GÉRER
CHRONIQUE
En cette période de ralentissement économique, les patients, disons-le clairement, consentent moins facilement qu’avant à se défaire de leur argent. Ajoutez à cela une certaine concurrence avec les centres mutualistes, les réseaux de soins et, surtout, la concurrence extraprofessionnelle, et vous comprendrez mieux mon approche de la conception des traitements aujourd’hui. Je m’explique.
La quantité d’hier doit désormais faire place à une qualité relationnelle avec...
En cette période de ralentissement économique, les patients, disons-le clairement, consentent moins facilement qu’avant à se défaire de leur argent. Ajoutez à cela une certaine concurrence avec les centres mutualistes, les réseaux de soins et, surtout, la concurrence extraprofessionnelle, et vous comprendrez mieux mon approche de la conception des traitements aujourd’hui. Je m’explique.
La quantité d’hier doit désormais faire place à une qualité relationnelle avec notre patient/consommateur. Si vous vous fondez uniquement sur le nombre de patients et la quantité des traitements, vous rencontrerez inévitablement des difficultés dans le temps. L’époque d’un nombre important de rendez-vous de courte durée dans une journée de travail, d’une approche partielle des besoins du patient et des propositions de traitement fondées essentiellement sur les remboursements est, à mes yeux, depuis belle lurette complètement révolue. La preuve a été faite qu’elle aboutissait de façon certaine, d’une part pour le patient, à une dentisterie que j’appelle patchwork et, d’autre part pour le praticien, non seulement à une faible productivité mais aussi (et peut-être surtout) au burn out, autrement dit à la dépression plus ou moins larvée d’origine professionnelle.
Par ailleurs, les patients d’aujourd’hui sont globalement très bien informés. En effet, le développement de l’information médicale ainsi que la facilité d’accès à des sites professionnels sur Internet leur permettent d’avoir un niveau de connaissances plus élevé qu’auparavant dans le domaine dentaire. Pour s’en rendre compte, il suffit d’aller sur les blogs de patients. Toutefois, cette nouvelle masse d’informations est souvent de nature à générer une certaine confusion. En effet, il leur manque la culture professionnelle mais surtout l’information personnalisée concernant leur propre cas. C’est la raison pour laquelle ils ont besoin d’un conseiller avant de s’engager. Ils ne veulent plus d’un praticien qui les regarde de haut, leur parle un langage qu’ils ne comprennent pas et prend les décisions à leur place sans leur demander leur avis. Aujourd’hui, les patients sont devenus des consommateurs éclairés, informés, exigeants et infidèles.
Il est temps que nous, chirurgiens-dentistes, réalisions qu’en fait, nous sommes devenus également des prestataires de services. Cela revêt-il un caractère péjoratif ? Bien au contraire, cela ne signifie en rien que notre profession s’apparente désormais à celle des vendeurs agressifs. Cependant, je dois reconnaître qu’à la lecture de certains articles rédigés par ailleurs et par des non-praticiens, on pourrait le croire. Il semble même que certains aient confondu la cavité bucco-dentaire du patient avec un tiroir-caisse. Cette approche est, à mes yeux, non seulement inadaptée mais elle aussi complètement dépassée. En tant que praticien, je considère qu’il s’agit simplement de ne plus se contenter uniquement de soins de qualité (préalable non négociable) mais également d’offrir un niveau de service égal à celui des soins. Il a été prouvé que les individus prennent leurs décisions d’achat, quel que soit le produit acheté, en premier lieu en fonction de leurs émotions. C’est pourquoi ils se sentent tout aussi concernés par la qualité du service qu’ils reçoivent que par le résultat de leur traitement. Cependant, ils évalueront en premier lieu le niveau du service offert. Alors, et seulement alors, ils pourront justifier le choix du traitement. Le praticien de notre époque doit entreprendre de guider ses patients par une écoute attentive et une aide au choix parmi les traitements. Cela s’appelle une consultation d’aide. En un mot, et il s’agit là d’un concept majeur, les patients ne doivent plus nous voir uniquement comme des chirurgiens-dentistes mais comme des conseillers en dentisterie.