Clinic n° 06 du 01/06/2010

 

TRIBUNE

Deux confrères qui ont participé à l’expérience d’évaluation des pratiques professionnelles (EPP, voir page 10) menée en Ille-et-Vilaine témoignent de leur démarche. Si évaluer l’organisation des soins est pour eux très bénéfique, leur avis est beaucoup plus réservé quant à une extension à l’évaluation de la pratique elle-même.

Pour un exercice serein

Philippe Le Treut (Chantepie – 35)

Comme mes confrères, je suis confronté aux normes qui nous assaillent et à la difficulté de les appliquer. Faire la synthèse de tout ce dont nous devons tenir compte dans un cabinet représente un très grand travail. Et puis à la longue, à force de privilégier les soins, on ne voit plus ce qui pourrait choquer dans son cabinet. La démarche d’amélioration menée en Ille-et-Vilaine est très pédagogique. Elle permet de se poser directement les bonnes questions sous la forme d’un QCM sur l’organisation et la sécurité de son cabinet. Par exemple, on ne nous dit pas qu’il faut avoir un extincteur, mais on nous demande si un plan permet à toutes les personnes présentes dans le cabinet de savoir où se trouvent les extincteurs. Ce questionnement entre confrères sur notre organisation, sans visée coercitive, est un précieux outil d’amélioration. J’ai choisi d’approcher le plus possible du score maximum dans le domaine de l’hygiène et de l’asepsie.

Je considère cette démarche comme une aide à un exercice professionnel serein avec l’ensemble de l’équipe et non comme un bâton pour frapper ! Aller jusqu’à évaluer la pratique est cependant risqué : on pourrait nous imposer une pratique idéale mais impossible compte tenu de la réalité économique des cabinets.

Une démarche enrichissante

Jean-Yves Jacob (Rennes – 35)

Je m’étais lancé en 1997 dans une démarche qualité qui devait aboutir à la certification. Mais je ne suis pas allé au bout du processus car c’est la démarche elle-même et la mise en place de protocoles et des modes d’emploi qui m’intéressaient avant tout. Ayant vécu cette expérience et apprécié ses retombées pour le cabinet, j’étais prêt à recommencer lorsque l’occasion s’est présentée. Je suis devenu « animateur » avec 8 autres confrères. Nous nous sommes autotestés et critiqués dans nos cabinets, puis nous avons réfléchi avec des formateurs de la Haute Autorité de santé au référentiel et à l’approche des praticiens. Même sensibilisés à ces questions d’organisation du cabinet, à force de se focaliser sur les soins aux patients, nous nous sommes aperçus que nous laissions de côté certains aspects. La signalétique dans le cabinet est un exemple. Cette forme d’expérimentation gratuite entre confrères est très enrichissante. Elle a aussi l’avantage d’impliquer les assistantes. Pour la généraliser en France, il faudrait que des praticiens s’impliquent dans chaque département… La profession doit toujours rester vigilante afin que les démarches aussi saines que l’EPP restent encadrées par elle-même. Il ne faudrait pas que les mutuelles en profitent pour nous imposer certaines obligations alors que la nomenclature ne tire pas la profession vers le haut.