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Concentrés sur les problèmes de leurs patients, les soignants ne prennent pas toujours le temps de s’occuper de leur santé et, en particulier, de prévenir les pathologies liées à leur métier. Pierre Canoui, un psychiatre, et Philippe Babielle, un ostéopathe, étaient il y a quelques semaines les invités des premières « Rencontres de la CNSD » pour débattre du burnout et des troubles musculo-squelettiques.
Quelques données permettent d’approcher l’importance du burnout (syndrome d’épuisement professionnel). Les affections psychologiques des médecins sont la deuxième cause d’interruption temporaire de travail après les cancers. Selon la Caisse autonome de retraite des chirurgiensdentistes et des sages-femmes (CARCDSF), les problèmes psychiatriques sont la deuxième cause d’inaptitude et d’invalidité pour raisons médicales des chirurgiens-dentistes de moins de 60 ans. Mais, attention à ne pas faire du burnout une notion « fourretout » prévient le psychiatre Pierre Canoui. Le burnout « n’est pas une dépression ». C’est un « stress chronique, non identifié ». Et par « stress », il ne faut pas entendre la « réaction normale et nécessaire d’adaptation de l’être vivant » mais le mot quand il exprime un dépassement, « un débordement » de cette capacité. C’est alors que le burnout s’installe.
Le repérer « est compliqué », reconnaît Pierre Canoui. Car le syndrome est « insidieux et progressif ». Celui qui en est atteint est généralement le dernier à être au courant. Toutefois, trois signes peuvent l’alerter :
• un état « d’épuisement émotionnel » qui se traduit par le « sentiment d’être vidé, de n’avoir plus rien à donner » ;
• une « déshumanisation de la relation avec les patients, comme s’il n’était plus possible de s’intéresser à ce qu’ils nous disent », continue Pierre Canoui ;
• « un accomplissement de soi diminué » qui conduit à une impression d’être inutile et en échec professionnel.
D’autres indicateurs peuvent se manifester : des maux physiques (mal de tête…) et un affaiblissement du plaisir pour la vie. Et puis, généralement, le sujet a tendance à réagir par « un acharnement pathologique au travail ».
Pour ne pas en arriver là, Pierre Canoui suggère aux soignants de s’investir dans des activités comme les formations, les congrès, mais aussi le syndicalisme qui permettent de « prendre de la distance par rapport à son travail, de réfléchir ». Plus généralement, conclut le psychiatre, « c’est dans le détail de nos vies que l’on va nouer du bien-être ou du mal-être ».
Autre problème de santé lié à l’exercice : les troubles musculo-squelettiques. Là aussi la prévention est essentielle car « même si de nombreux progrès ont été réalisés depuis 20 ans sur le plan de l’ergonomie, les problèmes ne sont pas réglés », constate Philippe Babielle, un ostéopathe qui dresse la liste des mauvaises postures inévitables : une assise prolongée, une tension musculaire elle aussi prolongée, des bras en élévation, la focalisation visuelle, un travail en apnée… Que faire ? Prendre conscience de son comportement, se préparer au quotidien physiquement, apprendre à respirer et, dernier conseil, choisir un sport que l’on pratique avec plaisir, « plutôt que de s’astreindre à compter les carreaux d’une piscine » !
Roland L’Herron va créer un observatoire de la santé des chirurgiens-dentistes dont la mission sera de regrouper les données sur la pénibilité du métier auprès de la caisse de retraite, de la MACSF et des caisses d’Assurance maladie. L’industrie et la distribution seront également sollicitées. L’objectif de cet observatoire sera la prévention du burnout, des troubles musculo-squelettiques et autres pathologies.