Il ressort gagnant

Quand je l'ai vu la première fois, il m'a fait une drôle d'impression : vaguement pataud, avec ses décorations grises et blanches au dessin fantaisiste, son gros bouton vert et sa tête courte et large, je l'ai trouvé étrange. En tout cas, plus déroutant que son principal et unique concurrent, d'origine japonaise, aux lignes finalement bien traditionnelles.

Ce qui caractérise avant tout ce contre-angle endodontique, c'est qu'il fonctionne sans fil. Comme une lampe à polymériser, il se recharge sur un socle branché à une prise de courant. Le design du manche est assez singulier. Ce n'est qu'une fois en situation de travail qu'on saisit sa véritable personnalité. Son revêtement, alternance de surfaces en plastique dur et en silicone souple, assure une prise en main extrêmement efficace et confortable. L'ensemble est ridiculement léger (120 g) et, grâce à sa longueur bien étudiée (18 cm), s'avère incroyablement maniable.

Le panneau de contrôle est réduit à sa plus simple expression : une série de 5 minidiodes et une touche ronde et plate en dessous. Aucun relief propice à l'incrustation de saletés, tout est lisse et facile à nettoyer d'un coup de lingette : cette partie-là du dispositif n'est pas autoclavable. À côté de chaque diode, qui s'affiche en vert printemps, une inscription de même couleur désigne le couple maximal à partir duquel l'instrument cesse de tourner : 0.5, 1.0, 1.5, 2.5, 4.0. La programmation est très simple : il suffit d'appuyer sur la touche pour voir les diodes s'allumer - ou s'éteindre - et lâcher la pression lorsque la valeur souhaitée est atteinte. Pour vous aider à choisir les meilleurs réglages, le fabricant fournit une série de cartes, avec des tableaux de valeurs pour chaque système de limes NiTi disponible sur le marché.

Deux modes de fonctionnement sont possibles, que l'on sélectionne en appuyant durant 5 secondes sur la même touche de fonction. En mode standard, la lime tourne à gauche lorsque le couple sélectionné est atteint, puis s'arrête. En mode « marche avant automatique », elle repart en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre dès que la pression de la lime dans le canal disparaît. Ayant testé pendant quelques instants le premier mode, j'ai immédiatement programmé le second, à mon avis beaucoup plus pratique.

Pour faire fonctionner tout ce beau monde, il faut appuyer sur un gros déclencheur ovale au bout du manche. Bien large, il ne nécessite qu'une pression modérée pour mettre en marche la lime.

Proportions idéales

La partie amovible en métal, c'est-à-dire la tête et le début du manche, est encore plus originale. Comparée à celle d'un contre-angle conventionnel que l'on fixe sur le moteur de l'unit, elle semble à la fois minuscule et trapue. Relativement large à sa base, elle se termine par une tête étroite et courte - 8 mm de diamètre, 10 mm de haut - munie d'un pousse-bouton d'une souplesse exemplaire. L'angle entre les différentes parties du manche, la hauteur de la tête, la qualité des déclencheurs, tout concourt à donner un instrument aux proportions idéales, d'un confort d'utilisation inégalé. Cette même tête (appelons-la ainsi, même s'il s'agit de tout l'ensemble qui s'enclenche à l'avant du moteur) peut naturellement tourner, en friction douce, autour de son axe. On choisira une orientation différente selon la dent à traiter, au maxillaire ou à la mandibule. Le déclenchement s'effectuera alors avec le pouce, sans changer la position de la main. L'autre réussite, c'est la longueur réduite de la tête et la douceur du pousse-bouton, que l'on peut actionner avec l'index pour remplacer les instruments l'un après l'autre. Depuis la disparition des systèmes à guillotine, plus aucun contre-angle à pousse-bouton ne permettait de faire cela.

L'Entran - quel drôle de nom pour nous, Français - propose une vitesse de rotation unique, 300 tr/min, constante quelles que soient les circonstances. Le moteur est très silencieux, c'est à peine si on l'entend tourner. Les limes travaillent en douceur, et il convient de ne jamais forcer - à moins d'avoir réglé le couple très haut - pour éviter de les voir s'arrêter et cesser leur progression.

L'opérateur peut être complètement détendu, tout se passe de manière automatique. Lorsque le couple programmé est atteint, la lime se met instantanément à tourner à l'envers, puis à l'endroit une fois légèrement ressortie du canal. On ne perçoit aucun à-coup ni temps mort comme je l'ai souvent constaté avec les contre-angles couplés à un localisateur d'apex.

Que vous le vouliez ou non, l'Entran vous discipline et tempère vos ardeurs. Vous êtes obligé de travailler tranquillement, sans jamais vous précipiter vers l'apex. Hélas, malgré les précautions qu'il prend lui-même et vous impose, il ne vous mettra pas totalement à l'abri d'un accident. La pointe d'une lime, si l'on n'y prend pas garde, peut traverser le foramen et s'y fracturer. J'avais déjà rencontré ce genre de problème avec son concurrent, car ces systèmes atténuent considérablement les sensations tactiles.

Malgré ces limitations, l'Entran s'avère une option extrêmement séduisante pour qui souhaite acquérir un moteur d'endodontie maniable et léger. Le fabricant oriente essentiellement sa communication sur les avantages du sans-fil. Sa modestie lui fait taire les autres aspects pratiques de son appareil, uniques sur le marché, qui le placent vraiment sur le dessus du panier.