Député de la Mayenne depuis 2002, membre du Conseil général de la Mayenne, maire de Vaiges (1 071 habitants) depuis 1995, à 67 ans Marc Bernier est l’un des 7 chirurgiens-dentistes qui siègent sur les bancs de l’Assemblée nationale. Il se consacre aujourd’hui exclusivement à ses mandats électoraux, très préoccupé par les questions touchant les professions libérales.
Comment êtes-vous entré en politique ?
M. Bernier : Par le syndicalisme. J’ai été président départemental de la CNSD, puis président départemental du Centrenational des professions de santé et,enfin, président de l’UNAPL. J’ai aussi été membre du Conseil économique et social avant d’endevenir le secrétaire national.
Quels liens vous lient à la commune de Vaiges ?
M. Bernier : J’ai fait mes premiers pas en politique en 1988, quand François d’Aubert m’a demandé de figurer sur sa liste aux municipales de Laval. En 1994, j’ai été élu conseiller général dans le canton de Sainte-Suzanne, berceau de ma famille. Cette mêmeannée, j’ai aussi été élu adjoint au maire de Vaiges, commune danslaquelle j’exerçais en cabinet secondaire. J’en suis devenu le maire l’année suivante.
Et vous êtes devenu député de Mayenne ?
M. Bernier : Après la dissolution de l’Assemblée nationale en 1997, j’ai fait campagne avec le député sortant Henri de Gastines qui m’a demandé d’être son suppléant alors que son ancien suppléant se présentait contre lui. Nous avons été élus au premier tour ! Aux élections suivantes, en 2002, Henri de Gastines ne se représentant pas, j’ai été candidat et j’ai été élu.
Quel est le plus beau souvenir de vos mandats ?
M. Bernier : En tant que maire, c’est l’inauguration à Vaiges par la ministre de la Défense d’alors,Michèle Alliot-Marie, de la première gendarmerie de France construite avec des financements publics et privés. En tant que conseiller général, je me souviens particulièrement bien de l’attribution du label « Pays d’art et d’histoire » et de la construction du CIAP (Centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine) à Sainte-Suzanne. Enfin, en tant que député, un de mes plus beaux souvenirs a été d’avoir proposé et fait passer, en 2003, un amendement à la loi sur les retraites permettant aux personnes ayant commencé à travailler à 14 ans de pouvoir partir à la retraite avant 60 ans.
Vous avez présenté à l’Assemblée un rapport concernant la démographie médicale professionnelle. Où en est-on aujourd’hui ?
M. Bernier : Ce rapport, adopté à l’unanimité à la commission des affaires sociales de l’Assembléenationale – ce qui est très rare –, a très largement inspiré la loi HPST.
Quelles solutions défendez-vous en faveur d’une meilleure répartition des chirurgiens-dentistes sur le territoire ?
M. Bernier : Je suis favorable à des stages obligatoires pour les jeunes praticiens dans les zones « sous-denses », avant qu’ils soient conventionnés. Je suis aussi trèsfavorable à une augmentation du numerus clausus des facultés qui se trouvent dans les régions qui ont le plus besoin de praticiens. C’est aux agences régionales de santé qu’il revient de faire ces choix.
Que vous a apporté votre formation de chirurgien-dentiste ou votre pratique dentaire dans l’exercice de vos mandats ?
M. Bernier : Mes mandats électifs professionnels m’ont appris àrechercher le consensus avant d’imposer une idée. J’ai pu, en tant que président du Groupe d’étude sur les professions libérales àl’Assemblée nationale, défendre les revendications des chirurgiens-dentistes et faire connaître leur rôle encore trop méconnu dans la santé publique (préventionbucco-dentaire, nutrition des personnes âgées, visite des femmes enceintes…).
Quel regard portez-vous aujourd’hui sur la profession dentaire ?
M. Bernier : La réduction du nombre des chirurgiens-dentistes et l’inégalité de la répartition sur le territoire sont les enjeux majeurs des prochaines années po ur la profession. La spécificité et le rôle de cette profession sont encore trop méconnus. J’en veux pour preuve le fait, d’abord, que l’assistante dentaire n’est toujours pas inscrite au Code de la santé publique. Et puis, les chirurgiens-dentistes sontencore perçus comme des « vendeurs » de prothèses dont lestarifs sont trop élevés. La visite du dernier congrès de l’ADF m’a permis de constater l’énorme progression de la technologie mise à la disposition des chirurgiens-dentistes. Je pense que les futurs décrets concernant la formation continue et l’internat qualifiant permettront de considérer lachirurgie dentaire comme une profession médicale à part entière, indispensable dans la médecine de premier recours.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune confrère qui débute son exercice ?
M. Bernier : Je lui recommanderais d’exercer comme collaborateur avant d’envisager une association et de ne pas hésiter à « racheter » une patientèle. Je prône aussi l’exercice en groupe avec d’autres professions médicales ou paramédicales. Cette démarche entre dans la notion de « pôle santé » que j’ai fait voter dans la loi HPST. Cette mixité entre les professions médicales permettra non seulement d’améliorer la santé bucco-dentaire des personnes âgées et handicapées mais aussi d’agir en faveur de la nutrition, de l’hygiène et du dépistage des cancers buccaux (5 000 par an) au sein des catégories de la population défavorisées.
Après 1 année de maths sup à Paris, j’ai préparé le CPEM à Rennes.
J’ai exercé seul pendant 30 ans dans un cabinet principal de chef-lieu de canton et dans un cabinet secondaire à Vaiges. Ce que je préférais dans mon exercice, c’était de rendre le sourire à « pleines dents » et de proposer un miroir pour le constater ! Mais lorsque je suis devenu député, j’ai dû revendre mon cabinet car je ne pouvais plus assumer les deux fonctions en même temps. Aujourd’hui, les contraintes qui pèsent le plus dans l’exercice de mes mandats : concilier vie familiale et mandat électif, et présence à l’Assemblée nationale et dans ma circonscription. Mais sans regret après 30 ans « d’exercice au fauteuil », je suis heureux de défendre mes idées en tant qu’élu de la nation.