Clinic n° 02 du 01/02/2010

 

TRIBUNE

Contre l'avis du gouvernement et de l'Assemblée nationale, les sénateurs ont tenu à inscrire dans la loi HPST (hôpital, patients, santé et territoires) l'article 57 qui oblige les chirurgiens-dentistes à mettre sur les devis le prix d'achat des prothèses. Nos témoins du mois ne comprennent pas les raisons d'une telle décision...

Une brimade de plus

Véronique FOUCHER-SUET (Paris - 75)

Nous sommes dans le délire. Quand j'achète un pull, je ne demande pas le prix de la laine qui a servi à le produire. Je ne vois pas pourquoi nous donnerions à nos patients ce type d'information alors que nous ne le demandons pas aux autres. Et puis, la facture du prothésiste n'est en aucun cas le seul élément rémunérateur permettant l'établissement du prix de nos prothèses. Il y a un praticien, une assistante, un local, de l'électricité... Pourquoi ne pas donner aussi le salaire horaire de mon assistante, le coût du matériel d'empreinte... ? Enfin, en quoi cette information peut-elle renseigner nos patients ? Pour une céramique, le coût varie en fonction de la base, si elle est ou non en or par exemple. Cette tarification n'a vraiment aucun sens pour le praticien comme pour le patient. Quelle idée de l'exiger sur le devis ! Quand un patient me demande le coût du labo, je n'en fais pas un secret.

Je ne pense pas que cette mesure changera grand-chose dans la réalité ; en revanche, elle est dangereuse sur un plan diplomatique. Nous sommes dans une relation de confiance avec nos patients. Si les politiques pouvaient s'occuper des problèmes réels et ne pas aller semer la zizanie dans des professions qui fonctionnent et qui ont des patients satisfaits de leurs praticiens ! Je ne vois pas du tout le but de la manoeuvre, si ce n'est jeter l'opprobre sur notre profession. Pour moi, c'est une brimade de plus.

Pourquoi tant de haine ?

Philippe COURT (Saclay - 91)

Entre ceux qui nous accusent de poser des prothèses chinoises, les obligations concernant la radioprotection et cette nouvelle règle que l'on nous impose sur les devis, l'année 2009 a vraiment accumulé les absurdités. Je ne comprends pas ce que l'on a contre nous. Pourquoi tant de haine ?

Jamais un patient n'a évoqué ce sujet avec moi. Pas un ne m'a demandé le prix que me facture le prothésiste. Cette disposition va jeter le trouble chez nos patients. C'est comme si notre rôle se résumait à poser une pièce prothétique. On nous fait passer pour de simples intermédiaires, des commerçants ! Et encore, on ne demande pas aux commerçants d'indiquer le prix auquel ils ont acheté les produits qu'ils vendent.

Dans mon cabinet, j'ai pris 1 heure pour tailler la dent, j'ai fait une empreinte, j'ai posé une prothèse provisoire dont le prix est compris dans le prix global, il y a eu une séance d'essayage, j'ai pris la teinte, et si la prothèse ne convient pas, je la fais refaire par le labo... L'acte prothétique est un acte médical global qui prend du temps et que les chirurgiens-dentistes sont seuls à pouvoir réaliser.