succès des cabinets mutualistes pour comprendre ce que nos patients attendent en retour de leurs cotisations.

Par ailleurs, la mainmise à venir des assurances et des mutuelles sur les soins dentaires va conduire ces dernières à chercher à recruter leurs clients en fonction du service à leur rendre, plutôt que du montant qu’elles pourront leur rembourser, ce dernier cas de figure étant risqué pour leurs finances, surtout dans l’hypothèse, probable, d’une concurrence exacerbée entre ces organismes. Ce service se situe à trois niveaux : la proximité de membres du personnel soignant agréés, la qualité des soins et la facilité avec laquelle les cotisants pourront récupérer l’argent de leurs cotisations.

Ces deux phénomènes conjugués, la paupérisation de nos patients et la mainmise de plus en plus prégnante des assurances et des mutuelles, conduisent inévitablement à une généralisation du tiers payant. Cette situation doit être prévue et organisée si nous ne voulons pas qu’il en résulte des ennuis considérables. Elle n’aura pas que des inconvénients. D’une part, habilement négociée, elle nous permettra de mieux traiter la frange de nos patients la moins aisée en déconnectant le coût du traitement de la somme que le patient doit payer, d’autre part elle nous permettra de sécuriser notre trésorerie à la condition que les règlements par les organismes assureurs soient faits, et rapidement.

Reste la question déontologique : serait-ce la fin de l’exercice libéral tel que nous le connaissons ? La question mérite d’être débattue, à la condition de ne garder présent à l’esprit qu’un seul aspect : l’intérêt de nos patients et lui seul.